Je ne me laisse pas atteindre. Jamais. Avec les années, je me suis créé une véritable armure et personne ne passe à travers. Pourtant cette fois j'ai été touchée. Ébranlée même. “ Sang de bourbe. ” Ces mots tournent dans ma tête, encore et encore, comme un disque rayé repasse un même passage sans jamais s'en lasser. Mais si ce n'était que ça. “ Tu t'es vue ? Tu n'appartiens pas à ce monde. ” Je sais. “ Tu fais honte à la magie. ” Je sais. “ Les gens de ton espèce ne devraient pas exister. ” Je le sais aussi. Mais à quoi est-ce que j'appartiens, hein ? Pas à la vie à laquelle ma mère m'avait préparée non plus. Je n'ai que ces deux choix et malgré ça, aucun ne me va.
Mes doigts se crispent sur le livre que je tiens fermement contre moi. C'est ça ou je me met à pleurer, alors ma fierté m'ordonne plutôt d'enfoncer mes ongles dans cette pauvre reliure en cuir. Il ne m'intéresse même pas, ce bouquin. Je l'avais ramassé par terre et m'apprêtais à le ranger avant d'être interrompu par ce maudit Serdaigle. Je l'avais gardé comme un bouclier. Plus il m'insultait et plus je le rapprochais de ma poitrine, comme s'il pouvait protéger mon cœur. Je ne connais pas le titre, ni même le sujet de ce livre mais en moins d'un quart d'heure il est devenu mon allié.
Mes pas me guident sans que j'y réfléchisse. Je sais déjà où je vais, et qui je vais retrouver. Il est tard, les cours sont finis depuis un bon moment déjà mais je sais qu'il ne me mettra pas à la porte. J'ai confiance en lui. Presque. Je traverse les couloirs en espérant avoir raison. Rapidement, le vent glacial qui me mord m'apprend que je suis sortie de Poudlard. Mes yeux ▬ et ma tête ▬ sont bien trop embrumés pour me communiquer ce genre d'informations.
Quelques minutes plus tard, j'aperçoit The Rolling Scones et souri du jeu de mot. J'entonne Gimme Shelter en me dirigeant vers la porte de derrière, réalisant amèrement l'ironie de ce choix de chanson. J'entre et me tais, saisie par le manque de clarté de la pièce. Il me faut un moment pour m'habituer à l'obscurité et après quelques pas, je devine la lumière de la cuisine encore allumée. Un poids s'ôte de mon coeur. Dans quelques minutes, je serais assise devant le plan de travail de Lucas et je l'écouterais me raconter sa vie en piquant dans ses nouveaux tests de gâteaux. Je presse le pas et entre en trombe dans mon refuge. L'état de la pièce me stoppe net. Les plans de travail sont vides et propres et surtout, personne en vue. Mes sourcils se froncent d'eux-mêmes.
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Mer 5 Aoû - 3:09
