Autant pour l'entraînement de Quidditch, autant pour les révisions avec Benedict, tous ces projets étaient successivement tombés à l'eau. Apparemment, Ben s'était débrouillé pour faire la connaissance du prof entre le cours de DFCM et celui d'étude des moldus et il avait été question d'un sort... Enfin bref. Toujours était-il que Christopher était resté après le cours d'étude sur les moldus afin de filer un coup de main au prof et à Benedict. Après ça, alors que Christopher ramassait son sac et le passait contre son épaule pour suivre Benedict qui sortait de la salle, Sebastian lui fit signe de rester. Il reposa donc immédiatement son sac, croisant le regard un peu interrogateur de Ben, à qui il répondit par un signe qui signifiait que c'était bon. Benedict eut l'air d'hésiter un peu, puis après avoir ramassé ses affaires, il salua poliment Sebastian et déclara à l'intention de Chris :
« Bon ben on se voit juste après ? »
Le Poufsouffle fit un sourire et hocha affirmativement de la tête, obervant Benedict sortir de la salle de classe – c'est vrai il aurait pu se faire attaquer sur le chemin on savait jamais – puis reporta le regard sur le prof. Il avait bien veillé, tout du long du cours et ensuite de l'aparté, de ne pas trop laisser traîner son regard dessus ; il ne pensait qu'il y ait de legilimens dans ce cours-là, mais il n'était pas sûr non plus qu'il y ait besoin de légilimancie pour aviser son air... étrange, au mieux. Il fit un sourire un rien fatigué à Sebastian, le poids de son (sur)entraînement de Quidditch du week-end lui pesant plus fort sur les épaules à mesure que la fin de journée approchait. Il opta pour une conversation mondaine et qui ne porterait pas à conséquence, s'appuyant sur un bureau – celui d'un Serdaigle studieux mais un peu distrait, qui avait foutu plein de taches d'encre partout.
« ça s'est bien passé, les cours ? »
Et les yeux fauves du batteur, maintenant qu'ils étaient seuls, descendirent sans faire exprès – si si sans faire exprès – sur les lèvres bien dessinées de Seb ; ok mauvaise idée. Il prit une vague coloration qui n'était pas encore tout à fait un rougissement, passa la main dans sa nuque.
« Tu voulais me dire quelque chose ? »
Ah au moins ne restait-il pas bloqué sur le vouvoiement qui avait cours entre un prof et son élève, c'était déjà un progrès.
Sebastian avait hésité pendant un moment, durant le cours particulier, à le faire rester. Mais en le voyant prêt à déguerpir, ça avait été plus fort que lui. Trop tentant peut-être. Ce goût du risque, à l’idée que, quiconque rentrerait, s’interroge sur la nature de leur conversation. Il l’avait fait rester. Ce mec était tellement déconcertant qu’il se sentait obligé de le retenir. C’était comme un aimant. Plus fort que lui. Pour éviter d’avoir l’air du dernier des pervers en se jetant sur lui dès que son pote O’Carley était parti, il s’assit sur son bureau, en tailleur. Brigitte regarda les deux se faire face, depuis le bureau, avant d’en descendre pour monter sur la table de Carmichael, reniflant l’élève.
Va faire le guet plutôt.
Brigitte prit un air très concerné. On aurait pu jurer qu’elle avait fait un garde à vous avant de se glisser sous la porte.
Non. Enfin si. J’voulais savoir si ça allait. Tu as une petite mine. Déjà ce matin tu avais l’air contrarié alors… Je voulais m’excuser si je t’avais mis mal à l’aise avec tes amis. C’est tout.
Il fit une pause. Avait-il capté le regard de Chris ? Bonne question. En tout cas, lui se faisait violence pour ne pas lui forcer la main. C’était idiot, complètement irresponsable et complètement non professionnel. C’était fou quand même d’en arriver à un crush à ce point-là. Mais il devait bien admettre que le goût de l’interdit rendait cette attraction encore plus puissante. Tout comme le comportement un rien trop distant de Chris. Il aurait pu lui mettre un vent direct. Par exemple en se cassant de la salle. Il n’aurait rien pu dire. Il n’avait aucun motif valable de le retenir. Ou alors jouer de la proximité. Mais non. Il faisant son mystérieux et son distant. Et puis cet air fatigué. Et cette complicité avec ce Benedict. Qui lui était très sympathique au demeurant, et très charmant aussi, il ne fallait pas s’y tromper. Mais ça réveillait l’ombre d’une jalousie ou d’une possessivité. Quand il l’avait embrassé, il avait eu l’impression d’être le premier mec à le faire. C’était terriblement excitant et aussi inquiétant. Et Sebastian se demandait quelle était la nature de la relation entre les deux élèves. Peut-être parce que lui-même avait eu ce genre de relation équivoque à l’époque.
Mes cours se sont bien passés. Les 5è années devraient parvenir à cuisiner d’eux même d’ici vingt à trente ans, sans aide magique. Que demander de plus ?
L’ironie dans sa voix était mordante.
Et sinon, tu en as pensé quoi de mon cours ? Les transports moldus, c’était un truc déjà vu ?
Sebastian doutait vraiment que les élèves soient jamais monté dans un bus moldu. Et encore moins une voiture moldue puisqu’ils s’étaient entêté à tous vouloir rentrer dedans en même temps. Du moins tous ceux qui n’avaient jamais été en contact avec le monde Moldu. Vivement le prochain cours. Il avait convaincu Dumbledore de faire venir un avion, un hélicoptère, ainsi qu’un paquebot qui allait venir sur le Lac. Pour le train, ça avait été rapide, puisqu’ils prenaient tous le Poudlard Express et que ça ressemblait furieusement aux trains moldus. Quant au métro, ça nécessiterait un cours complet, rien que pour apprendre à s’orienter. D’ailleurs, en examen final, il envisageait sérieusement une course d’orientation dans le métro londonien. Comment rejoindre Westminster depuis Saint Pancras après avoir été à Marble Arch ou Canary Warf. Ça pourrait être drôle – ou catastrophique, ce qui revenait au même selon Sebastian.
Chris écarta la main de sa cuisse pour gratter la tête de la mangouste – décidément l'affection était réciproque – mais il fut interrompu par un ordre du prof, et la bestiole partit comme une flèche en direction du couloir. Ah. Les yeux fauves du batteur glissèrent sous ses paupières jusqu'à Sebastian, semblant le jauger du regard le plus sérieusement du monde. La vérité c'était qu'il ne savait absolument pas quoi foutre de cette attirance que l'ancien Serdaigle semblait éprouver pour lui. Ça restait un mystère à ses yeux – quoique c'était au moins un peu réciproque – mais il n'avait aucune idée de comment on agissait dans ce genre de circonstances. Et pour le coup c'était pas le genre de situation où il allait demander des avis à droite et à gauche – déjà que c'était pas tellement le style de la maison en temps normal... Il soupira, passa la main dans ses cheveux – avec le résultat qu'on imagine assez.
« C'pas ça j'suis surtout fatigué du week-end. »
Le week-end c'est fait pour se reposer ? Ah ouais ? Bah jamais entendu parler.
« Puis c'matin c'est juste que... j'sais pas quoi faire de tout ça. Bon puis un prof à la table des élèves c'était totalement inattendu, mais ça à la limite... »
Il haussa des épaules. Si Christopher n'avait aucune espèce d'envie qu'on apprenne que son prof d'études des moldus le draguait, il n'en était pas pour autant arriver à un stade de paranoïa où il pensait que ça allait être découvert en claquant des doigts. Chris n'était fort heureusement pas très paranoïaque comme garçon. Il avait bien des défauts – dont un racisme passif agressif pas piqué des hannetons et une grande gueule pathologique – mais la paranoïa n'en faisait pas encore parti. Quoique du coup peut-être qu'avec Seb ça allait se révéler, comme d'autres choses – wink wink.
Il eut un léger sourire à l'évocation des 5ème année, haussant vaguement des épaules et décidant de démontrer que oui, les écossais ont de l'humour quand ils le veulent bien.
« Oh, s'tu d'mandes à ma mère c't'à peu près le délai pour un être de sexe masculin... pour un prof nouvellement arrivé c'pas si mal. Elle pourrait même estimer qu't'es bon à marier. »
Bon pas à une écossaise fallait pas déconner, et son honorable mère se serait probablement étranglée en apprenant les penchants peu conformistes de l'allemand, mais enfin. Il présentait bien, n'était qu'à moitié issu du sang de l'ennemi – on a peine à imaginer combien il est difficile d'éviter de se marier avec des anglais quand on habite au Royaume-Uni –, alors si en plus il savait apprendre à cuisiner aux gens... Chris eut un petit sourire en imaginant la tête de sa mère, puis hocha de la tête tout en appuyant ses paumes sur le bureau, son corps longiligne se détendant à mesure que le temps passait.
« Ouais, on l'avait jamais vu. C'tait franchement drôle, j'dois dire. Pas une grande découverte pour moi mais bon, j'pris c't'option pour être sûr de décrocher au moins une épreuve aux ASPIC. Les autres ont beaucoup aimé, c'tait beaucoup plus sympa que les cours théoriques sur l'habillement moldu, la morale moldue et tous ces trucs à la c... noix. »
Inutile de dire que le précédent prof d'études des moldus n'avait pas été un des plus chauds fans de Christopher, qui passait son cours à ressembler à Benedict à coups de « non mais c'pas tout à fait vrai », « nah mais c'est sorti du contexte » et autres récriminations incessantes. Il fit un sourire à Sebastian, engageant quoique pas toujours suuuuuper à l'aise.
« T'as vraiment des intentions indignes pour envoyer ta mangouste faire le guet ? »
Au grand max, ça pouvait être compris comme un encouragement. En tout cas c'était clairement pas un stop.
Fatigué du Week end ? Hummm… Un truc en lien avec Benedict ? Ouh c’était vilain cette crise de jalousie. Sebastian chassa cette sensation horriblement désagréable bien loin de lui, même si une brise de contrariété avait eu le temps de souffler sur ses traits. C’était plus fort que lui visiblement. Et il ne savait absolument pas comment réagir à tout ça.
« quoi faire de tout ça ». Il parlait de quoi au juste ? De lui ? Du Quidditch ? De son week end ? En tout cas, il semblait avoir une part de responsabilité dans le malaise de Chris. D’un air penaud, Sebastian s’en excusa.
Je suis désolé. J’ai beau avoir étudié à Poudlard… J’viens d’enseigner quelques mois dans une école pour jeunes sorciers à Berlin. Et c’est beaucoup moins formel là bas. Un prof qui mange avec ses élèves, c’est normal. Ça tisse des relations de confiance, tu comprends.
Il fixait le sol en disant ça. Mais Seb les releva pour fixer de ses yeux bleus son élève. Ouai. C’était ça. Il avait envie qu’il lui fasse confiance. Et besoin aussi. Ça serait bien compliqué de savoir ce qui pourrait se passer entre eux si Chris ne lui faisait pas un tant soit peu confiance. Comme le jeune homme avait visiblement besoin qu’on lui énonce clairement les choses – parfois plusieurs fois de suite, sans vouloir sous entendre qu'il était un peu bas de plafond ou que les cognards avaient déjà accomplis le but de leur existence sur Chris – pour qu’il comprenne, le prof le lui dit :
Du coup, j’ai fait ça pour… ça quoi. Qu’tu me fasses confiance. Pas… Que… Tu me prennes pour un vieux pervers ou un truc du genre. J’veux dire. J’passe pas ma vie à embrasser des élèves.
Encore que là, à vrai dire, il pourrait. Spontanément, ses yeux se portèrent sur les lèvres de Chris. Il poussa un petit soupir, peut être nostalgique, peut être frustré. Allez savoir.
Ta mère me trouverait bon à marier ? Vraiment ? Sebastian eut un sourire moqueur. Et un clin d'oeil. Pour faire bonne mesure et en toute innocence ! (joke !)
C’est une proposition ou quoi ?
Il se mit à rire, regardant ses pieds pour laisser à Christopher l’occasion de rougir sans lui montrer qu’il le voyait. Ça serait déjà bien assez gênant comme ça pour lui.
Je plaisante hein.
Il le laissa parler du cours. Ben tiens donc. Ça leur permettrait à tous les deux de se ressaisir. A Chris d’arrêter de rougir. Lui d’arrêter de penser aux choses pas du tout éthiques qu’il comptait bien lui faire s’il lui en laissait l’opportunité.
Quand Chris osa lui poser LA question qui semblait les perturber tous les deux, Sebastian eut un rire, chantonnant vaguement. Puis il cessa, pour reprendre son sérieux.
J’voulais surtout pas la traumatiser avec mes techniques de drague bien lourdes. C’est un petit animal subtil et fragile. Plus sérieusement, je ne voulais pas que, si quelqu’un vienne à entrer, tu sois mal à l’aise. Brigitte sent les gens venir plutôt bien. Donc tu pourrais filer si tu veux, sans que ça se sache.
Le cœur de Sebastian battait quand même dangereusement la chamade. Franchement. C’était un peu, même beaucoup de la provoc’ non ? Il sentait une espèce d’invitation sans en avoir le nom. Il se mordit les lèvres et ses mains s’aggripèrent à son bureau pour éviter de donner raison à Chris. Pas tout de suite en tout cas.
à vrai dire, j’avais des intentions tout à fait… Sportives. J’sais pas si je t’ai dit mais ma mère est journaliste. Et elle travaille dans un journal pour les familles Moldues qui ont un lien avec les Sorciers. Des parents, ou alors des cracmols en manque de monde magique. Ce journal fait un peu office de passerelles entre les deux mondes. Et comme elle est pote avec plein de journalistes… J’ai ça :
Sebastian sortit de son cahier qui trainait sur son bureau deux tickets.
J’ai deux places pour Celtic contre Dundee pour les demies finales. Tribune d’honneur. Ce samedi. Je me demandais si ça te plairait de venir.
Genre. Comme s’il allait dire non. Ne serait ce que pour le match. Et en vrai, il avait contacté sa mère, s’était roulé par terre devant la cheminée en jurant que oui, le foot écossais était trop bien et qu’il irait avec un collègue. UN COLLEGUE. Il en était à mentir à sa mère pour voir Christopher. C’était pathétique. Mais dans un lieu moldu, peut être qu’il serait détendu ?!
Maintenant, si tu préfères que j’ais des intentons malhonnêtes, c’est tout à fait négociable. T'as le choix. Tu peux même avoir les deux si tu préfères.
Et hop. Comment ruiner tant de subtilité en une malheureuse phrase. En même temps… Jouer avec le feu… on en parle ?
Ah. Il testait pas ses formidables capacités de regard en coin et de sous-entendus sur tout le monde ? Voilà qui faisait un petit peu plaisir à Chris d'entendre, sans qu'il ne se l'avoue clairement. Sans qu'il ne se le cache complètement non plus, d'ailleurs.
« Je pensais pas ça même sans le petit-déjeuner. »
En fait, il n'avait pas pensé à grand-chose entretemps. Essayé de ne pas penser à grand-chose pour être honnête. Ça n'avait pas été une franche réussite... Il eut un petit rire au commentaire sur sa mère et s'il rougit effectivement à l'évocation de la proposition, il secoua également la tête d'un air amusé. Oui, amusé. Imaginer sa mère trouvant que l'allemand ferait un bon parti était assez drôle. Quoiqu'elle trouverait sûrement ; pour une de ses filles cadettes. Et là d'un coup c'était moins drôle. Les écossais étaient fort peu partageurs de leurs affaires, et si Christopher n'était pas tout à fait certain que Sebastian fasse partie de ses affaires de façon définitive et établie, il était au moins certain que ça ne le ferait que très moyennement rire qu'il se marie avec une de ses sœurs. Heureusement, y'avait le temps, il n'y en avait qu'une qui était majeure et depuis fort peu de temps, le danger était écarté. Il reprit une coloration de peau normale non sans avoir noté que Seb avait détourné les yeux, ce dont il lui sut gré silencieusement.
« Yep, elle penserait probablement ça. Un type qui sait faire à manger et organiser son emploi du temps tout seul ? Elle a jamais connu ça. Mon père était p'têt le chef du clan mais c'était aussi un type complètement assisté. »
Chris parlait avec pas mal de naturel de son père au passé ; il fallait dire que le brave homme avait trépassé il y avait de ça quelques années. Avant ça, leurs relations avaient été un peu bizarres, surtout depuis qu'il s'était avéré que son seul hériter masculin avait eu la drôle d'idée d'être un sorcier. Ils n'avaient juste pas eu le temps de régler ça avant la mort du paternel. Chris tourna légèrement la tête vers la porte où avait disparu Brigitte. Il trouvait relativement mignon que l'allemand préserve sa bestiole – là où lui devait lutter tous les jours pour ne pas tuer son chat. Non ok il ne l'aurait jamais tué mais cette sale bête ne lui rendait aucune affection, sauf quand il avait vraiment faim... Franchement, c'était injuste. Quand Sebastian sortit les billets de son cahier comme un magicien sortirait un lapin de son chapeau, Chris parut tout d'abord parfaitement figé – et c'était inquiétant – puis choqué – ça l'était moins.
« Des billets ? Pour les Celtics contre Dundee ? »
Comment dire « oui je le veux » sans que ça porte à confusion totale ? Est-ce que c'était un rencard ? Même si ça l'était, est-ce que c'était vraiment dérangeant ? Un sorcier qui aimait le foot hormis lui, ça existait donc vraiment ? Il pouvait le garder dans sa poche pour l'éternité ?
Les yeux fauves de Chris se mirent à briller comme si quelqu'un y avait allumé un feu de bengale – ce qui est strictement impossible et même fort dangereux – et il eut un grand sourire, ravi. Absolument ravi :
« Oh ouais ! »
Il rit légèrement à la précision de Sebastian sur ses intentions qui ne seraient pas tout à fait honnêtes... à sa propre appréciation apparemment. Oh, évidemment, il rougit légèrement parce que c'était toujours aussi bizarre comme situation. Chris n'avait aucune espèce d'idée avant le week-end qu'il puisse plaire à des mecs, et surtout, que la réciproque soit vraie. C'était toujours aussi déstabilisant et... un peu plaisant, de manière assez obscure.
Sebastian réalisa qu’il fixait Christopher avec une once d’angoisse, une pincée de stress et le soupçon d’un espoir. Le cocktail explosif qui finissait par vous causer un AVC à 40 balais. Il avait l’impression d’être en apnée. Bon, en fait, pour être tout à fait juste, il était réellement en apnée. Un match de foot. C’était innocent. Viril. Un truc entre potes. Ça ne prêtait pas à confusion. Ok. C’était terriblement hypocrite. Bien sûr qu’il ne voulait pas d’un truc entre potes. Sinon il aurait eu 20 billets, aurait rameuté ses potes de l’époque où il était étudiant à Poudlard, il aurait disparu du vendredi soir au lundi matin, réapparaissant avec une tête préfigurant la mode des zombies. Au lieu de ça, non. Il se prévoyait un truc simple. Un match à deux. Un repas. Genre un fish’n chips. Pas plus. On allait pas faire dans le gastronomique non plus. Et après… après… Après son cerveau bugguait. Une espèce de black out de la pensée. Comme si, au-delà était impossible, dangereux ou impliquait trop de choses qu’il ne se sentait pas prêt à vivre et/ou assumer. C’était tout à fait chiant d’en être à ce point pour un mec qu’il voyait pour la troisième fois de sa vie.
Le problème, c’était la réaction de Chris. Cette joie. Cette flamme dans le regard. C’était juste… un putain d’appel du pied selon le cerveau de Seb. Et inutile de vous dire où pouvait bien commencer à se situer son cerveau en cet instant, en découvrant un sourire comme celui là. Sebastian se bouffa un méchant uppercut au creux du ventre. Il déglutit avec un peu de peine et eut un sourire un rien trop discret et timide. Il avait peur que Chris en fasse trop. Mais non. Ça semblait tellement sincère. C’était sincère ? Oui. Oui hein ? Ou alors c’était seulement pour le foot ?! L’allemand sembla confus un moment. Un moment qui sembla durer une éternité. Sa perdition était encore plus flagrante quand Christopher lui demanda si c’était un rencard. Merde, merde, merde. Oui ? Non ? Peut être ? Il allait lui répondre quoi au juste ? Les trois à la fois, c’était possible ?
Le prof s’écarta du bureau. Ce qui était, au final, profondément stupide, puisque ça le rapprochait de Chris. Il émit un grognement tout à fait mécontent à l’encontre de lui-même. Sebastian passa une main dans ses cheveux, hésita, bafouillant des sons incompréhensibles.
Puis, sur une inspiration profonde, comme un type qui allait faire un saut en parachute sans parachute, il se lança :
Seulement si tu veux. J’veux pas te forcer la main. Si t'es pas prêt ou simplement que vraiment tu veux pas...
Il avait dit ça en fixant ses pieds d’un air buté. Mais après une éternité, ou en tout cas une des minutes les plus longues de sa vie, (ou peut être trois secondes, il savait plus trop, le temps, c’était une notion vachement surfaite quand on négociait un rencard), il osa relever les yeux vers Chris, avec un air étonnamment craintif.
Tu sais ce dont j’ai envie hein.
Et au cas où ça n’aurait pas été complètement clair, ses yeux se portèrent, une fois encore, sur les lèvres de son élève. Son élève. Cette fois, s’il l’embrassait, il franchirait la ligne jaune. Ça deviendrait risqué. Sauf que ça lui plaisait encore plus du coup. Bien évidemment. Il ne disait pas "toi" mais la façon de le regarder ne laissait pas beaucoup de place pour autre chose. Alors il eut une espèce de petit sourire sans illusion. Ses yeux caressèrent les lèvres, passant à son cou. Et Sebastian, avant de le voir s’enfuir, préféra fermer les yeux.
Est-ce qu'il voulait ?... Sebastian avait l'air à des lieux de son comportement assuré et un rien fanfaron habituel. Il avait même l'air d'avoir mangé un cognard dans les côtes, de l'avis de ce pro du Quidditch qu'était Chris, et c'était... bizarrement plaisant. Il avait jamais trouvé autant de sentiment de hm... de juste plaire, lors de ses amourettes précédentes. Oh, si, il plaisait à ses copines, mais genre, moins qu'à l'allemand, pas au même degré. Il avait pas ce sentiment peut-être un peu tordu de puissance alors que Seb relevait un regard à l'expression indéfinissablement craintive sur lui, à laquelle il répondit automatiquement par un sourire solaire. Il n'avait aucune envie que Sebastian craigne ses réactions, même si lui-même n'était pas tout à fait au clair sur l'exacte bonne façon de répondre. Il savait ce que son clan lui dicterait de faire ; ne surtout pas s'engager là-dedans, cela allait sans dire. Il savait aussi ce que son tempérament aventureux et un peu tête brûlée le porterait à faire aussi ; bah si, faut essayer pour voir, non ?
Il essayait donc de se concentrer juste sur ce qu'il ressentait, et ça n'était pas évident. La vie en société n'était pas construite sur ce que l'on ressentait, or il y avait difficilement plus social que Christopher, qui avait vécu toute sa prime jeunesse entouré d'un clan aux membres innombrables et souvent envahissants, puis dans une école en internat. Son avis, bien qu'il compte, n'était pas souvent ce qui motivait sa décision. Très peu souvent, en fait. Un gars jouant aux sports d'équipe, quoi, à un poste de batteur, celui qui par excellence servait de soutien aux autres joueurs – et servait avantageusement de cauchemar pour l'équipe adverse.
Il se sentit rougir et chauffer au regard que lui lança Sebastian en énonçant ce que lui désirait, sans pour autant être trop clair – à son grand soulagement intérieur. Enfin, pas trop clair dans les paroles, le regard trop clair du teuton glissait un peu partout où l'uniforme de Chris permettait de glisser, et ça ravivait... des sensations qu'il avait tenté d'enterrer en frappant des cognards. Encore un truc qui avait superbement foiré manifestement.
Bon, qu'est-ce qu'il voulait ?... Il ne s'était pas reculé quand Sebastian s'était rapproché en s'éloignant du bureau, toujours appuyé sur celui du Serdaigle studieux-mais-distrait.
« Oui. »
L'avantage de cette réponse, c'était qu'il n'y avait aucun moyen de savoir si Chris répondait quant à savoir ce que Seb voulait, ou si oui c'était un rencard. Il parut s'en rendre compte, se redressa avec un nouveau sourire, le genre qui envoyait de suite dix mille watts de lumière dans la pièce, et qui réchauffait l'atmosphère au passage. Finalement il avait peut-être bien été réparti dans la bonne maison, y'avait bien qu'un Poufsouffle pour faire ce genre d'effet-là juste avec sa dentition, non ? Il parut se rendre compte qu'il n'était pas forcément très clair – les cognards n'avaient peut-être finalement pas fait tant de dégâts que ça.
« Oui j'veux bien qu'ça soit un rencard. Je n'sais pas si j'vais exactement savoir comment m'comporter, mais... »
Mais tu l'auras voulu. Parce que ça restait un écossais monté en graine qui était en train de se découvrir des penchants auxquels il n'aurait jamais pensé, parce que tout ça l'angoissait très franchement s'il prenait la peine d'y réfléchir plus de deux minutes, parce que c'était trop neuf pour ne pas être flippant. Mais c'était quand même vachement tentant. Il remua légèrement sur le bureau, hésitant entre sagement rester là où il était, ou s'approcher de Sebastian dans l'optique de euh... Dans l'optique de ?... Bah dans le doute, il bougeait pas de là où il était, hein.
Ce qu’il y avait de bien pour les gens qui croisaient Sebastian, c’est qu’ils savaient assez rapidement ce qu’il ressentait. A se demander parfois s’il avait vraiment un demi sang anglais tant il manquait de flegme. Le simple « oui » de Christopher avait fini par faire tomber cette barrière de stress. Il parlait, évidemment, forcément, du rencard. Ça ne pouvait absolument pas être autrement. Ça n’effleura même pas une seule seconde l’esprit de Sebastian. Oui. Comment un si petit mot, trois pauvres lettres, pouvaient éclairer un moment, une journée voire une vie. Bon d’accord, il s’emballait beaucoup trop. Mais la façon de réagir de Christopher était tellement… Tellement… mignonne ?
Sebastian avait rapidement compris qu’il préférait les garçons. Il avait 14 ans à l’époque de ce sombre italien. Et, après une amourette rapide, faite de baisers volés au coin des couloirs, il avait vite pris de l’assurance, passant carrément à de l’audace pure voire un toupet assumé. Ça lui avait valu pas mal de déboires mais de bien belles découvertes. Chris, lui, semblait hésiter. En même temps, à 20 ans, forcément, la révélation se faisait sur le tard. Ou alors simplement de la curiosité. Ou un ennui certain pour ce qu’il vivait dans l’instant. à Sebastian de botter en touche donc.
En tout cas, ce « oui », confirmé par un très clair « Oui j'veux bien qu'ça soit un rencard. » permit à Sebastian de reprendre pied. Et il renvoya dans les mêmes proportions un sourire éblouissant à son élève.
Cool.
Cool. Super. Donc quand Sebastian chopait un rencard, il passait de tombeur de ses messieurs à débile profond en un claquement de doigt. GG Seb. T’aurais eu ta place chez les Griffondors.
T’inquiètes pas. Y a une première fois à tout.
Il lui décocha un clin d’œil avec un regard un rien trop polisson avant de rire. Ça pouvait porter à confusion. Il pensait juste au rencard, pas à autre chose. Pas encore en tout cas. Il se gratta sa joue très mal rasée avec une petite hésitation, même si son sourire restait victorieux. La modestie, visiblement, il ne connaissait pas trop.
Au pire, on recommencera jusqu’à ce que ça soit parfait.
Il haussa les épaules.
Chuis Serdaigle après tout. J’continue jusqu’à maitriser mon sujet.
Maitriser son sujet. Well, well, well. Sebastian toussota. Non, franchement. Il allait finir par se couvrir de honte tout seul. Finalement, le plus simple était encore de fermer sa gueule et d’être plus convaincant. Alors ce fut assez simple, évidemment. Il franchit, comme tout bon vieux cliché de film à l’eau de rose, l’espace qui le séparait de Chris. Mais au lieu de l’embrasser de suite (héhéhé, non, bande de chenapans, vous allez attendre un peu), il continua à lui sourire, posant juste son index sous le menton du sportif, pour mettre leurs visages face à face. Il avait vraiment envie de profiter de cet instant.
Au diable le teint brique trop cuite, tant pis pour son cœur qui semblait vouloir se faire la malle par sa cage thoracique, battant à tout rompre au point qu’il avait l’impression qu’il allait avoir des côtes de cassées. Non. Ces lèvres-là, dont il rêvait depuis deux jours, qu’il avait déjà testé, goutté, éprouvé et surtout approuvé, se trouvaient tellement près. Il sentait le souffle, visiblement aussi chaotique que le sien, de Chris. Alors il s’avança, millimètre par millimètre, savourant autant qu’il le pouvait, ce qui allait venir. les yeux mi-clos, il sentit enfin son contact. Chaud. Moelleux. Doux et ferme à la fois. Sebastian s’autorisa à expirer, avec un tremblement dans son souffle. Progressivement, il se faisait plus pressant. Encore et encore. Il gagnait du terrain. Une de ses mains, perfide traitresse pourvue d’une volonté propre, se glissa sur la taille de l’élève, glissant doucement vers ses reins. L’autre se plaça, digne sœur de la première, sur la poitrine de Chris, remontant, plus possessive, sur le cou, la nuque, avant de s’accrocher aux cheveux du joueur de quidditch au moment où Sebastian intensifia son baiser, entrouvrant à peine la bouche pour laisser s’échapper sa langue, qui vint caresser avec une sorte de volonté maléfique, les lèvres de Chris. C’était Ali Baba devant la grotte. Sésame, ouvre toi !
Si la réaction corporelle de Sebastian était somme toute mignonne et assez plaisante à observer – c'était beau cette crainte chassée par la joie, non ? Si, sans déc. Tout ça grâce à lui ! Il avait jamais fait cet effet-là à personne, avant ! … les phrases elles, elles étaient moins mignonnes. Si Chris avait été quelqu'un de naturellement soupçonneux – ce qu'il n'était pas voyons il était tout prêt à croire l'humanité bonne... bah, si, il était Poufsouffle quand même ! –, il aurait même été jusqu'à penser que c'était fait exprès. Sûrement pas, vu la tête que tirait Sebastian à chaque fois. Christopher connaissait bien cette sensation, celle qui juste après avoir arrêté de parler pince la corde sensible de la raison : « oups j'aurais p'têt pas dû dire ça ». En tant que grande gueule limite pathologique, Chris avait beaucoup d'expérience de cette sensation-là. Il avait une fois tenté d'expliquer à Benedict qu'en fait, ça lui était juste impossible de réfléchir avant de parler. Ben s'était contenté de le dévisager avec un oeil vide, entre la vive inquiétude que le Poufsouffle soit apparemment incapable de réfléchir, et la résignation.
« Yep, j'vois ce que tu veux dire. 'fin à peu près. »
Histoire de rappeler que si Seb était lui, manifestement, un pro des relations entre mecs, Chris lui eh bien... Faisait figure de petit nouveau dans le milieu. Il inclina légèrement la tête sur le côté alors que l'allemand envahissait généreusement son espace vital, en poussant même le vice à lui glisser la main sous le cou. Il répondit à son sourire en ignorant la couleur de son teint – non vraiment c'était une plaie d'être blond, même blond foncé –, et ferma automatiquement les yeux quand l'allemand se mit enfin en tête de l'embrasser. Il avait les lèvres horriblement douces, la barbe qui piquait un peu – et ça c'était perturbant –, tout aussi perturbant que d'être coincé par le bureau et le corps de Sebastian. Les filles qu'il avait fréquentées ne dégageaient pas autant de chaleur à travers leurs fringues, c'était assez incroyable cette différence. Y'avait aucune explication logique qui lui venait à l'esprit.
Christopher eut même la gentillesse de desserrer les lèvres pour se laisser réellement embrasser, tout en se tortillant un petit peu sous les mains de Sebastian, assez peu habitué à ce genre de traitement. Ça n'était pas désagréable pour autant, juste peut-être un peu trop neuf pour lui. Il en prit quand même de la graine, ses propres mains remontant sur la taille de Sebastian sans trop savoir où se poser d'autre. Ok, sans déconner y'avait pas beaucoup plus perturbant que de passer de gonzesses à un mec, foi de Carmichael. Il n'était pas tout à fait certain de ne pas regretter, l'avenir le lui dirait – et Chris n'avait aucune espèce de confiance en l'avenir, qu'il considérait un peu comme son grand ennemi. Un peu de mal à être un vrai adulte, encore.
Il finit par se détacher du prof, essayant de mettre des mots, au moins mentaux, sur l'expérience. Ah non, peine perdue, son cerveau ne voulait pas. Le corps quant à lui, faisait savoir que pour ce qui était des sensations, c'était vraiment pas mal. Mais Chris aurait bien voulu mentaliser tout ça un petit peu plus, histoire d'être au moins certain de la bonne façon d'y penser. Mais pas aujourd'hui, apparemment. Il sourit de nouveau à Sebastian, de son sourire solaire et content – ça allait, il était pas choqué au point qu'il allait en mourir, il avait juste un peu de mal avec la nouveauté en général. Il avait mis pas mal de temps à s'adapter à être un sorcier aussi – et n'était pas encore tout à fait adapté vu ses nombreux réflexes typiquement moldusiens... réflexes qui fascinaient totalement Benedict et sa curiosité débridée. Ses doigts tapotaient un rythme aléatoire sur le flanc de Sebastian sans même qu'il ne s'en rende compte, tout en train de se demander ce qu'il était censé faire au juste maintenant. Il devait voir Benedict, au moins pour tenter de réviser un peu ou commencer ces foutus 50 centimètres de parchemin sur les rois-liches... A moins que ça ne soit les Inferis ? Bon comme d'habitude, il n'en avait pas envie. Pas comme d'habitude, peu-être bien pas seulement parce qu'il s'agissait de travail et que le Poufsouffle était apparemment allergique à cette notion.
« Faudrait ptêt que j'y aille. J'ai du boulot. »
« Mais j'veux pas y aller », telle aurait pu être la conclusion de sa phrase, alors qu'il embrassait de nouveau Seb dans ce qui était désormais sa marque de fabrique : le baiser d'au revoir.
Pffff. Il se reculait déjà. Sebastian ignorait combien de temps leur baiser avait duré, mais ça lui semblait infiniment trop court. Et beaucoup trop doux aussi. Parce que là, il avait envie d’un truc un rien plus fougueux et possessif, comme lui mordre la lèvre ou laisse la marque de ses dents au creux de son cou. C’était la débilité même à vrai dire. Et puis ça serait le meilleur moyen de le faire fuir. La délicieuse reddition de Christopher lui paraissait être une victoire propre à être fêtée dignement, même s’il y avait du chemin à faire pour concrétiser un peu plus tout ça. Mais, pour être tout à fait honnête, Sebastian lui-même ne se sentait pas prêt à dépasser le cap du bécotage intensif en fin de cours. Ceci dit, la chose était tout à fait plaisante et il recommencerait volontiers. C’était totalement puéril cette envie exacerbée qu’il avait. Le goût de l’interdit, de la nouveauté, le plaisir de lui faire découvrir un monde qu’il jugeait fabuleux. Le teint de Chris, sa façon de reculer et finalement d’accepter ce qui se passait. Bon, Seb aurait pu se faire la remarque d’une certaine passivité de la part du joueur de Quidditch. Mais il n’était pas idiot. Et il était évident qu’à son âge, s’il n’avait jamais connu de mec, c’est qu’il se croyait hétéro. Allez remettre ça en cause n’était sûrement pas facile à vivre. Mais, pour le coup, le prof était tout disposer à l’aider du mieux qu’il pouvait.
Sebastian retira sa main des cheveux de son élève, glissant ses doigts sur l’arête du menton. Ses yeux regardaient le contraste entre leurs peaux. Ce n’était pas très net mais quand même. Ses mains étaient abimées par dix années de vie de baroudeur. Contre les traits délicats de Chris, ça semblait encore plus visible.
Il lui rendit son sourire, son autre main, quant à elle, restait, légère comme un papillon, sur ses reins. Sebastian se décala, sans pour autant bouger sa main, avec l’habileté de quelqu’un qui avait l’expérience de ce genre de geste. Mais il se tortilla soudain, de plus en plus. Ce qui ne semblait être qu’un mouvement incontrôlé se fit de plus en plus brusque. La façon dont Christopher tapotait sur ses côtes finit par lui arracher un gloussement, puis un rire et il bougea réellement pour se décaler franchement.
Désolé. Je… Je suis assez chatouilleux en fait. Ça dépend des endroits.
Sans vouloir casser le charme, quand même, c’était très très con. Et dit comme ça, Sebastian eut la bonne idée de rougir violemment. Ça pouvait être franchement mal interprété. Mais son rire cessa, ses nerfs semblèrent même cesser de fonctionner. Il eut un air hébété pendant une demie seconde, comme si, d’un coup d’un seul, il s’était retrouvé avec Dumbledore devant lui au lieu de Chris.
Déjà ? D’accord. D’ACCORD ! La question était profondément débile. Mais il… il avait cru… Rien du tout d’ailleurs. Juste que comme tout se passait délicieusement bien, Sebastian n’avait pas imaginé qu’il allait filer si vite. En même temps, ils ne pouvaient pas passer la fin de la journée à se bécoter, dans une salle de cours un rien trop froide. Non. Si ? Non, ok, non.
Reste. Juste une minute.
Ou dix. Ou une heure. Ou une journée. Une vie ? C’était abusé ça. Mais franchement, sur un coup de folie, il aurait pu le lui balancer. Sebastian opta pour le sourire rassurant. Ce n’était pas une pauvre petite et innocente minute qui pourrait mettre Christopher en retard. Tiens… D’ailleurs.
Et puis je suis prof. Et j’ai eu toutes mes épreuves d’ASPIC avec au minimum Efforts Exceptionnels. J’ai surtout eu une majorité d’Optimal.
Sa voix vibrait de fierté. Clairement, chez les Serdaigle, les notations semblaient être une raison de vivre, de respirer, d’exister, d’être. Sans ça, le monde s’écroulerait sans doute.
Du coup… Tu pourrais réviser avec moi.
Rhaaaa. C’était plus fort que lui. Sa dernière phrase s’était perdue dans un murmure un rien aguicheur et provocant, alors le sourire de Seb s’élargissait et que ses yeux se perdaient une fois de plus sur la bouche et le coup du 7è année. Il se mordilla la lèvre.
Des cours particuliers. Avec paiement en nature. Hummmmm ?? Des trucs comme ça.
Sebastian se pencha avec lenteur, pour laisser le temps à Chris d’appréhender une fois encore l’invasion de son espace vital. Au lieu de chercher ses lèvres, il plongea dans son cou, posant ses lèvres, mordillant la peau avec un rire moqueur. Moqueur envers lui-même. Il avait posé ses deux mains à plat sur la table derrière Chris, le plaquant contre lui. Seb tremblait d’un coup d’un seul comme une feuille morte, sous l’effet de la boule de désir qui était en train de naitre au creux de son ventre. Avant que Chris ne réalise le problème, il s’écarta brusquement.
Mais sinon tu peux aussi bosser avec O’Carley. Il a l’air assez brillant lui aussi. Même s’il n’a pas encore ses ASPIC, LUI.
Mais qu'est-ce que ?... Pourquoi se tortillait-il comme ça, alors que ça sortait de nulle part ? Comment ça chatouilleux ? Chris regardait son prof avec ce qui ressemblait terriblement à l'incompréhension lal plus totale et le jet-lag de conversation le plus réussi depuis que Benedict s'était lancé dans une dissertation sur la différence entre le Yeti et le Big Foot. Et enfin, son cerveau voulut bien percuter que oui il était en train de pianoter du bout des doigts sur le flanc de Sebastian et que par voie de conséquence c'était probablement lui qui le chatouillait sans le vouloir. Ah, hum. Mais comment ça « ça dépend des endroits » ?! Evidemment, le teint de l'écossais se remit immédiatement à atteindre des nuances de rouge qui annonçaient soit une gêne extrême, soit une maladie génétique plutôt rare et inquiétante, et il se racla la gorge en renonçant à répondre à cette constatation. Et c'était alors qu'il tentait de sortir de sa gêne extrême et de reprendre pied que Seb attaqua en traître – si, il avait sûrement fait exprès – en lui demandant de rester encore un peu.
Est-ce qu'on peut dire non à un mec qui réussit aussi bien le regard de labrador ? Vous avez déjà regardé, non, sérieusement regardé un labrador qui veut quelque chose ? Cet animal diabolique est capable de concentrer toute la misère du monde dans ses deux prunelles. Du coup, vous vous sentez atrocement et coupable de lui refuser ce qu'il voulait. Bah Sebastian, c'était un peu pareil, il faisait le regard de labrador injustement privé, et Chris se retint de grimacer de honte de lui faire subir ça (alors que quand même il avait annoncé devoir réviser, ce qu'un prof normal aurait dû encourager). Il étira légèrement le cou pour laisser Sebastian y musarder, apparemment momentanément apprivoisé, et déclara un rien distraitement – on se demandait bien ce qui pouvait le distraire.
« En fait, je suis pas sûr que ça soit une bonne idée de mélanger le boulot et l'amusement... »
Ouais c'était un coup à se piquer un méga fard devant sa copie d'Histoire de la magie, parce qu'il n'avait pas franchement retenu les dates de la guerre des gobelins, et plutôt autre chose de plus sympa – genre, rouler des pelles à Sebastian. C'était pas non plus évident de réviser avec Ben – à deux ils avaient une capacité à se distraire qui tenait du surnaturel – mais bien des fois le côté Serdaigle sérieux de l'irlandais les avait sauvé de la débandade. Sur le coup, ça plaisait pas forcément à Chris, mais depuis quelques temps il envisageait d'offrir un truc qui plairait vraiment à son ami, parce qu'il était conscient que s'il avait réussi à ne pas redoubler eh bien... il le lui devait principalement. Il marquerait probablement le coup une fois leurs diplômes obtenus.
Chris eut un frisson un peu saisi quand Sebastian se plaqua brusquement contre lui et en le sentant trembler. Ah, il était revenu le sentiment de puissance ! Ouais, c'était lui qui faisait cet effet-là à l'allemand, et c'était toujours aussi bizarrement plaisant... Ses doigts se crispèrent dans la robe du prof, alors qu'il cherchait quelque chose à s'accrocher et une espèce de compréhension un peu vague de la situation fit qu'il ne protesta pas alors qu'il s'écartait brutalement. Il eut un sourire franchement flou, comme si ce petit intermède lui avait donné raison – et Christopher avait une grande passion dans la vie pour le fait d'avoir raison...
« Mmh, oui. Ça nous empêchera pas de nous voir, c'est juste qu'on travaillera pas. »
Oui euh, enfin, dit comme ça ? … Chris décida d'ignorer fermement tous les sous-entendus qu'il pourrait produire parce que ça ne s'arrêtait plus depuis quelques temps. Ce fut le moment que choisit Brigitte pour revenir de sa démarche bizarre et rigolote, poussant de petits cris. Comme s'il avait capté ce qu'elle voulait dire, le Poufsouffle se redressa du bureau où il était toujours appuyé, et posa un baiser ferme, voire assuré sur les lèvres de Seb.
« Là faut que j'y aille. »
Il remit de l'ordre dans son col, tenta d'en remettre dans ses cheveux – ce qui eh bien mena au même point que d'habitude : c'est à dire nulle part –, et sourit au prof avant de s'esquiver de la salle, saluant d'un signe de tête la personne qui entrait. Il poussa même le vice à faire un clin d'oeil à Sebastian dans le dos du gêneur. Christopher était un garçon... très joueur.
Mélange boulot et amusement ? Putain c’te douche froide. Gratos. Et avec glaçons. A côté, DiCaprio vient de faire une balade de santé dans les rivières glacées du grand nord. Et Sebastian fait une grimace assez affreuse. Franchement, c’est pas super diplomatique de balancer à la tronche de son prof qu’éventuellement, ce qu’il fait n’est pas très pro. Comme s’il ne le savait déjà pas assez.
Si je ne mélangeais pas boulot et… amusement… je ne pourrais pas t’embrasser. Ni te proposer un rencard.
Il était un rien vexé le bel allemand. Non c’était le pied cette situation mais après tout ce n’était que deux mois non ? Bon. Il n’allait pas se projeter sur une durée aussi longue quand même. Néanmoins, le fait qu’il soit capable de faire les deux leur permettait de… l’amusement.
Amusement ? Vraiment d’abord ? Aïe. Ça piquait. Il n’avait foutrement aucune idée d’où ils pouvaient bien aller. Ni même si ça survivrait à ce week-end. Mais il avait suffisamment de considération pour les êtres humains en général et surement Chris en particulier pour penser autrement qu’un divertissement le fait de lui faire changer de cap dans sa vie privée. Ce n’était pas la chose la plus évidente à vivre quand on le savait depuis toujours. Alors quand on avait 20 ans et qu’on le découvrait… non. Sebastian ne trouvait pas ce terme approprié.
Tu te sous-estimes tu sais ça ? Bon. D’accord. On ne travaillera pas. Ça me va. Sauf que du coup, ça donnait moins de prétextes pour se voir. Bon, du coup, il pourrait préparer des cours. En général, Seb avait dans l’idée d’avoir une tendance générale, deux trois notes et ensuite, de compléter par les questions des élèves. Il avait cette chance de soulever les curiosités suffisamment pour qu’il y a une pluie de questions pour meubler tout le cours. Surtout quand il y avait des Serdaigle. Bien sûr. Quelle belle Maison quand même. Huhuhu.
En tout cas, Sebastian sourit du sous-entendu et du malaise que ça faisait naitre chez Chris. Non pas qu’il se moque mais c’était mignon tout plein.
Ok. A… plus alors.
Bon, au moins il avait eu droit à un baiser. Du coup, quand une élève de … 5è année arriva tout sourire (et bien trop maquillée ! Bon sang, elle allait au cabaret ou quoi ?), il avait un sourire béat qui flottait sur son visage. Et la jeune fille, visiblement ravie de l’accueil, gloussa fortement.