La lâcheté, c'est un peu une seconde nature universelle. Plus nos sociétés s'organisent, plus on a peur de faire des choix. Alors on a éliminé le choix. Il nous reste le mot...
Assise à son bureau, Ebony observait l'emploi du temps des élèves et notamment des serpentards. Elle devait trouver une solution pour coincer Dawn Blackwood. Elle en avait assez de jouer au chat et à la souris avec elle. Elle avait donc choisi de prendre le taureau par les cornes et de venir la chercher en cours. Elle n'aimait pas vraiment lui courir après, la convoquer mais ne jamais la voir à l'infirmerie. Elle s’inquiétait pour elle. Et surtout, elle tenait à voir chaque élève qui avait été attaqué durant le marché nocturne. Elle voulait tout simplement s'assurer que tout allait bien, rien de plus. Enfin à l'origine. Dans le cas de l'héritière Blackwood, un élément s'était immiscé dans cette affaire déjà bien compliquée. Les parents de cette dernière semblaient inquiets pour leur fille et demandaient à ce que Ebony veille sur elle. Enfin veiller était un bien grand mot, tout autant que demander. Ils exigeaient plutôt qu'elle fasse son boulot. Même si elle n'aimait pas vraiment leur attitude à son égard, elle devait bien avouer qu'elle les comprenait. Quelque part leur requête était tout à fait légitime. C'est pourquoi elle se prenait tant la tête avec la jeune serpentard qui refusait catégoriquement ses soins. Pour tout dire, elle ne savait pas vraiment pourquoi. Peut être ne l'aimait-elle pas ? Elle tapota donc l'emploi du temps posé sur son bureau et jeta un œil à l'horloge qui trônait juste au dessus de la porte. « Alors, elle a deux heures de ... métamorphose. » Murmura t-elle avant de se lever. Elle posa sa main sur son front un instant, avant de réfléchir. Elle allait devoir se montrer ferme et compatissante. Elle se mordilla la lèvre inférieure. Ça ne devrait pas lui demander trop d'effort, pour la deuxième partie en tout cas. Sans plus attendre, elle traversa l'infirmerie tout en jetant un regard aux lits alignés. Il n'y avait personne, aucun blessé en vue. Tous les rendez vous étaient pris pour le week-end et la soirée. Ses patients finiraient pas s'empiler dans son antre seulement en fin de journée, pour le moment, elle avait largement le temps d'aller chercher la petite révoltée qui faisait des siennes. Ebony se demandait si quelque part Dawn ne serait pas un peu rebelle contrairement aux apparences qu'elle donnait. Jusque là, Ebony n'avait pas vraiment eu l'occasion de discuter avec cette dernière. Elle venait bien sûr à l'infirmerie à la suite de certains matchs, mais rien d'exceptionnel. En vérité, elle donnait plus de coups qu'elle en recevait, puisqu'elle tenait étrangement la place de batteuse. Pour tout dire, avec son gabarit, elle l'aurait vu plutôt à la place de poursuiveuse ou attrapeuse. Elle n'était pas vraiment taillée pour balancer des cognards. Mais Ebony avait appris à ne pas se fier entièrement aux airs et aux impressions. Il fallait toujours gratter la surface. Heureusement pour joindre la classe de sa collègue, Ebony n'avait qu'un étage à monter, rien d'extraordinaire. Elle arriva donc rapidement devant la porte. Elle entendait la voix de la sous directrice malgré les murs épais. Elle leva les yeux au ciel et et pensa aux mots qu'elle allait prononcer. Elle se doutait que la serpentard n'apprécierait pas son geste, mais tant pis pour elle. Elle l'avait plus ou moins cherché à force d'ignorer ses convocations.
Après une longue inspiration, elle toqua à la porte. Elle attendit seulement quelques secondes pour entendre un son qui ressemblait à un oui. Elle poussa donc aussitôt la porte et glissa la tête. « Bonjour, excusez moi de vous déranger. » Elle marqua une courte pause pour repérer l'adolescente. Elle était bien là. Satisfaite, elle n'allait pas rentrer bredouille à l'infirmerie. « Puis-je vous emprunter Miss Blackwood s'il vous plait ? » Son ton était poli et sans appel. Même si cette phrase sonnait comme une question, on entendait bien dans sa voix qu'elle ne comptait pas partir sans la dite Dawn. Zelena ne discuta pas, approuvant ceci sans trop poser de question. Et Dawn fut bien contrainte de la suivre. Bingo. Comme elle l'avait prévu, la jeune fille ne semblait pas des plus ravies. Ebony arqua un sourcil et referma la porte derrière elles. Elle regarda l'étudiante pendant un court instant avant de prendre la parole : « Ne faites donc pas cette tête, si vous étiez venue comme tous les autres élèves, je n'aurais pas été forcée de venir vous chercher en cours. » Autant lui annoncer la couleur. Elle lui adressa donc un sourire, comme pour adoucir ses propos. Elle enclencha donc la marche vers l'escalier. Elle se tenait à côté d'elle, mais à une distance tout à fait correcte d'elle. Elle ne voulait pas lui donner l'impression d'être omniprésente. Cependant, Ebony voulait continuer cette conversation. Peu importait si ça l'énervait. Elle voulait juste lui mettre les points sur les i et lui prouver qu'elle était la plus têtue des deux et ce largement. Si elle avait un défaut, c'était bien ça. « Toutefois, je comprends que tu ais d'autres hippogriffes à fouetter. Personnellement, je t'assure que j'aimerais éviter ce genre de situation, de ne pas avoir à poser des questions. Je souhaiterais me mêler de mes affaires. Pourtant, c'est mon travail et je dois le faire. Et toi... » Elle marqua une nouvelle fois une pause, la regardant droit dans les yeux. Elle s'abstenait de parler de ses parents et des quelques lettres qu'ils avaient pu lui envoyer. C'était le meilleur moyen de la braquer. « Et toi, tu me laisses pas le choix. Je suis tout simplement obligée de venir te chercher alors que tu aurais pu venir dés le premier jour. Cette histoire serait déjà terminée. De plus, si tu crois que je vais abandonner, tu te mets la baguette dans l’œil. » Comme tout le monde ou presque sur terre, elle détestait l'idée qu'on la prenne pour une idiote. La raison était toute simple, elle ne demandait pas la lune. Elle lui offrit un demi-sourire avant de reprendre la parole : « Maintenant que les choses sont dites, nous allons pouvoir parler tranquillement à l'infirmerie. » Elle n'était pas naïve non plus. Elle savait que sa franchise ne suffirait pas, mais c'était déjà un pas. De toute façon, Dawn avait intérêt à se montrer coopérative si elle ne voulait vraiment pas que cette discussion traîne en longueur.
C'était déjà la quatrième fois que Dawn recevait ce hibou. La quatrième fois en moins d'une semaine. Et le quatrième parchemin qui contenait inlassablement le même message, provenant toujours du même expéditeur. L'infirmière de Poudlard, Ebony Lancaster. La verte et argent ne pris même pas la peine de le lire en entier, de toute manière, elle en connaissait déjà le contenu. La sorcière lui demandait, avec plus ou moins de patience, de se présenter à l'infirmerie de l'école au plus vite afin qu'elles puissent faire le point sur son état physique suite à l'attaque de Pré-au-Lard. Tout en roulant en boule le morceau de papier pour le fourrer au fonds de son sac, elle se demanda si la sorcière ne se lasserait donc jamais de voir ses hiboux rester sans réponse. Elle semblait être particulièrement têtue pour une jeune femme aussi douce, mais Dawn l'était tout autant. Car comme pour les trois fois précédente, la Serpentarde n'avait pas la moindre intention de répondre à ce message, et encore moins de se rendre à l'infirmerie de l'école. L'infirmière avait beau être sympathique et pleine de bonne volonté, Dawn n'y était pas vraiment réceptive. Maintenant qu'elle était revenue au château et que la vie reprenait lentement son cours, elle en avait marre de se voir rappeler sans cesse l'agression qu'elle avait subie ce soir-là. Elle ne supportait pas l'image de victime que certains essayaient de lui donner. Les cicatrices qu'elle gardait des sorts du mangemort étaient déjà un rappel assez évident à ses yeux. Elle n'avait pas envie d'oublier, elle n'avait de toute manière pas de réel choix, mais elle voulait pouvoir passer à autre chose. Elle voulait pouvoir tirer des leçons de ce sinistre évènement pour s'assurer que plus jamais elle n'aurait à le revivre. Elle voulait oublier la vulnérabilité qui s'était imposée à elle alors qu'elle se tordait de douleur sous les sorts du mage noir, elle voulait être plus forte, plus féroce. Intouchable. C'était une question de survie, aussi bien physique que psychologique. Elle savait que l'inaction, l'acceptation de son sort ne la mèneraient qu'à sa perte. Et elle en avait été bien trop proche lors de l'attaque. Mais elle ignorait comment pouvait-elle y parvenir si ses camarades ne cessaient de murmurer sur son passage, la victimisant sans la moindre vergogne, comme si elle n'était qu'une simple silhouette et non pas un être humain. Dawn n'avait jamais été véritablement douée pour les relations humaines, trop froide, trop distante, trop méprisante pour tenter de se lier avec ces jeunes sorciers qui ne trouvaient jamais grâce à ses yeux. Elle se cachait derrière son masque, s'interdisait tout attachement et repoussait sans ménagement ceux qui tentaient de percer ses barrières sans y avoir été invités. Depuis son retour au château, son attitude était encore plus glaciale qu'auparavant, plus renfermée, mais aussi plus sauvage, elle n'acceptait la compagnie que de rares personnes triées sur le volet. Sienna Black en faisait bien évidemment partie, jamais elle ne pourrait se séparer de la Serpentarde à qui elle vouait une amitié et une affection profonde et sincères, certainement la seule qui lui importe vraiment -si l'on oubliait le cas compliqué que représentait sa relation avec Elwan. C'était donc en duo qu'elles s'étaient rendu à leur cours de métamorphose avec la professeur Von Staël. Étant le cours favori de Dawn, les heures s'entamèrent aisément, jusqu'à ce que des coups frappés à la porte l’interrompent. Le visage d'Ebony Lancaster apparu dans l'embrasure de la porte. « Bonjour, excusez-moi de vous déranger. » Dawn s'apprêtait à reporter son attention sur son grimoire lorsque son regard croisa celui de l'infirmière. Même avec les quelques mètres qui les séparaient, elle eut la désagréable conviction que c'était elle que la jeune femme cherchait. « Puis-je vous emprunter Miss Blackwood s'il vous plait ? » Aussitôt la verte et argent sentit son visage se crisper et son expression se faire plus dure. Une bouffée d'indignation monta en elle et elle serra les poings pour éviter de lâcher une remarque malheureuse qui, si elle lui permettrait clairement d'exprimer le fonds de sa pensée, lui vaudrait à coup sûr des heures de retenue. Il y eut un instant de flottement durant lequel elle chercha du regard le professeur Von Staël, espérant sans réellement y croire qu'elle refuserait la demande de l'infirmière. Mais le hochement de tête que son professeur adressa à Ebony acheva ses moindres espoirs. Prise au piège, Dawn dû se contraindre à la demande de la jeune femme. Lui lançant un regard mauvais, elle se leva brusquement en manquant de faire tomber sa chaise au sol et fourra ses affaires dans son sac sans le moindre ménagement. Elle adressa un signe de tête à Sienna et traversa la classe sous les regards de ses camarades. Sa tête était haute, mais son visage était fermé et ses prunelles ambrées lançaient des éclairs.
Elle se stoppa une fois sortie de la salle de cours, les lèvres pincées et les mains crispées sur la lanière de son sac, résistant tout juste à l’envie de s’engouffrer dans le passage secret le plus proche pour fausser compagnie à l’infirmière. Dawn n’avait jamais apprécié les ordres, mais elle se pliait avec plus ou moins de bonnes grâce à ceux de ses professeurs, conscientes qu’ils ne voulaient que s’assurer que ses études à Poudlard se terminent en un succès retentissant, mais là, Ebony ne lui laissait pas le moindre choix. Elle l’avait mise au pied du mur, sans la moindre possibilité de fuite. Pour espérer échapper à l’infirmière elle aurait dû donner des explications devant toute la classe. Expliquer pourquoi elle n’avait pas répondu aux hiboux de la sorcière, pourquoi elle portait toujours des plaies en cours de guérison. Et elle préférait embrasser un scrout-à-pétard plutôt que de devoir révéler tout cela devant ses camarades. Ils étaient trop friands de ce genre d’histoires, de tous les détails dont ils pourraient se servir par la suite pour la faire tomber. Elle ne leur ferait pas ce plaisir. Elle avait choisi de suivre Ebony, les poings serrés et les yeux embués d’une colère déjà bien vive. Consciente que l’infirmière l’observait, elle ne décrocha pas un mot. « Ne faites donc pas cette tête, si vous étiez venue comme tous les autres élèves, je n'aurais pas été forcée de venir vous chercher en cours. » La Serpentarde ne put se retenir plus longtemps de lever les yeux au ciel. Cette situation était une vaste blague et elle ne la supportait déjà plus. Ce n’était pas parce qu’elle n’avait pas répondu aux hiboux de l’infirmière qu’elle l’avait forcé à quoi que ce soit. Elle eut une expression dédaigneuse. Ebony et elle ne voyaient certainement pas les choses de la même manière. Dawn comprenait qu’elle veuille voir les élèves après l’attaque, c’était une entreprise louable de sa part, la Serpentarde voulait bien le reconnaitre. Mais elle ne comprenait pas son acharnement, elle ne l’acceptait pas. Elle ne voyait donc pas qu’en venant la chercher en plein milieu d’un cours, affichant l’attitude de la verte et argent à la vue de tous ses camarades, elle ne faisait que se la mettre à dos ? « Ne tentez pas de me faire croire que vous n'avez pas eu d'autre choix. » Finit-elle par lâcher d’un ton amer et mordant. Elle fulminait à présent et devait se rappeler qu’elle était face à un membre du corps enseignant et qu’elle devait surveiller son ton et ses paroles. Ebony n’était peut-être pas professeur, mais elle ne pouvait pas lui manquer de respect. Cependant, c’était une pensée difficile à garder en tête alors qu’elle estimait que la jeune femme n’avait pas respecté son propre choix. Ce n’était peut-être pas le plus intelligent, ou le plus sain pour elle, mais c’était le sien, et elle y tenait. « Vous auriez pu venir me chercher dans ma salle commune, dans la Grande Salle ou encore m'attendre à la fin d'un de mes cours. Il me semble que les possibilités ne manquaient pas. » Expliqua-t-elle rapidement. Ebony agissait comme si son intervention en plein cours avait été sa seule solution, mais Dawn n’était pas dupe. Beaucoup d’autres choix s’offraient à elle parmi ceux qu’elle venait de lui citer. Des choix qui n’auraient pas nécessité d’étaler sa situation aux yeux de tous les autres sorciers de sa classe. « Pourtant, vous avez choisi de m'imposer ça. » Cracha-t-elle en montrant d’un geste la salle de classe derrière elles. La Serpentarde tenait beaucoup à sa vie privée, et au contrôle qu’elle pouvait avoir sur celle-ci. Elle choisissait avec soin ce qu’elle partageait de son existence, et avec qui elle le partageait. Autant dire, peu de personnes. Mais c’était mieux ainsi, sa vie ne regardait quiconque, elle n’était pas là pour assouvir la curiosité mal placée de ses camarades et encore moins de ceux qui, issus d’une famille de sang-pur comme la sienne, étaient sans cesse à l’affut de la moindre information qui pourrait être utile pour faire du tort aux Blackwood. Et c’était précisément ce qu’Ebony venait de faire. Elle venait d’exposer une part de l’existence de la jeune femme, de révéler la présence d’une faille dans son armure, de leur offrir un sujet de conversation juteux. Dawn le savait, les rumeurs sur la raison de cette convocation n’attendraient pas la fin du cours pour envahir le château. Les élèves n’étaient peut-être pas tous aussi brillant que Merlin, mais ils ne seraient pas dupes. Quand l’infirmière se déplaçait pour déranger un cours, surtout celui de la sous-directrice de l’école, c’était que quelque chose n’allait pas avec l’élève qu’elle venait chercher. Autant dire qu’elle venait de leur donner de quoi acérer leurs plumes et charger leurs baguettes.
Bien sûr, Ebony ne pouvait pas être consciente de tout ça, mais ça ne rendait pas la rancœur de Dawn plus douce. Elle resta de marbre face au sourire de la sorcière et se contenta de lui emboiter le pas lorsqu’elle commença à se diriger vers les escaliers. « Toutefois, je comprends que tu ais d'autres hippogriffes à fouetter. Personnellement, je t'assure que j'aimerais éviter ce genre de situation, de ne pas avoir à poser des questions. Je souhaiterais me mêler de mes affaires. Pourtant, c'est mon travail et je dois le faire. Et toi... » La Serpentarde se retint de justesse de lui dire que se mêler de ses affaires était une excellente idée. A la place, un léger grognement désapprobateur s’échappa de ses lèvres serrées. « Et toi, tu me laisses pas le choix. Je suis tout simplement obligée de venir te chercher alors que tu aurais pu venir dès le premier jour. Cette histoire serait déjà terminée. De plus, si tu crois que je vais abandonner, tu te mets la baguette dans l’œil. » L’infirmière confirma ses craintes, comme elle s’en doutait, elle était bel et bien du genre tenace. Dawn l’était tout autant, sûrement Ebony l’avait-elle deviné en voyant à quels extrêmes elle en était arrivée pour l’amener dans son infirmerie. Dawn n’en éprouvait aucun remords, personne n’avait forcé la sorcière à en arriver là si ce n’était elle-même. La verte et argent estimait qu’elle n’avait pas besoin de soins, si elle avait un temps hésité à accepter les soins de l’infirmière ce n’était désormais plus le cas. Puisqu’elle ne lui laissait pas le choix, c’était sa manière à elle de se rebeller, de montrer son désaccord. « Si j'avais eu besoin de venir à l'infirmerie j'aurais répondu à vos hiboux. Les médicomages se sont déjà occupés de moi, je vais bien. A combien de personnes vais-je encore devoir le dire pour qu’on me laisse enfin en paix ? » Lança-t-elle excédée alors qu’elles approchaient de l’escalier le plus proche. Ses paroles étaient des demi-mensonges, elle en était parfaitement consciente, mais elle n’en éprouva aucun remords. Après tout, les médicomages lui avaient déjà administré les premiers soins lorsque ses géniteurs l’avaient fait sortir de Sainte-Mangouste, sa vie n’était déjà plus en jeu. Alors, certes, elle n’était pas guérie pour autant, mais le reste n’était que superficiel en comparaison de l’état dans lequel le mangemort l’avait laissé à Pré-au-Lard. Les plaies qui recouvraient son corps la faisaient encore souffrir, mais elles guérissaient, lentement, notamment grâce à ce qu’elle avait appris de Loreen sur les soins moldus. Ses vertiges avaient fini par s’estomper même si elle était encore parfois prise de violents maux de tête. Affirmer qu’elle allait bien était une exagération plus qu’un véritable mensonge, mais Dawn doutait que l’infirmière voie les choses de la même manière qu’elle. Il n’empêchait que physiquement, les choses s’arrangeaient. Psychologiquement, c’était une autre histoire. « Maintenant que les choses sont dites, nous allons pouvoir parler tranquillement à l'infirmerie. » Dawn ne prit même pas la peine de lancer un regard à l’infirmière. Elle trouvait toute cette situation grotesque et elle ne cacha pas son mécontentement en laissant échapper un long soupir. La Serpentarde ne savait pas exactement ce qu’Ebony attendait d’elle, mais elle ne comptait pas faire d’effort pour l’aider à atteindre ses objectifs. Dawn possédait sa propre réputation au sein du château. Son caractère difficile, son mépris qu'elle ne prenait pas la peine de voiler et sa tendance à l'impulsivité étaient connus de tous. Tout cela était très certainement arrivé jusqu’aux oreilles de l’infirmière. Alors elle devait se douter que sa tâche serait loin d’être aisée. Dawn ne possédait pas un caractère malléable et calme qui aurait été bien utile dans ce genre de moment. « De quoi voulez-vous qu'on parle ? De ce qu'il s'est passé cette nuit là ? » L’infirmière avait beau être une sorcière douce et agréable, Dawn n’avait aucune envie de parler avec elle. Elle n’avait rien contre elle, du moins jusqu'à ce qu'elle s'attire sa colère en la mettant au pied du mur, mais en réalité elle n’avait envie de parler avec personne. Les discussions à cœur ouvert, très peu pour elle. Encore moins quand il s’agissait de parler de l’attaque de Pré-au-Lard. Les élèves qui s’étaient aventuré à lui demander ce qui lui était arrivé ce soir-là s’étaient heurtés à un mur de glace et à une colère aussi froide que destructrice. Sienna et Elwan étaient les seuls qui avaient pu aborder ce sujet avec elle sans encourir sa rage. Et il semblait évident qu’Ebony n’aurait pas ce privilège. « Qu'est-ce que vous attendez de moi, hein ? Que je m'épanche sur mes sentiments ? Que je pleure sur votre épaule ? » Lança-t-elle avec dédain. Dawn n’avait jamais su exprimer ses sentiments, ni même les gérer correctement. Après tout, elle n’était pas l’héritière Blackwood pour rien, l’éducation de sa famille avait laissé ses traces sur elle, même si elle n’appréciait pas de le reconnaitre. Pourtant elle aurait bien eu besoin de parler, de se confier pour pouvoir tenter de comprendre ses sentiments, d’apprendre à les maîtriser. De pouvoir enfin exorciser ce qu’elle avait vécu. Mais elle était bien trop fière pour le voir. Alors elle préférait faire semblant. Que tout allait bien, qu’elle n’était ni perdue, ni marquée. Que les souvenirs ne revenaient pas la hanter la nuit, l’empêchant de trouver le sommeil. Qu’elle était forte. Comme si à force de mentir aux autres, elle finirait par croire à ses propres paroles. Quel autre choix avait-elle ? C’était sa manière d’être, elle n’en connaissait pas d’autre, aussi néfaste soit-elle. « Désolée de vous décevoir, mais ça n'arrivera pas. » Elle savait qu’Ebony ne lui laissait pas le choix, mais ce n’était pas pour autant qu’elle allait y mettre du sien.
(c) sweet.lips
Ebony M. Lancaster
+ SORCIER DEPUIS LE : 05/10/2014 + PARCHEMINS : 502
La lâcheté, c'est un peu une seconde nature universelle. Plus nos sociétés s'organisent, plus on a peur de faire des choix. Alors on a éliminé le choix. Il nous reste le mot...
Dawn était exactement comme on la lui avait décrite : bornée, agaçante, un brin égoïste et détestable. Elle avait le don d'attiser l'animosité des personnes. Cependant, comme elle se trouvait face à la personne la plus bienveillante que la terre n'ait jamais porter, Dawn ne réussit pas le moins du monde à se rendre turpide aux yeux de l'infirmière. Au contraire, elle cherchait davantage ce qui pouvait réellement la rendre aussi impertinente, Cependant, elle eut un début de réponse aux première répliques sarcastiques de cette dernière. Elle aimait de toute évidence qu'on ne fasse pas tout étalage de sa vie privée et rejetait presque la faute sur Ebony qui cherchait simplement à l'aider. Elle passa simplement une main dans ses cheveux à présent courts. Elle se retint de lui répondre tout de suite à ce sujet. Elle voulait avoir ses réponses à toutes ses interventions. Bony avait un plan bien précis et dessiné dans son esprit et ne laisserait pas Dawn la contrarier. Elle préférait tout encaisser en silence et préparer ses armes pour lui répondre seulement à la fin. Elle ne la psychanalysait pas – enfin si un peu- mais cherchait des débuts de réponse dans les différents propos de cette dernière. En tout cas, pour une adolescente qui ne voulait pas parler, elle trouvait les mots pour lui balancer toute sa haine au visage. Elle crachait son venin tel un serpent, l’emblème de sa maison. Elle ne saurait dire si c'était caractéristique des serpentards. Elle avait constaté nombre de gryffondors avec un caractère aussi difficile et prononcé. Cependant, miss Blackwood était championne dans cette catégorie. Dans un sens, cela l'amusait de voir à quel point une élève pouvait se mettre en rogne pour de telles broutilles. Les adolescents avaient réellement des manies à l'exagération. Dés qu'on touchait à ce qu'ils avaient de plus précieux, ils montaient sur leurs grands chevaux. Mettez vous en travers leur route et vous comprendrez la douleur de Ebony. A cet âge-là, on était de véritables révoltés. Toutefois, elle ne se rappelait pas avoir été comme ça au même âge, peut être qu'elle avait toujours été plus douce et calme. Elle ne piquait que très rarement des crises de colère et quand cela arrivait, c'était pour casser des fioles vides. On trouvait pire comme danger n'est-ce pas ? Les seules qui étaient à plaindre se trouvaient être des bouts de verre et par chance, ces morceaux n'avaient aucune conscience et par conséquent aucune proportion à se plaindre. Mais là, c'était différent. Dawn s'en prenait à elle comme si elle venait de faire la chose la plus horrible du monde. Elle comprenait bien qu'elle avait ses affaires, qu'elle se sentait piégée, voir peut être trahie. A cet âge-là, on avait l'impression que la terre entière nous détestait, alors forcément ! Malgré tout, les adolescents n'étaient pas aussi méprisables et bavards que Dawn semblait le croire. Oh bien sûr, on ne pouvait nier que les rumeurs pouvaient se balader, mais jamais personne n'oserait se mettre en travers de sa route ou la serpentard les recadrait aussitôt. Ça Bonny en avait parfaitement conscience.
Alors qu'elles avançaient dans le couloir et approchaient à grand pas l'escalier le plus proche, Ebony en vint à sa conclusion préférée... elles allaient enfin pouvoir discuter, tranquillement, ça par contre, c'était moins sûr, mais au moins à l'abri des regards dans son bureau. Elle ne s'attendait pas du tout à ce que Dawn approuve sans rien dire. Et les propos qu'elle tint confirmèrent ses craintes. Elle campait réellement sur ses positions. Mmh, plus difficile qu'elle ne l'avait pensé. Tant pis ! C'était son boulot. Enfin bref. « Déjà, vous allez commencer par changer de ton, jeune fille ! Je ne suis pas votre chien, alors un peu de respect ne serait pas de trop. » Dit-elle simplement en arquant un sourcil. Elle n'avait aucune envie de se laisser marcher sur les pieds. Elle avait beau être gentille et généreuse, prête à tendre la main aux plus coriaces, il était hors de question que quelqu'un l'insulte de la sorte. Qu'elle lui en veuille était une chose, qu'elle lui parle de la sorte en était une autre. Si elle pouvait accepter la première chose, elle ne tolérerait pas la seconde. « Que vous soyez en colère et agacée, ça, je peux le comprendre, mais que vous soyez aussi dédaigneuse, ça n'est pas acceptable, est-ce clair ? » Difficile de croire que l'infirmière, douce, petite et menue puisse se montrer aussi sévère. Beaucoup aurait pu imaginer qu'elle n'aurait rien dit et aurait laissé passer ça. Eh bien, il fallait se rendre à l'évidence et se dire que non, Ebony n'était pas une petite idiote, qui se laissait écraser par les propos d'une adolescente, et même s'il s'agissait d'une héritière. Et Dawn ne l'effrayait pas le moins du monde. Si elle avait eu peur d'un Blackwood, ce serait plutôt du père, mais pas de sa progéniture. « Aussi, vous semblez me reprocher cette mise en scène, mais peut-être que si vous aviez pris cinq minutes pour me répondre, tout ceci ne serait pas arrivé. Je ne respecte pas votre vie privée ? Eh bien, vous n'avez tout simplement pas respecté ma personne. Je ne pense pas que vous soyez en position de me coller tous les défauts du monde sur le dos. Il y a quelques limites à ce que vous puissiez me dire. » Autant lui remettre les idées en place. Ebony ne hurlait pas, mais le ton de sa voix était catégorique et ferme. Bien sûr, elle aurait largement préféré parler avec elle autour d'un thé et de quelques biscuits plutôt que de lui exprimer le fond de sa pensée. Mais si Dawn se montrait aussi désagréable, il fallait autant lui montrer tout de suite qu'elle n'était pas au dessus des lois et que les règles de Poudlard s'appliquaient aussi à elle, surtout à elle.
Ebony n'aimait vraiment pas la situation dans laquelle elles se trouvaient. Dawn était non seulement irrespectueuse, mais persuadée que l'infirmière voulait entendre ses plus grands secrets. Mais dans le fond ses états d'âmes lui importaient peu. Elle voulait juste s'assurer que tout allait bien et que si jamais elle avait besoin de parler à quelqu'un qu'elle avait un ami sur qui comptait. Eh oui bien sûr, il y avait aussi les parents de la serpentard qui la pressaient de lettres pour avoir des nouvelles de leur fille. Elle n'appréciait pas vraiment leur entêtement et le ton qu'ils employaient parfois. De plus, elle savait parfaitement qu'ils ne la tenaient pas dans leur coeur. Ebony était de sang mêlé, une impur qui ne méritait pas toute leur attention. Cependant, elle n'était pas certaine que Dawn soit exactement comme eux. Il y avait bien une faille dans son armure. Elle n'avait jamais entendu de cas où elle aurait traité un né moldu de sang de bourbe, ou alors tout simplement montré du mépris pour l'un d'entre eux. Toutefois, Dawn sentait clairement le souffre. Elle explosait facilement, se battait parfois à la moldue et était une dure à cuire. « Et si cela peut vous rassurer, je m'attends pas vraiment à ce que vous me racontiez votre vie ou que vous pleurnichiez sur mon épaule. Je suis peut-être gentille, mais pas idiote. Je ne me berce pas d'illusions à votre sujet. » Elle haussa un sourcil comme pour montrer qu'il ne fallait pas la prendre pour une cruche. S'entama alors la dernière ligne droite vers l'infirmerie. « J'aimerais seulement que vous compreniez que vous n'êtes pas la seule en colère. Je ne dirai pas que j'ai souffert comme vous lors de cette nuit-là, ce serait présomptueux de ma part. Mais j'ai moi-même été marquée par cette attaque, pas tout à fait de la même façon, certes. » Elle marqua une pause et se mordilla la lèvre inférieure. Elle allait parler de ce qu'elle avait vu, de ce que ses amis avaient subi. « J'ai vu de quoi étaient capables ces hommes. L'un d'eux a lancé un doloris sur un élève et ce de sang froid. Ce même homme a désarmé un auror et l'a mis à terre. Il s'en est aussi pris à une enseignante. Quand je suis arrivée sur place, elle était au bord de la mort, l'élève était paralysé et l'auror dans un piètre état. » Elle ferma les yeux en se souvenant de ce gryffondor qui avait pris le risque de désobéir. Elle s'en voulait de ne pas avoir été prudente. L'histoire que racontait Ebony à Dawn était plus ou moins connue, difficile d'ébruiter cette affaire. Cependant, Dawn comme la plupart des élèves ne pouvait pas tout savoir en détail. « Pour le mettre à terre, il a fallu deux sortilèges et qu'on le prenne par derrière. Il a fallu user de lâcheté et se mettre à son niveau pour arriver à se débarrasser d'un seul sorcier. »
Elle roula des yeux et soupira. Elle n'avait pas honte de conter cette histoire à une élève. Elle ne pensait pas que les enfermer dans leur bulle puisse les aider outre mesure. En fait, ça lui semblait plus utile de leur dire clairement les choses plutôt que les garder dans le secret. C'était ridicule. « Je ne vous raconte pas cela pour vous faire peur ou culpabiliser, mais bien pour vous montrer à quel point l'heure est grave. Je ne fais pas partie de ces personnes qui pensent qu'il est bon de vous abrutir avec des magnifiques discours rassurants. Certains adultes ont tendance à croire que vous ne pourriez pas comprendre et saisir toute l'importance de la situation. Ils ont tord et oublient que vous avez été confrontés à cette menace. » En voyant l'infirmerie, elle inspira profondément. Elle ouvrit la porte pour laisser passer Dawn devant elle. « Je veux juste vous dire qu'il est normal d'avoir peur ou d'être en colère. Les autres ont tendance à sourire, à essayer de reprendre une vie normale. Vous avez peut être l'impression d'être seule à vous rappeler de cette nuit-là. Pourtant, vous vous trompez. Ce n'est pas bon de garder tout pour soi et de ruminer une vengeance. » Elle se rappela ce que Dawn lui avait dit précédemment. Elle l'entendait déjà hurler qu'elle ne lui parlerait jamais à elle. Mais dans le fond, Ebony se fichait bien de se savoir à qui elle confiait ses états d'âme, tant qu'elle avait quelqu'un. « Que je ne sois pas la personne digne de confiance à vos yeux pour entendre vos sentiments m'importe peu. Ça peut être n'importe qui, votre cousin, votre amie, votre voisin de classe ou même votre professeur. L'important n'est pas qui pour moi, mais plutôt si vous connaissez quelqu'un qui est prêt à vous écouter et à qui vous accepteriez de partager vos angoisses ou votre rage. » Elle posa sur son élèves un regard entendu. Elle voulait qu'elle comprenne qu'elle ne tenait pas tant à être l'épaule sur laquelle elle pleurerait mais plutôt qu'elle voulait s'assurer que tout allait bien pour elle. « Et sachez que vous ne pourrez pas me demander d'arrêter de me mêler de vos affaires. Ce n'est pas seulement mon travail, c'est aussi ma nature. Vous ne m'empêcherez pas de m'inquiéter pour vous, tout comme je ne vous obligerai pas à exprimer vos émotions. » Elle marqua une pause avant de lui proposer finalement une boisson chaude. « Un thé, un café ou un chocolat chaud peut-être ? »
GASMASK
Je suis réellement désolée de mon retard
Dawn R. Blackwood
LA PRINCESSE DES GLACES
+ SORCIER DEPUIS LE : 18/08/2012 + PARCHEMINS : 6731 + LOCALISATION : Poudlard, la tanière des verts ou le terrain de quidditch
Dawn savait qu'Ebony était pleine de bonne volonté, du peu qu'elle savait de la sorcière, elle avait l'air d'être une bonne personne, généreuse et attentive. Comment aurait-elle fait sinon pour supporter tous les gamins pleurnichards qui visitaient son infirmerie à la moindre égratignure ? Et vu le nombre de blessures -dues au quidditch ou à son caractère trop bagarreur- qu'elle avait soignés, Dawn savait qu'elle était une infirmière compétente et patiente. Elle n'avait donc pas été le moins du monde surprise de constater qu'elle désirait la voir pour s'assurer de sa santé, quelque part, elle avait même été touchée de voir que l'infirmière faisait preuve d'autan de sollicitude envers tous les élèves du château. Pourtant, aucune culpabilité n'avait étreint le cœur de la Serpentarde lorsque, quatre fois de suite, elle avait roulé en boule les parchemins que l'infirmière lui avait envoyés. Elle n'avait même prêté qu'une attention superficielle aux deux derniers, elle pouvait en deviner le contenu les yeux fermés. Même avant de recevoir les hiboux de la sorcière, elle avait pu deviner leur venue, les convocations de l'infirmière n'étaient pas passées inaperçues et les élèves avaient rapidement compris qu'ils seraient tous priés de se rendre à l'infirmerie. Mais elle n'y avait pas été plus réceptive pour autant. Car si elle avait trouvé la mission qu'Ebony semblait s'être donnée pleine d'empathie et de bonne volonté, elle aurait préféré ne pas être concernée. Dawn ne montrait que rarement son vrai visage aux autres, elle était trop secrète, trop distante, trop habituée à ne rien laisser filtrer de ses véritables sentiments pour accepter la sollicitude de l'infirmière sans rien dire. Trop habituée à se retrancher derrière son masque de froideur et d'indifférence, à se protéger avec son arrogance et ses mots durs, à nager parmi les requins, elle ne comprenait pas que l'on puisse simplement lui porter un intérêt sincère. Elle n'y croyait plus. A force d'évoluer dans la société corrompue des sang-purs, de côtoyer des sorciers qui se disaient amicaux, mais qui n'hésitaient à pointer leur baguette dans le dos de leur soi-disant allié, elle ne parvenait plus à croire que l'inquiétude d'une presque inconnue puisse être réellement sincère et dépourvue de la moindre attente. Déjà amère face au monde, Dawn n'avait plus confiance en rien, ni personne. Alors, la bienveillance de l'infirmière, elle n'avait jamais voulu en faire l'objet. Parce qu'elle ne s'en sentait pas légitime, mais aussi -et surtout- parce que se rendre dans l'aile médicale du château voulait dire qu'elle devrait admettre être toujours blessé, qu'elle portait encore les traces de l'attaque. C'était avouer que quelque chose n'allait pas. Et ça, ça lui était impensable.
Mais l’élément qu’elle n’avait pas pris en compte lorsqu’elle avait entrepris d’ignorer les missives de l’infirmière, c’était son obstination. Quelque part, elle avait espéré que la sorcière finisse par se résigner et l’oublier. Qu’en la voyant se rendre en cours normalement et qu’en l’apercevant aux repas dans la Grande Salle, elle finisse par conclure qu’elle allait bien et qu’une visite à l’infirmerie de l’école serait inutile. Mais Dawn s’était mis la baguette dans l’œil et elle s’en rendait bien compte maintenant. Elle avait sous-estimé à la fois la ténacité de Miss Lancaster et sa capacité à la mettre dans une situation qu’elle détesterait. Pour une fois, elle était tombée sur une sorcière certainement aussi têtue qu'elle et elle savait que puisque l'infirmière avait l'autorité professorale et le soutient de la direction derrière elle, ce combat était perdu d'avance. Pire, elle risquait de s'attirer de gros ennuis si elle laissait son fort caractère prendre le pas sur la raison. Bien que souvent froide et arrogante avec ses camarades, Dawn avait appris à faire preuve de respect envers ses aînés et à toujours faire preuve de politesse envers le corps enseignant de Poudlard. Elle temporisait son caractère de feu et prenait garder à ne jamais dépasser la limite, même si parfois ce n'était pas l'envie qui lui manquait. Ses parents avaient déjà assez bien de choses à lui reprocher, ils n'auraient certainement pas accepté qu'elle se retrouve abonnée aux retenues. Cela aurait été très mauvais pour l'image si parfaite des Blackwood. Très tôt, on lui avait inculqué les valeurs propres aux grandes familles de sang-pur, et si celles-ci n'indiquaient pas qu'il était obligatoire de faire preuve de sympathie envers ceux de son âge, elles étaient très claires sur le respect dont elle devait faire preuve envers ses aînés. Mais en cet instant, toutes les recommandations que ses géniteurs avaient pu lui adresser avaient été oubliées et toutes les leçons que ses précepteurs avaient dédiées à la politesse avaient été effacées d'un revers de la main. Le trop-plein d'émotions qu'elle ressentait depuis la nuit de l'attaque avait pris le dessus, obscurcissant son jugement et lui dictant des paroles trop acides. Elle s'était laissée aveuglée par la colère et le ressentiment et de toute évidence, elle avait franchi la ligne rouge envers Ebony. « Déjà, vous allez commencer par changer de ton, jeune fille ! Je ne suis pas votre chien, alors un peu de respect ne serait pas de trop. Que vous soyez en colère et agacée, ça, je peux le comprendre, mais que vous soyez aussi dédaigneuse, ça n'est pas acceptable, est-ce clair ? » La Serpentarde accusa le coup en silence, les lèvres pincées et le regard résolument fixé devant elle. Bien qu'elle soit consciente d'avoir dangereusement flirté avec la limite de l'acceptable, elle ne s'en sentait pas le moins du monde coupable. Elle était capable de bien pire. Que l'infirmière lui donne des heures de retenues si ça lui chantait. Elle préférait ça à être forcée de se rendre à l'infirmerie. « Aussi, vous semblez me reprocher cette mise en scène, mais peut-être que si vous aviez pris cinq minutes pour me répondre, tout ceci ne serait pas arrivé. Je ne respecte pas votre vie privée ? Eh bien, vous n'avez tout simplement pas respecté ma personne. Je ne pense pas que vous soyez en position de me coller tous les défauts du monde sur le dos. Il y a quelques limites à ce que vous puissiez me dire. » De toute évidence, l'infirmière et la verte avaient des avis divergents sur le comportement qu'elle avait eut face aux hiboux reçus ces derniers jours. Dawn ne comprenait pas pourquoi elle semblait prendre cette affaire tant à cœur, si des soins avaient été nécessaires, elle se serait rendue à l'infirmerie. Ebony voulait peut-être bien faire son travail, mais pour la verte, elle en faisait tout simplement trop. Elle allait bien, pourquoi refusait-elle de le voir ?« Et si cela peut vous rassurer, je m'attends pas vraiment à ce que vous me racontiez votre vie ou que vous pleurnichiez sur mon épaule. Je suis peut-être gentille, mais pas idiote. Je ne me berce pas d'illusions à votre sujet. » Au moins, elles étaient d'accord sur ce point. Dawn n'était vraiment du genre sentimentale, les discussions à cœur ouvert, très peu pour elle. Elle préférait encore aller nager avec le poulpe géant que de devoir mettre des mots sur ses sentiments. Surtout devant quelqu'un qu'elle connaissait aussi peu que Miss Lancaster. Peut-être que si l'infirmière avait géré la situation d'une manière moins excessive et qu'elle ne lui avait pas forcé la main en la mettant devant le fait accomplis, la jeune femme aurait réagit autrement. Peut-être se serait-elle adoucie et aurait-elle accepté qu'un dialogue, même le plus superficiel, s'établisse entre elles. Mais si l'infirmière disait ne se faire aucune illusion quant au caractère de la verte et argent, elle ne savait de toute évidence pas comment le gérer. En quelques instants, elle avait fait tous les mauvais choix, elle avait réussi à braquer l'héritière et à s'attirer ses foudres. « Bien. Je n'aurais pas voulu vous décevoir davantage. » Marmonna-t-elle à mi-voix tout en se fichant que l'infirmière puisse l'entendre. Un sourire ironique vint flotter un instant sur ses lèvres. Dawn savait qu'elle pouvait avoir un caractère difficile quand elle n'était pas simplement froide et distante. Elle était arrogante et impulsive, obstinée et souvent insolente. Elle se moquait des conséquences de ses paroles et, de manière générale, ne portait que rarement une réelle attention aux autres -ceux qui avaient ce privilège étaient bien rares. Bien sûr, tous ces traits négatifs n'étaient pas tout ce qu'il y avait à voir de la Serpentarde. Mais son caractère plus doux et attentif était bien camouflé sous une épaisse couche de glace. De celles qu'il n'était pas aisé de faire fondre. Et aux yeux de Dawn la situation ne se prêtait pas à dévoiler cette autre facette de sa personnalité à Ebony. Celle-ci avait peut-être l'autorité, mais ce n'était pas ainsi qu'elle réussirait à amadouer la Serpentarde. Elle avait connu pire.
Le couloir laissa place à des escaliers qui furent franchis bien trop rapidement au goût de Dawn. Elles s'approchaient de l'infirmerie à une allure constante et la Serpentarde savait qu'il était inutile d'espérer échapper à ce petit tête-à-tête contraignant. Sa seule solution aurait été de fausser compagnie à la jeune femme en empruntant discrètement le premier passage secret qui croiserait son chemin, mais elle pouvait déjà s'imaginer la colère que cela provoquerait chez l'infirmière. Si elle aurait tout donné pour pouvoir voir l'expression que la sorcière aurait revêtue en se rendant compte qu'elle avait disparu sans un bruit, elle n'était pas suicidaire au point de courir au-devant de plus d'ennuis. Résignée, elle se contenta donc de suivre les pas de Miss Lancaster, espérant vaguement que quelque chose viendrait interrompre leur avancée. « J'aimerais seulement que vous compreniez que vous n'êtes pas la seule en colère. Je ne dirai pas que j'ai souffert comme vous lors de cette nuit-là, ce serait présomptueux de ma part. Mais j'ai moi-même été marquée par cette attaque, pas tout à fait de la même façon, certes. » Pourtant, c'était bien ce que Dawn ressentait, comme si elle était la seule en colère, la seule qui brûlait de rage à l'idée d'avoir été une victime de ces sorciers. Dont les prunelles réclamaient vengeance à corps et à cri et dont les souvenirs la torturaient toujours sans relâche. Elle avait l'impression que tous les autres avaient tourné la page, que la détresse première avait été bien vite oubliée une fois le confort de Poudlard retrouvé. Comment pouvaient-ils être si naïfs ? Et les professeurs ne valaient pas mieux, à trop vouloir les protéger, ils finissaient par les enfermer entre les murs du château, les coupant de la réalité, les empêchant de réaliser que ce qu'ils avaient vécu n'était que le début de la déchéance. Ebony pouvait bien dire le contraire, ça faisait longtemps que Dawn ne s'était pas sentie aussi seule et désemparée. « J'ai vu de quoi étaient capables ces hommes. L'un d'eux a lancé un doloris sur un élève et ce de sang froid. Ce même homme a désarmé un auror et l'a mis à terre. Il s'en est aussi pris à une enseignante. Quand je suis arrivée sur place, elle était au bord de la mort, l'élève était paralysé et l'auror dans un piètre état. Pour le mettre à terre, il a fallu deux sortilèges et qu'on le prenne par derrière. Il a fallu user de lâcheté et se mettre à son niveau pour arriver à se débarrasser d'un seul sorcier. » Elle lui lança un regard furtif, elle ne voyait pas vraiment où la jeune femme voulait en venir. Elles avaient vécu la même nuit d'horreur, avaient combattu les mêmes mages noirs et été les témoins des mêmes actes inimaginables. Elle n'avait pas besoin de se voir rappeler tout cela. Sa mémoire se chargeait bien de le lui remémorer dès qu'elle fermait les yeux. Elle reporta son regard sur le couloir qu'elles traversaient, fermant nerveusement les poings pour les empêcher de trembler face aux souvenirs qu'Ebony réveillait. « Je ne vous raconte pas cela pour vous faire peur ou culpabiliser, mais bien pour vous montrer à quel point l'heure est grave. Je ne fais pas partie de ces personnes qui pensent qu'il est bon de vous abrutir avec des magnifiques discours rassurants. Certains adultes ont tendance à croire que vous ne pourriez pas comprendre et saisir toute l'importance de la situation. Ils ont tord et oublient que vous avez été confrontés à cette menace. » Cette fois-ci, un grognement d'approbation franchit les lèvres de la Serpentarde. Les adultes du château ne rendaient service à personne en agissant ainsi, ils voulaient leur bien, mais devraient finir par réaliser que par les temps qui courraient les élèves allaient être forcés de grandir plus vite. « Je veux juste vous dire qu'il est normal d'avoir peur ou d'être en colère. Les autres ont tendance à sourire, à essayer de reprendre une vie normale. Vous avez peut-être l'impression d'être seule à vous rappeler de cette nuit-là. Pourtant, vous vous trompez. Ce n'est pas bon de garder tout pour soi et de ruminer une vengeance. » Elle garda le silence une fois de plus, emmurée derrière ses lèvres pincées et ses iris plantés droit devant elle. Pourtant, elle était surprise, presque déconcertée devant les mots de l'infirmière. Elle était une des rares à formuler ce que la Serpentarde ressentait, une des seules à accepter de le dire à haute voix. Au moins Dawn ne devait pas faire face à quelqu'un qui refusait de voir la réalité telle qu'elle était.
La porte de l'infirmerie s'était présentée à elles aussi rapidement que Dawn l'avait redouté. Quelques pas en arrière, elle observa Ebony ouvrir la porte de son lieu de travail et poussa un léger soupir lorsqu'elle lui fit signe d'entrer la première. Elle passa devant l'infirmière en secouant légèrement la tête, toute cette situation était ridicule à ses yeux même si Ebony considérait qu'elle faisait seulement son travail. Merlin soit loué la pièce était vide, elle n'aurait pas supporté de faire l'objet de plus de regards curieux et de murmures empressés. Les lits blancs s'alignaient devant elle et pendant une seconde, elle fut bien contente de ne pas avoir atterri à l'infirmerie après l'attaque du marché nocturne, même si son séjour à Sainte-Mangouste avait été court elle y avait eu une certaine intimité que Poudlard n'aurait pas pu lui offrir. Elle hésita quelque peu sur le pas de la porte, elle ignorait ce qu'Ebony attendait exactement d'elle. Elle se contenta donc de faire quelques pas dans la pièce, prenant naturellement la direction du bureau de l'infirmière qui se trouvait un peu à l'écart. Elle s'arrêta à mi-chemin pour se tourner vers la sorcière. « Que je ne sois pas la personne digne de confiance à vos yeux pour entendre vos sentiments m'importe peu. Ça peut être n'importe qui, votre cousin, votre amie, votre voisin de classe ou même votre professeur. L'important n'est pas qui pour moi, mais plutôt si vous connaissez quelqu'un qui est prêt à vous écouter et à qui vous accepteriez de partager vos angoisses ou votre rage. Et sachez que vous ne pourrez pas me demander d'arrêter de me mêler de vos affaires. Ce n'est pas seulement mon travail, c'est aussi ma nature. Vous ne m'empêcherez pas de m'inquiéter pour vous, tout comme je ne vous obligerai pas à exprimer vos émotions. » Alors c'était ça la raison de tout ceci ? Celle pour laquelle elle l'avait trainée jusqu'à l'infirmerie ? Juste pour lui demander si elle avait pu s'exprimer sur ce qu'elle avait vécu ? Si c'était là son unique raison, tout ce cirque avait été parfaitement inutile, elle aurait eu plus vite fait de lui poser la question au détour d'un couloir ou dans la Grande Salle. Plutôt que de la mettre face au mur. Dawn s'apprêtait à exprimer le fond de sa pensée quand Ebony reprit de nouveau la parole. « Un thé, un café ou un chocolat chaud peut-être ? » Elle la regarda interdite. Après son ton et ses paroles précédentes sa proposition paraissait étrange, presque irréelle. Comme si l'infirmière était lunatique et venait d'effacer de sa mémoire leur échange précédent. Déconcertée, Dawn mit quelques secondes à reprendre ses esprits et à lui répondre. « Je n'aurais pas dit non à un verre de Whisky pur-feu, mais je doute d'avoir votre accord. Je veux bien un café à la place. » Elle lui adressa un sourire faussement innocent. Elle aurait bien eu besoin d'alcool pour l'aider à supporter cette situation, mais elle doutait que l'infirmière partage son avis. D'ailleurs, elle doutait quelque peu de la réception qu'elle ferait de ses paroles, mais tant pis, il était trop tard pour y réfléchir. Et puis, ce n'était pas comme si Ebony avait une bonne image d'elle de toute manière. Elle n'était plus à ça près.
Elle retrouva le silence pour se laisser le temps de réfléchir aux paroles de la sorcière. Ebony devait avoir une bien piètre image de la Serpentarde pour formuler ainsi ses inquiétudes. Dawn savait qu'elle avait été tout sauf agréable avec elle et qu'elle avait mérité les remontrances qu'elle avait reçues, mais elle n'appréciait que peu de se voir juger de la sorte, sur une rencontre forcée de moins de cinq minutes. Elle pouvait deviner d'ici l'image qu'Ebony était en train de se construire d'elle. Celle d'une sale petite égoïste arrogante et imbue d'elle-même, celle qui écrasait les autres sur son passage. Exactement l'image que ceux qui ignoraient tout de Dawn se faisaient sans même chercher à la connaitre réellement. Comme toutes les autres Ebony était tombée dans le panneau et comme tous les autres, elle n'avait pas cherché à apercevoir la réalité. Certainement trop désabusée par celle qu'elle pensait être Dawn. Celle-ci pinça les lèvres pour s'empêcher d'afficher son agacement au grand jour et passa une main dans ses cheveux. « Vous pensez donc que je n'ai personne ? Que je suis si détestable que personne ne veut m'approcher ? » Lança-t-elle en reportant son regard ambré sur l'infirmière et en haussant un sourcil. Ses paroles sonnaient comme une énième provocation, mais sa voix laissait transparaitre son amertume. Elle n'avait peut-être pas beaucoup d'amis, mais au moins elle savait qui était sincère avec elle, qui pouvait voir à travers son masque. Le comprendre. « Mais c'est peut-être moi qui empêche les autres de m'approcher. » Ses paroles pouvaient être perçues comme une simple envie de contredire les dires de l'infirmière, mais Dawn savait qu'il n'y avait en fait là que la plus pure des vérités. C'était elle qui repoussait les autres, elle qui élevait des barrière pour se protéger d'eux. Elle avait grandi comme ça, elle s'était construite comme ça, ça faisait maintenant partie d'elle. Mais bien sûr, Ebony l'ignorait. « Vous pouvez cesser de vous inquiéter pour l’antipathique et affreuse sorcière que je suis. J'ai déjà partagé mes angoisses et ma rage avec un autre élève du château. » Finit-elle par dire en reprenant les paroles de l'infirmière et en insistant sur le choix des adjectifs. Si Ebony la trouvait si détestable, elle n'avait qu'à la laisser partir, c'était aussi simple que ça aux yeux de la verte. Après tout, elle ne voulait être un boulet pour personne, l'infirmière pourrait retourner soigner des élèves qui en avaient véritablement besoin et elle pourrait enfin oublier cette histoire de visite médicale contrainte. Elle n'en avait pas besoin, même si elle se doutait qu'Ebony penserait certainement le contraire si elle savait qu'elle avait refusé les soins des médicomages qui s'étaient présentés au manoir Blackwood et si elle voyait les cicatrices qui ornaient toujours sa peau. Mais ce n'était certainement pas Dawn qui allait lui révéler tout ça. De toute évidence, ces instants n'étaient une partie de plaisir ni pour l'une, ni pour l'autre, nul besoin d'empirer les choses. « Vous croyez que je me fais des illusions ? J'ai vu un homme tomber sous un sort avant d'avoir pu pousser le moindre cri. Il était à moins d'un mètre de moi. Pour ce que j'en sais, je l'ai peut-être vu mourir. » Elle frissonna en repensant à cette vision qui avait marqué le début de l'attaque des mangemorts. L'homme avait à peine touché le sol que l'horreur s'abattait sur Pré-au-Lard, il était alors déjà trop tard pour réagir, les mages noirs s'étaient infiltrés dans les moindres recoins du village, ne leur laissant que le choix de se battre pour leur survie ou de fuir à leurs risques et périls. Mais rares étaient ceux qui avaient pu échapper aux ténèbres. D'une manière ou d'une autre, ils avaient tous été touchés par la noirceur de la nuit et ils devaient désormais apprendre à vivre avec. Même plus de deux semaines après l'attaque, elle n'avait toujours pas réussi à se résoudre à aller dans la forêt interdite pour voir si elle pouvait désormais distinguer les sombrals qui y vivaient. Elle n'était pas sûre de vouloir savoir si elle avait vu la mort en face ce soir-là. Elle voulait conserver cette illusion, aussi ténue soit-elle, aussi longtemps que possible. Elle secoua la tête pour masquer son trouble, un sourire amer habillant ses lèvres avant de reprendre. « J’ai vu Phèdre Montgomery être touchée par un sort alors que j’essayais d’aller l’aider. Je n’avais plus ma baguette quand le Doloris du mangemort m’a touché. Je sais parfaitement quel genre de sorcier se cache sous ces masques si ça peut vous rassurer. » Elle releva le regard pour croiser celui d'Ebony. Contrairement à la plupart de ses camarades, Dawn ne se faisait aucune illusion, elle refusait d'avancer les yeux fermés même si les visions qu'ils lui apportaient étaient difficilement supportables. De toute manière, elle n'avait jamais eu le luxe de se mentir sur le monde dans lequel elle vivait. Grandir dans une famille de sang-pur, évoluer dans une société si conservatrice lui avait permis de comprendre bien rapidement la cruauté qui l'entourait. Les discours enflammés sur la haine des nés-moldus, les incitations à discriminer les sangs-impurs et à prôner leur supériorité, elle s'y était si vite habituée que désormais elle ne les entendait même plus. Les mensonges, les faux-semblants, les complots, elle connaissait tout cela. Elle n'y avait jamais pris part, mais elle savait que sa famille avait du sang sur les mains, que ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle ne se retrouve embarquée dans une sombre histoire. Alors les agissements des mangemorts ne la surprenaient pas vraiment, ils passaient à l'action masqués, profitant d'un évènement prisé des sorcier pour rendre la nuit sanglante, menés par un sorcier qui ne prenait même pas la peine de prendre part aux combats et qui les laissait faire tout le sale boulot. Mais Dawn était persuadée que ça leur était bien égal, car au moins ils pouvaient faire ce qu'ils attendaient en silence depuis des années : détruire tout ce qui n'avait pas de valeur à leurs yeux, les sangs-impurs. Leur discours, leurs idéaux empoisonnés, la Serpentarde les connaissait bien, elle ne comptait plus le nombre de fois où elle les avait entendus lors de soirées de la haute société sorcière ou même de la bouche de son propre paternel lors qu'il exigeait d'elle qu'elle choisisse mieux ses relations. Elle se doutait bien que parmi tous les sorciers qu'elle avait côtoyé lors des galas donnés par ses géniteurs, se trouvaient de nombreux mangemorts. Peut-être que son propre père c'était trouvé à Pré-au-Lard ce soir là, à torturer les camarades de sa fille. Cette idée la rendait malade. Ebony avait raison de dire que les sbires du mage noir étaient vils, méprisables et prêts à toutes les bassesses pour arriver à leurs fins, mais elle avait tort de penser que Dawn ne s'en rendait pas compte. C'était un milieu dans lequel elle avait baigné depuis son plus jeune âge, elle ne se faisait aucune illusion à ce propos. Même si ça lui faisait froid dans le dos.
Finalement, elle s'approcha du lit le plus éloigné de la porte, un son sourd se fit entendre lorsqu'elle laissa tomber son sac au sol, mais elle n'y prêta pas attention, elle avait ensorcelé ses bouteilles d'encre pour qu'elles résistent à ce genre de traitement. D'un geste impatient, elle s'assit au bord du lit sans y être invité et tourna la tête vers l'infirmière. « Très bien. Finissons-en puisque vous tenez tellement à ma présence ici. Que voulez-vous savoir ? » Puisqu'elle n'avait pas le choix autant en finir au plus vite.
(c) sweet.lips
Ebony M. Lancaster
+ SORCIER DEPUIS LE : 05/10/2014 + PARCHEMINS : 502
La lâcheté, c'est un peu une seconde nature universelle. Plus nos sociétés s'organisent, plus on a peur de faire des choix. Alors on a éliminé le choix. Il nous reste le mot...
Ebony laissa échapper un soupir coincé entre agacement et soulagement. En toute honnêteté, elle s'attendait à pire. Peut-être parce que les élèves se plaignaient toujours du caractère exécrable de leur camarade même s'ils criaient facilement au loup aux yeux de l'infirmière. Elle préféra prendre cette réflexion à la rigolade. Inutile de se vexer pour si peu. « Vous imaginez bien que je ne laisse pas des bouteilles d'alcool à mon infirmerie. Je tiens bien trop à mon travail pour risquer de le perdre. » Suivit donc cette réponse tout en légèreté un petit rire cristallin. Elle activa sa baguette en direction du fond de la pièce où s'animèrent cafetière et petite tasse. Pour sa part, elle ne se servit rien. Elle n'avait aucune envie de boire à présent. Elle s'en allachercher la tasse dans un silence de cathédrale, laissant la petite Dawn avec ses réflexions. Tout était quasiment fini. Elle se permit d'ajouter à cela une petite assiette de sablés qu'elle avait rangés dans une petite boite hermétique. Calme et tranquillisée, Ebony écouta les paroles de la collégienne sans prononcer un mot. Elle choisit de se taire pour supporter le mieux possible les divagations de la jeune femme. Elle ne semblait pas vraiment comprendre où elle voulait en venir. Les personnes qui avaient peu d'amis ne se révélaient pas tous détestables. Elle connaissait bien des gens solitaires, timides et juste effrayés par les autres. Mais Dawn Blackwood ne faisait pas partie de ce genre de personne. Et vue, sa réaction quelque peu excessive et personnelle de la jeune fille, on pouvait peut-être imaginer qu'elle n'appartenait pas non plus à la première catégorie. Elle posa donc son petit plateau argenté sur la table roulante, utilisée d'ordinaire pour les potions de soin. La suite confirma parfaitement les doutes de l'infirmière. L'héritière se rattachait donc à une troisième catégorie de personnes, celle qui réunissait les pauvres gamins perdus, forcés de tenir un rôle absurde. Elle ne cilla pas, accusant le coup sans un mot. Ce qu'elle entendit par la suite la rassura. La gamine ne s'enfermait donc pas comme une huître face à tout le monde. Ebony constatait donc que miss Blackwood en avait gros sur le cœur. Elle dégoulinait de colère et d'agacement. Elle ne cachait en aucune façon le mépris qu'elle portait à son aînée. Et l'infirmière ne s'en offusquait pas le moins du monde. Si elle devait faire attention à l'avis de tous les petits qui défilaient dans cette pièce, elle ne s'en sortirait pas. Un long frisson parcourut sa colonne vertébrale en écoutant la mésaventure de l'adolescente. Elle avait vu aussi horrible qu'elle et très probablement la mort. L'ancienne serdaigle ne se demanda pas une seconde s'il s'agissait d'une déformation de son inconscient ou la réalité. L'important était ce qu'elle croyait, ce qu'elle ressentait et ce qu'elle avait vécu, et non la vérité. Du moins pas pour le moment. Pour quelqu'un qui ne voulait pas causer et encore moins se confier à elle, elle s'avérait bien bavarde. Quelque part, elle se revoyait en elle, pas entièrement bien sûr. Mais elle parvenait à voir quelques similitudes entre elles, comme l’opiniâtreté, une lucidité toute relative et une rage grandissante.
Ebony regarda la verte s'approcher d'un lit le plus éloigné possible de l'entrée et s'installer sur le bord du matelas avec nonchalance. Donc malgré toute sa mauvaise volonté, elle rendait enfin les armes et acceptait de lui faire face. C'est la tournure que semblait prendre la situation en tout cas, même si elle en doutait très sérieusement. Elle se mordit la lèvre inférieure quand Dawn prononça la question fatidique. Que lui voulait-elle ? Tout et rien ! Tant de choses. Elle voulait s'assurer qu'elle allait bien. Et la pression qui planait sur ses épaules depuis le début commençait à avoir un poids considérable. Les Blackwood tenaient à leur progéniture, mais seulement de manière stratégique. Du moins, c'était ainsi qu'elle percevait les choses. Elle poussa donc la petite table vers Dawn et déposa le plateau sur la table de chevet juste à côté. « Votre café.» Se contenta-t-elle de dire avant de prendre une chaise pour faire face à la jeune sorcière. Après quelques secondes de silence, elle ajouta brièvement dans un sourire rassurant : « Vos camarades en raffolent, j'espère que ça vous conviendra aussi. » Elle indiqua d'un mouvement de menton les gâteaux et posa sur ses genoux ses petites mains. Il était inutile de préciser que ces sablés n'étaient pas empoisonnés. Elle ignorait pourquoi, mais certains s'étaient déjà posé la question. Pourquoi diable une infirmière essayerait-elle de faire du mal à des enfants ? Sérieusement, je vous le demande ! « Plusieurs raisons m'ont poussé à vous conduire ici. Je peux vous les dénombrer si vous voulez : mon entêtement à bien faire les choses, le vôtre aussi, mon travail, la santé de chacun de mes élèves, ma nature inquiète. Je crois que toutes ces raisons sont plutôt évidentes n'est-ce pas ? » Elle arqua un sourcil et posa sur Dawn un regard entendu. Elle désirait que les choses soient claires dés le début. Elle n'était pas son ennemie et encore moins son adversaire. Évidemment dans le cas de cette dernière, il y avait d'autres justifications et Ebony allait les lui donner. Enfin au moins l'une d'elles. « Des personnes s'inquiètent pour vous. Vos professeurs ainsi que vos parents. Je ne vais pas vous le cacher, ils ont déjà envoyé à Poudlard des lettres pour savoir comment vous vous portiez. Mais que leur répondre quand nous ne le savons pas ? Vous n'avez aucune idée du courrier que je reçois. Mais celui des parents inquiets n'est pas le seul. » Elle avait tenu à recevoir tous les dossiers des adolescents qui avaient fait un petit séjour à Saint Mangouste. Évidemment, cela s'était avéré une tâche plus que difficile. Elle avait dû se battre pour obtenir les informations. Certains parents avaient autorisé ceci. De toute façon, il était logique qu'elle travaille avec l'hôpital pour continuer à apporter les soins nécessaires, etc.« Je travaille encore avec Saint Mangouste. Et j'ai appris que vous aviez refusé les soins des médicomages, même des plus brillants. » L'informa t-elle. Elle marqua volontairement une pause. Sans faire preuve de froideur ou de sévérité, elle était tout à fait sérieuse. Elle n'avait aucun intérêt à insulter son intelligence. « Je peux au moins savoir pourquoi ? » Demanda-t-elle finalement.
Elle tendit les bras en avant comme pour s'étirer et passa sa main droite dans ses cheveux courts. Tiraillée entre découragement et ennui, Ebony commençait à se dire que Dawn ne finirait jamais par comprendre. Elle souhaitait d'une certaine manière lui montrer qu'elle n'avait pas à se sentir seule. Aussi elle ne put s'empêcher de se dire qu'elles allaient finir par tourner en rond. Toutes deux campaient sur leurs positions et n'entendaient l'autre. Malheureusement, la jeune fille avait en grande partie tord. Ignorer ses lettres avait été particulièrement stupide de sa part. Et la question la taraudait encore et encore : comment avait-elle pu lui faire ça ? Ce manque flagrant de respect était quelque chose de particulièrement désagréable à remarquer. Et Ebony était au fond blessée dans son orgueil peut-être. On ne lui reprochait pas son dévouement. Plus encore, on le saluait. « Bon. » Prononça t-elle malgré elle. C'était simplement une marque de réflexion. Et elle songeait revenir au sujet précédent. « Vous savez Dawn... se tenir à l'écart des autres n'est bon pour personne. On dit bien souvent qu'il vaut mieux être seul que mal accompagné. Seulement, la vie, ce n'est pas que se protéger et s'enfermer dans sa coquille. Se limiter à deux ou trois personnes de confiance, c'est bien, mais il faut aller voir les autres. Comment comptez vous avancer dans la vie si vous ne connaissez pas les déceptions, les joies d'adolescente, les premières amours ou les douleurs ? Ca ne devrait pas arriver à qui que ce soit de devoir grandir trop vite. » Parce que c'était à peu près ça non ? Dawn, elle parlait déjà comme une adulte. Elle se comportait comme telle. Elle portait sur la vie un regard distant et mature. Mais dans sa force se dissimulait une grande faiblesse. Ebony ne la voyait pas. Elle la devinait. A travers son fermement à la discussion et aux soins, mais aussi aux autres. Peut-être avait-elle peur de souffrir, de ses parents (?) ou d'autres choses encore. L'infirmière essayait le moins possible de la psychanalyser. « La vie, c'est pas comme le magicobus. On ne rencontre pas des gens par hasard. » C'est ce que sa mère lui avait toujours dit "il fallait provoquer les rencontres", "être le maître de son destin" et surtout "ne pas attendre que les choses nous tombent tout cuit dans le bec". Et Ebony le pensait sincèrement. Elle secoua ensuite la tête de droite à gauche comme pour chasser ces idées de son esprit. « Si sur le plan moral, je ne peux pas vous aider. Je suis probablement la personne la mieux placée dans l'immédiat pour atténuer les douleurs physiques. » Elle ne se leva pas, préférant la convaincre du bien-fondé de sa proposition avant de récupérer les diverses potions qu'elle avait en tête. Ce n'était rien de bien méchant ou de dangereux. Et même si elle n'en voulait pas, au moins Ebony pourrait être "fière" d'avoir au moins proposé son aide. Et si après tout cela, elle refusait encore catégoriquement sa main tendue, alors que grand bien lui fasse. Elle n'allait pas en mourir non plus. Elle souhaitait juste être certaine d'avoir tout tenté. « Et ne me dites pas que vous allez bien. J'ai suffisamment étudié la médicomagie pour connaitre les dégâts d'un doloris. » Elle ne se laisserait pas avoir et ne se contenterait pas de "tout va bien" ou "ça peut aller". Non, non et non ! Elle n'était ni idiote ni égoïste. Certains succombaient à la douleur, d'autres à la folie. Certains n'en dormaient plus. D'autres encore avaient presque envie d'en mourir. Et Ebony n'en doutait pas une seconde. Dawn avait probablement des balafres comme d'autres élèves victimes cette nuit-là ! « Je peux vous fournir quelques anti-douleurs sommaires qui rendront la souffrance supportable si jamais elle rejaillit. J'ai aussi une pommade qui permettrait d'atténuer un peu les cicatrices si vous en avez comme certains de vos camarades. Et autre chose, vous semblez crevée. Vous arrivez à dormir un peu ? Je peux vous donner des flacons de philtres de paix, ça vous aiderait. » Elle ne lâchait rien. C'était son rôle de toute façon et ça Dawn ne pouvait pas le réfuter. C'était comme dire que Dumbledore n'était pas compétent pour gérer une école ou que les gobelins gardaient vraiment mal les coffres de Gringotts.
L'infirmière n'avait pas répondu à ses questions, elle les avait survolées avec naturel, les évitant souplement avec un détachement qui aurait presque pu passer inaperçu si Dawn n'avait pas su à quel point les réponses auraient pu se révéler délicates. Quelque part, elle-même ignorait si ses interrogations avaient été réelles ou plus rhétoriques, ou si elle souhaitait véritablement entendre les réponses que Miss Lancaster pouvait lui donner. Elle n'avait pas pensé à ce que la sorcière pouvait avoir à déclarer. En soit, ces questions n'avaient été que des provocations lancées dans l'objectif de montrer qu'elle n'était pas dupe, qu'elle était bien conscience de l'image négative que l'infirmière devait avoir d'elle. Cependant, l'héritière ignorait si cette idée la blessait ou si elle s'en fichait complètement. Ebony lui avait montré qu'elle n'hésitait pas à faire preuve d'autorité et de fermeté, qu'elle n'accepterait pas l'attitude hostile à peine voilée de la verte. Et une curiosité quelque peu malsaine poussait Dawn à se demander si l'infirmière, d'habitude si agréable, irait jusqu'à formuler devant elle le mépris qu'elle semblait lui porter. Ou si, au contraire, elle enroberait la vérité de jolis mensonges ou de petites altérations de la réalité afin de l'adoucir. Elle avait voulu la faire réagir, la pousser dans ses retranchements. La défier à avouer à haute voix ce qu'elle semblait penser tout bas, mais Ebony avait choisi de ne pas répondre à ses provocations. Elle avait choisi la voix de la sagesse, sûrement avait-elle été répartie parmi les aigles durant sa scolarité à Poudlard. Et c'était certainement mieux ainsi. Cette rencontre forcée était assez difficile à gérer et à vivre pour les deux sorcières, elles n'avaient pas besoin d'empirer les choses. Dawn la regarda s’affairer dans le plus grand des silences, acceptant sans mutisme face à ses questions. « Vous imaginez bien que je ne laisse pas des bouteilles d'alcool à mon infirmerie. Je tiens bien trop à mon travail pour risquer de le perdre. » Un léger sourire s’esquissa sur les lèvres de la vipère. L’infirmière était décidément bien trop sage et apte à suivre les règles. Dawn comprenait ses choix, la sagesse était la voie du confort après tout, de la sécurité. Mais l’héritière avait toujours préféré prendre des chemins plus escarpés, jouer selon les règles était bien trop ennuyant à ses yeux. Elle ne cherchait pas forcément à les enfreindre sciemment, mais elle préférait mettre du piquant dans sa vie. Aussi s’autorisa-t-elle un petit coup d’œil, sourcil haussé, en direction de la sorcière. « Dommage, je sais garder un secret. » Lança-t-elle d’une voix faussement innocente qu’elle accompagna d’un léger haussement d’épaule. Ça pour garder un secret, elle était douée, Dawn. Elle en cachait des choses au monde. À commencer par sa famille, ses relations avec ses géniteurs, mais surtout son dégoût face aux idées de supériorité des sang-pur, la révolte qui grondait en elle depuis l’attaque du village. Et bien sûr, elle-même, c’était ça son plus grand secret, celui qu’elle cachait -protégeait- depuis toujours, son véritable visage. Elle était tellement douée pour garder les lèvres scellées, que depuis plus de 17 ans, rares étaient ceux qui avaient pu deviner la vérité. Une véritable fierté. Un terrible fardeau.
« Vos camarades en raffolent, j'espère que ça vous conviendra aussi. » La voix de l’infirmière sortie la verte et argent de ses pensées. Elle n’avait pas vraiment prêté attention à ses dernières paroles et se demanda un instant à quoi elle faisait référence en parlant des goûts de ses camarades. Un coup d’œil autour d’elle lui permit de comprendre que l’infirmière parlait des petits gâteaux qu’elle avait apporté près du lit sur lequel elle s’était assise. Sur une petite table reposaient maintenant une tasse de café bien chaud et une assiette de sablés. Dawn adressa un rapide remerciement à la jeune femme et se saisit de la boisson, doutant que son estomac noué n’accepte autre chose que du liquide. Elle avala une gorgée du liquide corsé et enroula ses doigts pâles autour de la tasse avant de reporter son attention vers l’infirmière. « Plusieurs raisons m'ont poussé à vous conduire ici. Je peux vous les dénombrer si vous voulez : mon entêtement à bien faire les choses, le vôtre aussi, mon travail, la santé de chacun de mes élèves, ma nature inquiète. Je crois que toutes ces raisons sont plutôt évidentes n'est-ce pas ? » Elle ne répondit pas, c'était inutile. L'infirmière avait autant de raison de l'avoir traîné jusqu'ici que Dawn en avait eu d'ignorer ses hiboux. En vérité, elle aurait certainement dû se fendre au moins d'une réponse négative, mais elle était bien trop bornée pour le reconnaître et désormais, cette convocation forcée semblait une punition à ses yeux. Un moyen pour la Miss Lancaster de prouver qu'elle aussi pouvait se montrer tenace. « Des personnes s'inquiètent pour vous. Vos professeurs ainsi que vos parents. Je ne vais pas vous le cacher, ils ont déjà envoyé à Poudlard des lettres pour savoir comment vous vous portiez. Mais que leur répondre quand nous ne le savons pas ? Vous n'avez aucune idée du courrier que je reçois. Mais celui des parents inquiets n'est pas le seul. » Le regard de la verte se fit glacial l'espace d'une seconde avant qu'elle ne le détourne en retenant de justesse une exclamation dédaigneuse. Faire allusion à sa famille revenait à s'engager sur un terrain particulièrement glissant. Elle ne supportait pas qu'on l'interroge sur sa famille et encore moins sur la relation compliquée qu'elle entretenait avec ses géniteurs. C'était comme lui jeter en pleine figure tous les manques dont elle souffrait au quotidien. Elle aurait pu trouver l'infirmière bien naïve de prendre les courriers de ses parents pour de l'inquiétude, mais bien sûr celle-ci ignorait tout des Blackwood et elle était certainement loin de s'imaginer avec quel mépris ils traitaient leur enfant. Dawn pouvait comprendre les préoccupations du corps enseignant, après tout le professeur de botanique l'avait bien aidé ce soir-là. Mais celles de ses parents ne la trompaient pas. Ils ne s'inquiétaient pas pour elle, ils lui avaient bien fait comprendre à quel point ils désapprouvaient son comportement lors de l'attaque, elle aurait dû laisser le champ libre aux mangemorts au lieu de s'interposer aussi stupidement. Quelle honte ses actions représentaient pour les sang-pur. Leur inquiétude allait pour leur image, si lisse et menaçante, qu'ils préservaient avec le plus grand soin et que leur indomptable enfant s'acharnait à malmener. Elle était là leur préoccupation, s'assurer que Dawn tenait sa langue, que ses blessures étaient toujours inconnues de tous pour que personne ne puisse remettre en cause l’allégeance des Blackwood. Dawn aurait presque pu trouver ça risible, si ça ne la rendait pas autant malade. Elle secoua lentement la tête de dépit, se fichant bien des questions que sa réaction pouvaient provoquer chez l'infirmière.
« Je travaille encore avec Saint Mangouste. Et j'ai appris que vous aviez refusé les soins des médicomages, même des plus brillants. » Et voilà, elles y étaient. Dawn se doutait bien qu'Ebony n'aurait pu passer à côté de son refus de laisser les médicomages la soigner. L'infirmière l'avait très certainement appris par ses géniteurs, cependant, ils avaient dû taire que c'était uniquement une fois au manoir que Dawn avait commencé à repousser les médecins. Tout de même, l'étudiante pensait bien que les nombreux refus qu'elle avait infligé aux médicomages devaient avoir fini par faire le tour de Sainte-Mangouste. Niveau potins, les couloirs d'un hôpital pouvaient être comparés à ceux d'une école. Et elle avait dû en heurter des égos surdimensionnés. Cependant, un détail était important aux yeux de l'héritière. « Je n'ai pas refusé les soins à Sainte-Mangouste. » Argua-t-elle lentement. Elle jeta un coup d’œil à sa vis-à-vis par dessus sa tasse fumante. « Je les ai refusé chez moi, mais je suppose que mes parents, si inquiets et débordants d'amour, n'ont pas jugés utile de vous le préciser. » Elle ne cherchait plus à la provoquer, elle comprenait que c'était inutile, Ebony ne rentrerait pas dans son petit jeu, et, de toute manière, si elle allait trop loin, elle s'en mordrait les doigts. Mais elle n'était pas comme ça, et cette simple idée la répugnait. Alors, elle devait regarder les choses en face et accepter de ne pas pouvoir avoir le dessus cette fois. Mais ça ne voulait pas dire qu'elle devait laisser Ebony se faire berner par les jolies paroles des Blackwood. « Je peux au moins savoir pourquoi ? » Dawn releva la tête. Elle s'était demandé si l'infirmière allait oser poser cette question qui devait brûler les lèvres de bien des sorciers, au risque de raviver les tensions. C'était là la question à milles gallions, celle que tant de gens souhaitaient pouvoir poser à la sorcière sans encourir de représailles. Pourquoi. Pourquoi était-elle si froide et distante ? Pourquoi ne jouait-elle pas les bourreaux comme la plupart de ses camarades ? Pourquoi avait-elle l'impression de ne jamais pouvoir être elle-même ? Dawn avait parfois le sentiment d'ignorer les réponses à ces interrogations. Pourtant, au lieu de son habituel silence méprisant, elle choisit de répondre à Ebony. « Parce que c'était la seule chose que je pouvais maîtriser. » Lança-t-elle d'une voix étonnement calme, comme s'il s'agissait d'une évidence que l'infirmière aurait dû deviner. « On m'a imposé de quitter l'hôpital, ce n'était pas ce que je voulais. » Continua-t-elle, non sans amertume. Encore une fois, ses parents lui avaient imposé leur volonté. Ce que les autres pouvaient prendre pour une preuve d'inquiétude, n'était en réalité qu'un nouveau tour de force de leur part. Malgré sa majorité révolue, elle n'avait rien pu faire, elle n'en avait pas eu la force après l'attaque de toute façon. Les Blackwood obtenaient toujours ce qu'ils voulaient, peu importaient les moyens à mettre en place. Ils avaient le bras long, un coffre prêt à débordé à Gringott et ce genre de pouvoir que nul ne remettait en cause. Alors faire sortir Dawn de Sainte-Mangouste n'avait été qu'une formalité et les protestations de leur enfant avaient été vaines. Poussée par l'amertume, elle reprit la parole. « Mais il était inimaginable qu'une sorcière de mon sang se fasse soigner au milieu de tous ces sangs-impurs, ou pire, par l'un d'entre eux. » Elle était là la vérité. Dawn ne voulait pas qu'Ebony la prenne pour une ingrate qui n'appréciait pas les attentions de sa famille, elle semblait déjà avoir une image assez négative d'elle comme ça, mais elle devait voir les choses telles qu'elles étaient. Froides et calculées. Elle devait ouvrir les yeux, même si pour quelqu'un qui prônait la tolérance, c'était une épreuve. De toute manière, les idéaux des Blackwood n'étaient un secret pour personne, même si peu savaient à quel point ils étaient sombres. « Vous êtes une bonne infirmière, je ne dis pas le contraire, mais j'imagine que la seule raison pour laquelle mes parents se sont décidés à faire appel à vous, c'est qu'ils ne supportent pas que je guérisse à la moldue. » Conclut-elle dans un petit sourire désabusé. Ebony était même une très bonne infirmière, Dawn pouvait l'affirmer sans problème, elle l'avait déjà soignée plusieurs fois après des matchs de quidditch ou des disputes qui avaient mal tournées, elle savait que le travail de la sorcière était irréprochable, et qu'en plus, elle faisait preuve d'une empathie qui, si elle charmait les autres élèves, ne lui plaisait pas toujours. Mais c'était un fait, Miss Lancaster était douée dans ce qu'elle faisait, et si Dawn avait confiance en son travail, ce n'était certainement pas le cas de ses parents. Trop obnubilés par la nature du sang de l'infirmière, ils n'accepteraient jamais de reconnaitre qu'elle pouvait être parfaitement compétente pour soigner leur fille. Alors, avoir fait appel à elle était une preuve que, pour une fois, Dawn avait réussi à les mettre au pied du mur. La seule chose pire que d'accepter l'aide d'une sang impur était de s'abaisser aux méthodes moldues. Et c'était exactement ce que la verte avait fait. Elle avait bien conscience de sa provocation et de la colère qu'elle avait provoqué chez ses géniteurs. Ils auraient pu la forcer à accepter les soins, agir pendant son sommeil, user d'un simple sort ou d'une potion, mais ils n'en avaient rien fait et c'était déjà une victoire en soit.
D'un geste, la Serpentarde reposa sa tasse presque vide sur le plateau devant elle et passa ses mains dans ses cheveux pour ôter les mèches qui barraient son visage. Un rapide coup d’œil à l'horloge sur le mur lui permit de constater que son cours de métamorphose touchait à sa fin. Elle lâcha un petit soupir, c'était son cours favori, celui dans lequel elle excellait le plus, et elle en était privée par cette rencontre forcée qui lui semblait toujours aussi superficielle. Jusqu'à maintenant Ebony ne devait pas avoir obtenu beaucoup de réponses qui seraient satisfaisantes aux yeux des Blackwood. D'ailleurs, leur transmettre les dernières paroles de Dawn relèverait plus du suicide, nul doute que les parents de l'étudiante n'apprécieraient pas de lire de telles accusations. La verte se demandait quand l'infirmière allait l'interroger au sujet de ses blessures, si elle avait été en contact avec les médicomages de Sainte-Mangouste, elle devait savoir quels genres de sorts l'avaient touchés. Et quelles traces elle pouvait encore porter. Mais ce ne fut pas ce sujet qui résonna dans le silence de la pièce. « Vous savez Dawn... Se tenir à l'écart des autres n'est bon pour personne. On dit bien souvent qu'il vaut mieux être seul que mal accompagné. Seulement, la vie, ce n'est pas que se protéger et s'enfermer dans sa coquille. Se limiter à deux ou trois personnes de confiance, c'est bien, mais il faut aller voir les autres. Comment comptez-vous avancer dans la vie si vous ne connaissez pas les déceptions, les joies d'adolescente, les premièrs amourse ou les douleurs ? Ça ne devrait pas arriver à qui que ce soit de devoir grandir trop vite. La vie, c'est pas comme le magicobus. On ne rencontre pas des gens par hasard. » Ebony pensait-elle donc avoir à faire à un cœur de pierre ? Que Dawn ne ressentait rien ? Qu'elle n'était qu'une marionnette vide, seulement capable de froideur et d'arrogance ? C'était un constat bien terne, mais la Serpentarde le balaya en un instant. Ce n'était qu'une preuve de plus que l'infirmière ne la connaissait pas. Oh, elle essayait, elle pouvait lui accorder ça, elle ne manquait pas de bonnes volontés face au regard sombre de l'héritière. Elle faisait certainement de son mieux, mais, comme beaucoup, elle se trompait sur le compte de Dawn. Ce n'était pas parce que l'étudiante s'appliquait à repousser les autres qu'elle ne connaissait pas les joies et les déceptions. Le problème, c'était que le nombre de ses déceptions dépassait celui de ses joies et que ça avait façonné son comportement au fil du temps. Elle posa son regard ambré sur Ebony. « Vous voulez dire une cour d'hypocrites ? Très peu pour moi. Vous savez à quel point c'est difficile de se faire des amis quand on porte un nom de famille comme le mien ? Les gens vous regardent soit avec peur soit avec envie, très peu arrivent à voir plus loin. Alors, croyez-moi, je m'en sors très bien avec les quelques amis que j'ai. » Cette conclusion, elle l'avait fait très tôt après son entrée à Poudlard, quand elle portait encore attention aux murmures que son nom de famille provoquait. Elle n'avait jamais cherché l'admiration des autres élèves, voir un groupe de jeunes sorciers se battre pour obtenir ses faveurs, elle trouvait ça ridicule. C'était avec ce genre d'hypocrisie que l'on finissait une baguette plantée dans le dos. Quant à l'appréhension des autres, elle n'en avait que faire. Elle songea à la trahison d'Elias, il avait certainement été celui qui lui avait fait le plus de mal. Il avait été son premier petit ami, sa première véritable relation. Mais aussi, et surtout, le premier à lui avoir piétiné le cœur. Il avait voulu se servir d'elle, de son nom et des relations qui y étaient liées, il avait fini par sceller le masque de froideur qui était désormais le sien. Malgré son jeune âge, elle s'était promis de ne plus jamais laisser les autres la blesser. Alors, certes, elle avait peu d'amis -Sienna était peut-être même la seule à correspondre parfaitement à cette définition- mais au moins elle pouvait leur faire confiance. Et ça lui convenait ainsi, même si elle doutait qu'Ebony partage sa vision des choses. « Pourquoi devrais-je faire des efforts pour aller vers les autres ? La plupart des élèves de cette école me détestent avant même de me connaître. » Conclut-elle avec un nouvel haussement d'épaule. Elle savait très bien ce qu'il se disait à son sujet. Elle aurait voulu ne rien en avoir à faire, mais la vérité était que les choses étaient un peu plus compliquées que cela. « Vous allez peut-être me trouver dure ou amère, mais vous ne pouvez pas dire que je me trompe. Je suis sûre que vous avez entendu beaucoup de choses négatives sur moi et je ne vous croirais pas si vous me disiez que cela n'a pas altéré votre jugement ne serait-ce qu'un peu. » Un haussement de sourcil vint ponctuer ses paroles. En tant qu'infirmière de l'école de magie, Ebony était au centre de son fonctionnement, elle devait entendre beaucoup de choses sur les élèves qui peuplaient Poudlard, à la fois de la part des étudiants et des professeurs. Alors Dawn ne se faisait pas d'illusion sur ce qu'elle avait entendue sur son compte et ce qu'elle en avait pensé. L'infirmière avait beau être agréable et avenante, elle ne pouvait pas avoir eu un regard complètement neutre à son égard. La verte jouait le détachement, mais une part en elle ne pouvait s'empêcher de se demander quelle image d'elle les autres avaient pu lui donner avant leur premier vrai contact, avant qu'elle ne prenne sa plume pour lui écrire.
« Si sur le plan moral, je ne peux pas vous aider. Je suis probablement la personne la mieux placée dans l'immédiat pour atténuer les douleurs physiques. » Enfin le sujet principal de cette entrevue était abordé, seulement, la Serpentarde ne savait pas si le pire était passé ou à venir. « Et ne me dites pas que vous allez bien. J'ai suffisamment étudié la médicomagie pour connaitre les dégâts d'un doloris. » Détournant le regard, Dawn pinça les lèvres, elle n'avait aucune envie de se voir rappeler les souffrances sans nom que le sortilège lui avait infligé, encore moins l'impuissance qu'elle avait ressentit à ce moment-là. Les seules personnes à qui elle avait accepté de parler de ses blessures et de les montrer étaient Sienna et Elwan. Elle comprenait maintenant que pour pouvoir sortir de l'infirmerie, elle allait devoir accepter de mettre sa fierté et son arrogance de côté pour montrer à Ebony les traces que l'attaque avait laissé sur elle. Elle soupira, au fond, c'était sûrement mieux comme ça, au moins l'infirmière pourrait attester que ses cicatrices se portaient bien et qu'elle ne risquait plus rien. Ce ne serait pas de gaieté de cœur, mais si elle le lui demandait, Dawn accepterait certainement de dévoiler ses blessures. « Je peux vous fournir quelques anti-douleurs sommaires qui rendront la souffrance supportable si jamais elle rejaillit. J'ai aussi une pommade qui permettrait d'atténuer un peu les cicatrices si vous en avez comme certains de vos camarades. Et autre chose, vous semblez crevée. Vous arrivez à dormir un peu ? Je peux vous donner des flacons de philtres de paix, ça vous aiderait. » La Serpentarde la regarda en silence, surprise. Elle s'attendait à être examinée de part en part, à être interrogée sur les sorts qu'elle avait reçu. Mais pas à ça. Les sourcils froncés, elle releva le regard vers la jeune femme. En tant qu'infirmière, ne souhaitait-elle pas examiner ses cicatrices ? S'assurer que la guérison se passait bien ? Une moue s'afficha sur les traits de la verte et elle finit par décider de ne pas y porter attention, Miss Lancaster avait certainement ses raisons d'agir ainsi et ses blessures allaient bien. Elle pencha la tête en arrière quelques secondes, le temps de réfléchir à sa réponse. Elle hésita, avant de finalement briser le silence qui s'était installé. Si elle continuait à se taire ainsi, l'infirmière allait croire qu'elle se braquait toujours. Mais le fait était que son comportement la désarçonnait et sa volonté farouche à l'aider la laissait perdue. Elle n'était pas vraiment habituée à être la cible de tant de sollicitude. « Ce n’est pas que je ne dors pas… C’est que mes souvenirs reviennent pendant mon sommeil. Mais je ne veux pas prendre de philtre de paix. Ces potions ne feraient que me plonger dans le brouillard, il faut que je me souvienne de ce qu’il s’est passé. Pour que ça n’arrive plus. » Elle laissa ses yeux se promener sur ses mains, pour elle, un filtre de paix n'était pas la solution. Elle voulait se souvenir, de sa faiblesse et des horreurs. Pour que plus jamais elle n'y cède. Elle était très dure avec elle-même, Dawn, mais c'était tout ce qu'elle connaissait. Sans y prêter attention, son doigt parcouru la fine cicatrice qui dépassait de sa manche pour courir sur son poignet droit. La seule qui était visible à ceux qui y prêtaient attention. Une seconde, elle oublia la présence d'Ebony à ses côtés, puis elle revint à la réalité. « En revanche, je veux bien une pommade pour les cicatrices. Je ne dis pas que je l’utiliserai tout de suite, mais ça viendra. » Elle hocha lentement la tête, distraitement, comme si elle se parlait à elle-même. Un jour, les cicatrices disparaitront, mais pour le moment, elles lui rappelaient qu'elle devait être forte. Aussi difficile que ce soit.
(c) sweet.lips
Ebony M. Lancaster
+ SORCIER DEPUIS LE : 05/10/2014 + PARCHEMINS : 502
La lâcheté, c'est un peu une seconde nature universelle. Plus nos sociétés s'organisent, plus on a peur de faire des choix. Alors on a éliminé le choix. Il nous reste le mot...
L'infirmière de Poudlard prenait très à cœur son rôle dans cet établissement. Elle savait depuis toujours qu'il ne fallait pas uniquement traiter les plaies, mais la personne elle-même. Chaque être humain était différent de son voisin et faisait preuve d'une telle complexité qu'elle pouvait très probablement écrire deux ou trois bouquins de psychologie. Toutefois, durant ses études à Saint Mangouste, elle n'avait fait que survoler ce pan de la médicomagie. Quelques fois, elle avait eu l'occasion de travailler au service de pathologie de sortilèges avec quelques cas assez graves de déviance. Mais ce quelques expériences ne faisaient pas d'elle une experte dans ce domaine. Et peut-être était-ce même mieux ainsi. Un psychomage saurait parler à la jeune serpentard avec plus de tact, de délicatesse et surtout de diplomatie qu'elle. Aussi sympathique et honnête soit-elle, elle s'adressait à Dawn de manière peut-être un peu trop abrupte et lunatique. En soit, Ebony était lunatique. Il lui arrivait quelques fois de passer d'une émotion à un autre, mais ça n'avait rien de particulièrement symptomatique ou même de flagrant. Et la jeune femme en déroutait toujours plus d'un. Aussi, elle se montra sévère et autoritaire, et à l'instant d'après, elle lui proposait café corsé et sablés. Pas de doutes, elle savait comment s'y prendre pour perdre les autres en cours de route. Néanmoins, Ebony choisit enfin de jouer la carte de la franchise. Elle entama donc un long exposé qui mena rapidement à une question qui la taraudait depuis le début - qui quelque part devait aussi embêter les parents de cette dernière. Le refus des soins s'avérait plutôt inquiétant aux yeux de l'infirmière. Les raisons qui poussaient à une telle attitude échappaient complètement aux gens. Alors oui, cela demandait quelques explications. Et au moins de cette manière, elle trouverait un os à filer aux Blackwood à ronger en attendant d'avoir des informations supplémentaires. Elle écrirait de sa belle écriture soignée une longue missive et pourtant sans éléments probants. Juste de quoi les occuper. Et pour l'instant, elle ne s'y intéressait pas plus que ça. Dawn la corrigea aussitôt. Ebony planta alors son regard dans les yeux de l'adolescente. Pas à Saint Mangouste, mais chez elle. Cela changeait de suite l'angle d'approche. Les médicomages avaient donc sûrement eu le temps de refermer les plaies. Voilà une bonne nouvelle. Bon maintenant, elle devait trouver un moyen de savoir si elle cicatrisait bien et de participer à cette guérison. Et ce sans pour autant la braquer davantage. Quel drôle de challenge. Elle allait s'en mordre les doigts à la fin. Ruser, elle n'aimait pas ça.
Elle ouvrit la bouche et ses lèvres formaient un O parfait, montrant à merveille l'état de surprise dans lequel elle se trouvait. Honnêtement, elle n'imaginait pas obtenir une réponse aussi rapidement et facilement à sa requête. Ce qu'elle lui dit ne la satisfaisait pas des masses en fait. Visiblement la serpentard appréciait l'idée d'avoir un contrôle tout relatif sur les événements. Elle se mordilla la lèvre inférieure en réalisant petit à petit l'envers du décor. Même si elle se doutait depuis longtemps que les Blackwood n'étaient pas des êtres aussi respectables qu'ils voulaient le faire croire, elle n'en entrevoyait toute l'ampleur qu'à présent. Concrètement, elle désapprouvait les méthodes archaïques des sang purs qui exigeaient d'imposer des choix à leurs enfants ou tout autre chose dans ce goût-là. Elle écouta avec attention la suite des propos de la jeune fille. D'une certaine manière, elle apprenait plus à écouter qu'en lisant des vieux bouquins. Parfois le terrain apportait plus que les études si on pouvait qualifier les choses ainsi. Oh ça Bony pour avoir lu, gratté ses cours sur parchemin, ça elle avait toujours été la première. Ses doigts en gardaient encore les séquelles. « Vous savez, cela m'étonne qu'à moitié. » Reconnut-elle même si prononcer ces mots lui hérissaient le poil. « Mais je ne leur en veux pas plus que cela de me considérer comme une sang impur. Disons que cela m'attriste autant pour vous que pour moi. » Grandir dans une telle baraque lui semblait presque impossible. De son côté, son éducation se voulait libérale et humaniste. Comme les appelleraient les moldus, ses parents étaient de véritables hippies, des peace and love. Faites l'amour et pas la guerre, un dicton faisait presque office de devise chez les Lancaster. Bêtement, quand des sorciers se confrontaient à de tels individus, ils se croyaient sur une autre planète. « Je serais bien tentée d'envoyer bouler vos parents, mais je pense que ce serait contre productif. » Autant dire les choses comme elle le pensait. Elle s'essayait à la franchise "directe", pas toujours facile dans sa situation. « Donc que voulez-vous que je leur dise ? Vous ne tenez pas à ce que je leur révèle ce que vous venez de me dire. Et je suis certaine que cela vous arrangerait dans une certaine mesure qu'ils apprennent uniquement le strict minimum. » Elle marqua une pause, se jugeant plutôt arrangeante sur ce coup-là. Elle se doutait que Mr et Mrs Blackwood chercheraient un autre moyen si jamais ce qu'elle leur répondait ne leur suffirait pas. « A vous de déterminer ce strict minimum. Enfin si vous l'acceptez. » Plus elle y réfléchissait, plus elle songeait que ce marché était honnête. Elle en avait marre de recevoir des lettres, de courir après Dawn. Elle avait d'autres hippogriffes à fouetter.
Vint ensuite sur le tapis l'image que Dawn renvoyait d'elle aux gens qu'elle croisait dans les couloirs. Un rictus ironique tira les lèvres de l'ancienne serdaigle. Désabusée par la réponse presque prévisible de la collégienne, elle demeura silencieuse tout le long. Elle l'observait de ses grands yeux bruns. Elle se balança légèrement de droite à gauche, relativement agacée d'être la réceptrice de paroles aussi blasées et radicales. Elle n'acceptait pas cette vision des choses et ce malgré les déceptions qu'elle avait elle-même traversé durant son adolescence. Elle ne savait pas trop comment réagir : pleurer, rire, faire l'indifférente, essayer de la convaincre du contraire. Aucune de ces options ne lui plaisait réellement. Elle la regarda encore longuement avant de prendre la parole à son tour : « Bien-sûr qu'on dit des choses sur vous. » Ah bah voilà quelque chose de clair et de sympathique à entendre en tout cas. Mais elle ne confirmait seulement les doutes de cette dernière. « Mais vous êtes bien loin d'être la seule. Tenez l'autre jour, un élève est arrivé la bouche en cœur pour me demander "c'est vrai que vous êtes lesbienne ?" Apparemment, Peeves a répandu une rumeur qui disait que je sortais avec une collègue. Non mais vraiment. » Elle essayait de banaliser les potins, les préjugés pour rendre leur discussion plus légère. Elle voulait aussi lui montrer quelque part qu'elle n'était pas la seule. Surtout qu'une infirmière aussi charmante, forcément ça faisait jaser. Elle se gratta le front tout en réfléchissant à sa tactique. « Ce que j'ai appris depuis mes 14 ans. C'est que les adolescents, surtout les plus jeunes sont toujours méchants, jaloux. Disons que l'adolescence est l'âge ingrat. Heureusement, les gens s'améliorent avec l'âge. Je crois sincèrement que les gens peuvent changer. Rien ne reste figé. Ce serait trop simple sinon, vous vous doutez bien. Le truc, c'est que lorsqu'on se ferme à seulement quelques personnes et qu'on voit tout le monde comme des êtres hypocrites, on finit toujours par être déçus des autres. » Elle marqua une pause et se permit de prendre un sablé. Elle le cassa en deux et poursuivit toujours sur le même ton : « Et c'est justement lorsqu'on s'y attend le moins qu'on rencontre une personne différente. Elle nous surprend, en bien j'entends. Et hop, on finit peu à peu à lui faire confiance. Je ne vous donne pas tord. Je veux juste dire que pour ces petites perles, ça vaut le coup de montrer qui on est vraiment à la phase du monde. » Satisfaite de cette conclusion, elle choisit d'en finir là sur le sujet pour le moment.
Et elle apporta enfin son attention sur un sujet épineux : les cicatrices. La braquer davantage ? Elle s'y refusait complètement. Elle ignorait encore comment s'y prendre. Mais elle avait désormais en sa possession quelques clefs. Et tout en parlant, elle détaillait Dawn, cherchant quelques indices. De toute évidence, ses propos la rendaient nerveuse si bien qu'elle s'en prenait à son poignet droit. Ebony ne put s'empêcher de le remarquer. Elle avait l’œil vif, un œil de lynx en quelques sortes. Elle savait que si les plaies étaient encore ouvertes, la pauvre ne tiendrait pas debout, ou alors elle tituberait. A moins d'avoir l'habitude. Mais ça Ebony en doutait. Dawn ne ressemblait pas vraiment à une enfant battue. Elle ne se comportait pas du tout comme Cassie. A défaut d'être heureuse, la serpentard pouvait au moins se dire qu'elle était relativement bien traitée physiquement -peut-être moins moralement - par ses parents. Ce qui relevait d'un exploit. « Bien. » Dit-elle finalement après que Dawn ait fini de parler. Le mot claqua dans l'air et étonna sans doute la toute jeune majeure. Elle passa alors une main dans ses cheveux avant de poursuivre sur sa lancée. « Je ne comprends pas vraiment le concept, je l'avoue. Néanmoins, je ne peux pas vous forcer à boire un philtre de paix. » Bah ouais. Puis, ce ne serait ni professionnel, ni moral. Et de quelle manière pouvait-elle lui en faire avaler ? En usant d'un stratagème et la piéger ? Débile. Même, elle ne pourrait pas reproduire la chose plusieurs fois. Donc ça n'en valait pas le coup. « Mais ne soyez pas trop dûre avec vous-même. C'était des sorciers nettement plus qualifiés que vous. Et surtout, ils usaient d'une magie dont, je l'espère, vous n'oserez jamais approcher. » Elle marqua une pause. Elle se voulait convaincante et apaisante. Mais ça ne fonctionnerait probablement pas. « Je vais vous chercher cette pommade. » Elle tourna les talons et se dirigea vers le bureau au fond de l'infirmerie. Elle ne disparut que quelques secondes, mais ce temps lui parut relativement long. Elle ne souhaitait pas la laisser seule trop longtemps si bien qu'elle jeta à plusieurs reprises un coup d’œil derrière elle. Elle regarda les étagères rapidement à la recherche de ce qu'elle cherchait. Pommade en main, elle retourna rapidement vers la jeune sorcière et lui mit entre les mains sans la grande hésitation. « Tenez. Et si jamais, vous changez d'avis concernant le philtre de paix, n'hésitez pas, la porte sera toujours ouverte. » Elle le disait souvent ça, mais toujours en toute sincérité. Elle soignait tout le monde, dans tous les cas. Que ce soit un serpentard, un serdaigle, un gryffondor ou un poufsouffle. Peu importait. Elle ne faisait pas de favoritisme - quoique peut-être un peu allez savoir. « Dites vous bien que je ne suis pas votre ennemie... d'accord ? » Ajouta t-elle en haussant un sourcil.