I've found your skin in the dark... Edelweiss Blackmoth & Cleora S. Hailey
Les arbres étaient parcourus d’un frémissement dans la violente brise de la nuit hivernale. Leurs rameaux s’agitaient en sifflant, tels des ombres tranchant sur la toile du ciel nocturne encore jeune. Vingt heures sonnèrent. Le clocher d’une église avoisinante tonna les huit sommations, avant qu’elles ne laissent au monde l’heure irrévocable. Un silence encore tremblotant. L’herbe était trempée par l’averse qui s’était abattue une heure plus tôt, et la senteur en embaumait le parc Larkhall.
Une silhouette traversait la pelouse battue par les vents, les brins humides et froids fouettant ses chevilles. Les lanières de cuir ébène de ses sandales serpentaient autour de ses mollets, s’entrecroisant à la manière de deux vipères, fines et écailleuses. Les pans inférieurs de sa robe étaient taillés dans long tissu doré et satiné, fendu à mi-chemin des cuisses, dévoilant deux jambes pâles en mouvement. La partie supérieure était faite d’un tissu apparenté à du tulle, noir et scintillant d’or parmi les mailles recouvrant un autre tissu d’un noir complètement immaculé. Il remontait le long de ses hanches, avant de s’enrouler autour de ses épaules et de les enserrer en de larges bretelles. Deux bras nus à la peau livide étaient emprisonnés au niveau des coudes par de gros bracelets de cuivre, ornés d’étranges motifs anciens. Ils étaient glacés dans l’air du soir et semblaient lacérer la chair, laissant déjà leur empreinte. Retenant une cape d’or vaporeuse, déjà attachée sur chaque épaule. Gonflée par le vent, elle était parcourue de vagues luxuriantes, tranchant dans la pénombre qui tombait sans bruit.
Les bras légèrement écartés, Edelweiss accueillait la brise, malgré sa froideur qui la faisait frissonner ainsi légèrement vêtue. Ses lèvres, tout en dorure, tentaient de s’empêcher de trembler et paraissaient murmurer quelque secret à la brise, comme des trésors. Ses iris n’étaient plus bleus mais noirs, et ses yeux prolongeaient leur fin avec un trait de khôl tombant à la manière d’un masque délicat sur ses traits. Ses longs cheveux noirs se mépriseraient bientôt avec la nuit, mais teintés ici et là de mèches d’un blond cendré et d’un bleu de minuit, ils la tromperaient aisément. Un fine chaîne d’or traçait la circonférence de sa tête ; et pareilles à des gouttelettes d’or perlant de sa chevelure, se mêlant à ses mèches sombres, de petites chaînes ressemblant à des sillons dorés s’en écoulaient au milieu de l’ébène.
Hâve, ainsi dans les ténèbres naissantes, la jeune sorcière avait l’air d’une reine revenue d’entre les morts. Une reine qui avait soif de vie, les bras ainsi ouverts. Pourtant, elle les laissa bien vite retomber à ses côtés, ne récoltant qu’une étreinte sans chaleur. Les arbres continuaient leurs persiflages tandis qu’elle s’arrêta un instant, glissant ses doigts sous le buste de sa robe. Sa peau glacée lui provoqua un violent frisson. Elle sortit une petite flasque qui reposait alors sur son sein. La chaleur du métal la réconforta, et elle s’accrocha à cette sensation en portant le goulot à ses lèvres. L’alcool enflamma sa gorge, et prit violemment possession de ses entrailles pendant un bref instant.
Essuyant une goutte au coin de sa bouche, elle ralentit son geste, pressant les paupières en encaissant l’énième brûlure du whiskey. Mais cela ne semblait jamais assez pour oublier. Oublier ces cauchemars, ces odeurs putrides, ces yeux mornes et cette poussière tombale qui s’incrustaient partout à la fois… et Paul.
Elle rouvrit les yeux. Ce serait une nuit sans lune. Les ombres l’entouraient, uniquement troublées par un lampadaire au loin. Un globe de lumière blanche, trouant l’obscurité. Malgré elle, un fin sourire s’était dessiné sur ses lèvres. Pareille à une enfant soulagée que tout ceci ne fût qu’un mauvais rêve. Le froid palpait la moindre parcelle de peau dénudée à sa portée. Horrifiée et légèrement honteuse, elle replaça sa flasque et reprit sa marche en courant presque.
Elle atteignit enfin les rues ponctuées de lumières blanches, mais ne les regarda pas en face, poursuivant son chemin. Puis, elle tourna vers la rue sorcière, croisant quelques passants qui la lorgnèrent d’un air ahuri comme elle était habillée en reine égyptienne, son voile d’or à sa suite.
Finalement, elle atteignit la maison blanche. Une monstrueuse bâtisse qui semblait abandonnée, avec ses volets bâillant, sortant de leurs gonds. Le porche, et les colonnes le soutenant, envahis par la friche. La cour était semée de rocailles et de touffes d’herbe éparses. Un sortilège scellait le haut portail d’entrée, noir et rouillé. Edelweiss murmura le mot de passe, et il s’entrouvrit dans un grincement plaintif. Une fois passé le seuil, il claqua derrière elle avec agacement. Et sous le voile du sortilège, la maison se dressait, majestueuse et impeccable. Toutefois, elle restait sombre et stoïque car la fête se déroulait dans le jardin, sous une tente illuminée. Un fond sonore de rires et verres trinqués augurait déjà quelque nuit brumeuse et mouvementée pour certains.
Edelweiss avança sur les graviers d’un blanc irradiant dans l’obscurité. Elle n’avait pas officiellement été invitée. C’était un ami à elle, qui, connaissant son penchant pour les fêtes costumées, l’avait enjointe à venir à celle-ci. Le mot de passe transmis, elle n’avait pas hésité une seconde. Aucune occasion n’était trop belle pour échapper à la solitude de la nuit. Ce tête-à-tête avec soi-même. L’herbe humide et froide remplaça le gravier sous ses pieds, et recommença à lui lacérer les chevilles.
C’est la mort qui te caresse les pieds…
Son souffle était court, mais enfin elle atteignit la tente entrouverte ; et la lumière tomba sur son visage blême. Sur tout son corps, sa peau se mit à scintiller comme de sous un voile pailleté. Car il était enduit d’une huile dorée, parant son teint livide. Ce soir, elle voulait être une reine. Une reine ne se souciant que de plaisir. Quelqu’un de respectable, pour cette fois. Son cœur fut enveloppé d’un soulagement sans borne, et sans un regard en arrière, elle libéra ses pieds des entraves de l’herbe morte. Et, chatoyante sous les lumières, elle entra sous la vaste tente troublée par les ombres dansantes.
I've found your skin in the dark... Edelweiss Blackmoth & Cleora S. Hailey
Avec une petite exclamation satisfaite, j'attrapais la robe maintenant finie et la levai devant moi pour en admirer le résultat. Elle était tout simplement parfaite, exactement comme je l'avais imaginée. J'y avais passé un temps infini en-dehors de mes heures de travail et j'avais bien failli ne pas être dans les temps. Il ne me restait qu'une heure pour me préparer et rejoindre le lieu des festivités. Ce n'était pas le moment de traîner.
Quand ma patronne avait reçu l'invitation pour cette fête costumée, elle m'avait aussitôt demandé si je voulais l'y accompagner. Je n'avais pas hésité bien longtemps. Même si cela faisait presque un an que j'avais retrouvé le monde magique, je n'y connaissais pas grand monde et cela ne me ferait pas de mal de voir de nouvelles têtes. Avec un peu de chance, je pouvais aussi y trouver de nouveaux clients. C'était la raison pour laquelle ma robe se devait d'être exceptionnelle. Il n'y avait pas de thème pour les tenues, aussi avais-je carte blanche. Mon imagination s'était chargée du reste.
Une bonne demi-heure plus tard, je serpentais dans les rues de Londres sous les regards étonnés des passants encore dehors. Le temps n'était pas des plus chauds en ce début de mois de mars et j'étais bien heureuse d'avoir pensé à ajouter un châle à ma tenue. Je me hâtais tout de même pour arriver le plus rapidement possible à destination. Il ne me fallut pas longtemps pour atteindre l'entrée de la rue sorcière, jetant un regard autour de moi avant de traverser le mur qui en barrait l'accès aux Moldus. La bâtisse où se tenait le bal était non loin de là, elle aussi protégée par un charme qui la faisait apparaître telle une ruine où il aurait été imprudent de s'aventurer. Mais une fois le mot de passe susurré et les grilles ouvertes, la villa prenait de suite un aspect plus imposant, quoi que toujours inhabitée. C'était dans le jardin que se tenaient un immense chapiteau pour tous nous accueillir. Je m'y pressais et entrais dans la chaleur magique qui y régnait en soupirant d'aise. Un parquet acajou avait laissé place à l'herbe froide du dehors, et les quelques gouttes de rosée qui s'étaient posées sur mes pieds disparurent en un rien de temps.
Du regard, je cherchais ma patronne et la trouvais près du buffet, en pleine discussion. Je m'approchais d'elle et en profitais pour saisir une coupe de champagne. Quand elle m'aperçut, elle s'arrêta net pour admirer ma tenue.
« Cleora, regarde-toi ! Tu es magnifique ma chérie. »
Je ne retins par un sourire satisfait et tournais même sur moi-même pour lui montrer l'ampleur de mon travail. J'en étais fière. Bien cintrée autour de ma taille, la robe était d'un vert satiné et se drapait autour de mon buste jusqu'à mes genoux. En guise de manches, de petits cristaux parsemaient la peau de mes épaules et du haut de mes bras. Cristaux que l'on retrouvait également sur le tissu, dans des spirales désordonnées et majestueuses. Ils remontaient le long de mon cou et agrémentaient une partie de mon visage en un maquillage artistique. J'avais tressé quelques mèches à l'avant de mes cheveux pour former une couronne qui se finissait à l'arrière de mon crâne. Une tulle d'un vert quasi-translucide partait de mes épaules et s'accrochait à quelques bagues pour flotter jusqu'au sol. Seuls mes escarpins restaient plus simples puisqu'ils étaient la seule chose que je n'avais pas créé.
Je discutais un peu avec ma patronne avant de me laisser porter par la foule, rencontrant de nouvelles personnes et mangeant quelques amuses gueules au passage. Peu de ces gens étaient réellement intéressants à vrai dire, et je commençais à m'ennuyer. Puis un éclat doré attira mon regard près de l'entrée du chapiteau. Une magnifique robe venait de faire son entrée, j'étais complètement subjuguée par le talent de la personne qui avait dû la créer. Quant à celle qui la portait, elle faisait honneur à sa tenue, il n'y avait pas de doute. Les deux s'harmonisaient à la perfection.
Saisissant deux coupes de champagne d'un plateau qui passait devant moi, je m'avançais, tout sourire, vers la nouvelle venue.
« Bonsoir, vous voulez une coupe ? », proposais-je aimablement.
Il fallait à tout prix que je sache où elle avait eu cette robe !
Code by Silver Lungs
Spoiler:
Désolée, c'est pas terrible et j'ai repris tes codes aussi pour que ce soit plus joli !
I've found your skin in the dark... [Flashback ~ Cleora]