« Ooops… » Après une matinée bien chargée, Loreen se retrouvait devant une table recouverte de bocaux remplis d’ingrédients magique en tout genre. La jeune femme avait en effet décidé de s’occuper pendant sa pause déjeuner pour confectionner quelques potions, notamment une qu’elle avait du mal à doser… et visiblement, elle n’arrivait toujours à remédier à ce petit problème car par faute d’inattention, elle mit une cuillère supplémentaire d’un produit quelque peu... explosif. Le résultat n’était pas beau à voir car sa fiole en verre avait explosé, éjectant la potion sur la table et sur les murs… et sur Loreen bien sûr. Bien entendu, elle n’avait pas énormément de temps pour ranger tout ça puisque la boutique allait bientôt réouvrir et elle ne voulait pas que Lucas soit au courant de ce … léger accident. « Reparo! » Au moins, la fiole était remise à neuf, la demoiselle n’avait plus qu’à faire le ménage autour et ce, à la façon moldu. C'était une habitude chez elle puisqu'elle avait longtemps travailler dans des pâtisseries moldus et que c’est dans le monde moldu qu’elle avait appris son métier.
Ce fut au bout d’une quinzaine de minutes que l’atelier fut rangé et que la jeune femme fut à nouveau présentable pour ouvrir la boutique. Tout était propre et il était sur de se rendre compte qu'un petit accident de travail s'était produit ici... mis à part si on constatait la pénurie d'un ingrédient. Il fallait qu'elle pense à s'en procurer pour ne pas énerver Lucas (même s'il ne pouvait rien lui dire, elle était trop adorable pour ça, pas vrai?) A propos de Lucas... Ce dernier n’était pas présent puisqu’il était apparemment occupé ce jour-là.… En repensant à Lucas et l’emploi du temps de ce dernier, Loreen se perdit dans ses pensées, les sourcils froncés. Qu’est-ce qu’il était réellement en train de faire? Etait-il avec des amis… avec une amie? Loreen détestait le fait de ne pas avoir des yeux partout et de ne pas pouvoir le surveiller. Réellement, si elle s’écoutait, elle aurait fermé la boutique rien que pour le suivre et voir où il se rendait! Sa jalousie allait loin mais fort heureusement elle savait se contrôler et bien se tenir. Seulement, elle savait que sa situation était délicate et elle ne pouvait pas s’empêcher de s’inquiéter… Et si une pimbêche venait lui piquer Lucas? Monsieur était toujours de très bonne compagnie qui plus est ce qui avait le don d’énerver la jeune femme… surtout lorsque ces jeunes femmes en question décidaient de venir lui rendre visite à la boutique. Loreen avait souvent eu des envies de meurtres en en voyant certaines se pavaner devant le jeune homme… Peu importe, ce n’était pas le moment de s’énerver et de se faire du souci. Les clients revenaient et son sourire devait être de mise. Ce qui n’était pas bien compliqué pour la jeune femme qui était de nature souriante…
… Mais pas avec tout le monde! De nombreux clients étaient passés et Loreen s’autorisait même le droit de bavarder avec eux tandis qu’elle leur servait leur commande, et ce de bonne humeur. Depuis toujours, Loreen aimait être au contact des gens, pouvoir discuter avec eux et peu à peu apprendre à les connaître à force de les voir. Lorsqu’elle avait eu sa première expérience professionnelle dans ce domaine, elle s’était sentie utile et capable de faire sourire les autres et ça l’avait beaucoup aidé à reprendre du poil de la bête. Elle était tombée si bas pendant une période mais ce métier l’avait sauvé, l’école l’ayant également énormément aidé. Loreen se sentait bien ici, à sa place, dans le monde magique et dans cette boutique. Lucas était un plus non négligeable bien sûr mais ce n’était pas seulement l’amour qui l’avait amené à travailler dans une pâtisserie, enfin si, mais l’amour pour son métier. Ainsi, toujours avec le sourire, elle continua à servir les clients qui passaient prendre des friandises. Cependant, son sourire se figea lorsqu’elle aperçut une clientèle entrer dans la boutique. Il n’y avait pas eu grand monde depuis quelques minutes et Loreen avait été ravie de savoir que la pâtisserie était de nouveau animée… cependant elle n’était pas forcément très rassurée de voir qui était la cliente en question. Loreen ne connaissait pas vraiment cette jeune femme, mais elle avait souvent entendu parler d’elle… y compris par Lucas. Est-ce qu’elle venait le voir? Soudainement mal à l’aise, Loreen essaya de se reprendre mais il était facile de constater que son sourire était forcé, qu’il s’agissait d’un sourire de politesse car malgré sa méfiance, elle devait rester professionnelle… Toutefois, elle n’était pas du tout à son aise puisque la personne en face d’elle était également une sang pur et Loreen avait toujours eu du mal avec certains d’entre eux et elle savait très bien de qu’elle famille la jeune femme venait! « Bienvenue à la pâtisserie The Rolling Scones, que puis-je faire pour… vous? »
Elle n'avait pas pris la peine de réfléchir avant d'agir. Elle savait d'instinct que ce n'était pas la peine. D'ailleurs elle ne l'avait pas voulu. Elle était consciente que si elle s'autorisait le moindre instant de réflexion, elle ferait demi-tour, et ce n'était pas ce qu'elle voulait. Elle avait eu bien assez de temps pour réfléchir, elle en avait assez, maintenant elle devait agir. De toute manière, Dawn n'avait jamais été portée sur la réflexion et la patience, elle était impulsive et enflammée, elle agissait selon ce que lui dictait son instinct sans chercher à le remettre en cause. Cela lui valait souvent des ennuis mais, parfois, cela suffisait aussi à la libérer du poids qui reposait sans cesse sur ses épaules. Elle ne voulait pas voir ses moindres gestes dictés par les convenances et les attentes de sa famille, son masque était bien assez difficile à porter comme ça. Alors elle avait appris à se laisser aller, à céder à son impulsivité pour éviter de se briser. Comme c'était le cas aujourd'hui. Enfermée dans le manoir Blackwood depuis près de deux semaines, Dawn ne supportait plus cette situation. Elle se sentait comme un lion en cage -même si elle avait plus de la vipère- elle tournait en rond dans les pièces sans vie de sa maison. La solitude, l'enfermement, le mépris non dissimulé de ses parents s'ajoutaient aux sentiments qui se battaient déjà en elle. Son abattement premier avait peu à peu laissé place à un ressentiment tenace et à une colère de plus en plus vive, de plus en plus destructrice. Elle se sentait prête à exploser, elle le savait. Ce n'était plus qu'une question d'heure, un mot de trop, un regard de travers et elle savait qu'elle ne serait plus en mesure de maintenir son masque d'indifférence. Alors elle n'avait pas pris la peine de réfléchir, dès que l'occasion s'était présentée elle ne l'avait pas laissé passer. Lorsque quelques heures plus tôt ses géniteurs avaient quitté le manoir pour la journée, elle avait agi aussitôt. Après avoir soigneusement changé les bandages qui protégeaient les plaies que lui avait laissées l'attaque de Pré-au-Lard, elle avait troqué ses vêtements confortables contre des habits de ville. Un coup d’œil dans le miroir lui montra que si ses traits étaient moins tirés qu'auparavant, elle portait toujours des traces de fatigue sur son visage. Au moins, ce n'était plus des traces dues aux sorts qu'elle avait reçus. Elle fut satisfaite de percevoir un éclat féroce baigner dans son regard, une flamme alimentée par la colère et son désir de reprendre le dessus, preuve qu'elle ne s'était pas totalement perdue cette nuit-là. Qu'elle pouvait faire face et être toujours aussi venimeuse. La prochaine fois, elle n'aurait plus à craindre pour sa vie, elle se l'était promis. Elle ne serait plus jamais aussi vulnérable. Suite à l'attaque, elle avait passé de longues journées dans un brouillard tenace, affaiblie par les plaies qu'elle refusait de soigner, tout juste assez forte pour arpenter les couloirs de la demeure pendant quelques instants avant d'être prise de vertige qui la clouaient sur place. Plus jamais ça.
Une fois assurée que sa veste camouflait parfaitement les blessures de ses bras, elle se rendit dans le grand salon du manoir où une impressionnante cheminée trônait. D'un geste, elle sortit sa baguette, elle était désormais majeure aux yeux du monde magique et pouvait user de la magie comme bon lui semblait. Elle la pointa sur l'antre de la cheminée, y faisant apparaitre un feu vif et crépitant. Celui-ci prit rapidement une teinte verte lorsqu'elle y jeta une pincée de poudre de cheminette. Elle aurait préféré pouvoir voler, mais à Londres ce n'était pas prudent et prendre le magicobus était hors de question, ce véhicule fou la rendait malade à chaque fois. Rien que d'y penser son estomac se tordait en tout sens. Sans se laisser plus de temps, elle fit un pas en avant, plongeant dans les flammes émeraude. Enveloppée d'une douce chaleur, elle prit une grande inspiration, elle avait besoin de courage pour ce qu'elle s’apprêtait à faire. Dommage que la bravoure ne soit pas une des caractéristiques des Serpentards, elle ne s'était certainement pas attendu à envier ne serait-ce qu'un peu les Gryffondors un jour. Elle sera les poings et prononça distinctement. « Pré-au-Lard. » Sa voix tendue laissait transparaitre son anxiété, pourtant elle ne recula pas. Quelque chose en elle lui disait que c'était une idée folle, que c'était une erreur, mais elle ne changea pas d'avis. Elle devait retourner à Pré-au-Lard, elle en avait besoin. C'était physique, c'était psychologique, c'était un tout. Elle avait besoin de retourner sur les lieux de l'attaque, de faire face à ce qu'elle y avait vécu. De revoir les rues ou les sorts et les flammes avaient tout saccagé. Les pavés où les corps étaient tombés et où le sang avait coulé. Les lieux que les mangemorts avaient envahis sans la moindre pitié, les contaminants par leurs idéaux empoisonnés et la destruction. Elle savait qu'elle ne pourrait jamais oublier ce qu'il s'était passé ce soir là et que plus jamais les sorties à Pré-au-Lard n'auraient la même saveur, mais elle devait le faire. Tant qu'elle ne reverrait pas ces rues qui lui étaient si familières elle savait qu'elle ne pourrait pas avancer. Elle ne voulait pas tourner la page, elle voulait la déchirer d'un geste, la brûler et en disperser les cendres dans le vent pour ne plus être hantée par ses souvenirs. Elle devait vivre avec, s'en servir pour se reconstruire, pas les laisser la submerger. Il était hors de question que ses souvenirs aient la moindre emprise sur elle. Elle ne vivrait pas dans la terreur. Elle retournait sur les lieux de toutes ses tourmentes, c'était la seule solution. Elle devait l'accepter tel qu'il était désormais, le dédiaboliser. Alors elle ferma les yeux et elle se laissa happer par les flammes.
Quelque peu chancelante, elle réapparut dans un grand bâtiment du village où tous les sorciers utilisant la poudre de cheminette arrivaient. Elle marcha hors de l'âtre de la cheminée pour laisser la place au prochain voyageur. Elle jeta un coup d’œil autour d'elle, les sorciers allaient et venaient dans le bâtiment, dans un ballet qui aurait pu paraître innocent si ils n'étaient pas surveillés par des aurors chargés d'assurer la sécurité du lieu. Dawn déglutit avec difficulté, c'était la première fois qu'elle voyait de telles mesures prises à Pré-au-Lard, preuve que l'attaque n'avait laissée personne indifférent. Ignorant la boule qui commençait à se former dans sa gorge, elle prit une profonde inspiration et sortie au-dehors. Les rues du village ne portaient plus la moindre trace de l'attaque pourtant Dawn en pu empêcher une sensation de malaise de s'installer en elle. Elle parcourut les rues à pas mesurés, tentant de conserver la maîtrise de ses émotions. Subitement, sa respiration se faisait plus courte alors que les battements de son cœur augmentaient. Elle pinça les lèvres en reconnaissant plusieurs rues qu'elle avait traversées en courant ce soir-là, la peur au ventre. Régulant sa respiration avec difficulté, elle tenta de garder son calme. Mais c'était peine perdue. Les souvenirs de cette nuit qui lui échappaient toujours, s'imposaient maintenant à elle par flash. Elle revoyait les mangemorts envahir le marché, les sorts fuser et la panique envahir les lieux, elle se rappelait avec une précision effrayante de cet homme qui était tombé juste à côté d'elle, touché par un sortilège. Elle ignorait toujours si en voyant tomber ce sorcier, elle avait vu la mort à l'action pour la première fois. Mais maintenant elle n'avait pas réellement envie de le découvrir. Incapable de respirer correctement elle lutta pour ne pas se laisser engloutir par l'angoisse. N'y tenant plus elle parcourut rapidement les rues, à la recherche d'un endroit rassurant, un lieu qui n'était pas relié à l'attaque et dans lequel elle pourrait apercevoir un visage ami. S'efforçant d'occulter ce qui se trouvait autour d'elle, Dawn trouva rapidement la boutique qu'elle cherchait, une pâtisserie ouverte depuis quelques mois, tenue par un sorcier qu'elle appréciait. Sans attendre, elle poussa la porte et entra dans l'établissement momentanément vide, relâchant enfin ses muscles crispés. Une jeune femme s'approcha d'elle. « Bienvenue à la pâtisserie The Rolling Scones, que puis-je faire pour… vous? » Dawn tiqua légèrement. Le sourire de la sorcière paraissait étrangement crispé et surtout le ton qu'elle avait employé à la fin de sa phrase ne plaisait pas vraiment à la Serpentarde. Elle fronça les sourcils un instant, se demandant si la sorcière et elle se connaissaient et si quelque chose pouvait expliquer son attitude. Mais trop occupée à reprendre une contenance, elle décida de ne pas y porter plus d'attention. Sûrement se faisait-elle des idées, avec tous les sentiments négatifs qui se battaient en elle, son jugement n'était pas des plus clairs. « Bonjour. » Elle lui adressa un mince sourire et passa une main dans ses cheveux pour les remettre en place, espérant que l'angoisse en elle n'était pas tapie au fond de ses yeux. « Je cherche Lucas. » Expliqua-t-elle. Elle parcourut rapidement l'établissement du regard, mais ne vit le propriétaire de la pâtisserie nulle part. Il était l'une des rares personnes qu'elle connaissait à Pré-au-Lard et qu'elle pouvait affirmer apprécier. Depuis qu'elle l'avait aperçu tenter -vainement- de maîtriser l'art du vol sur balai, elle s'était portée volontaire pour lui apprendre le quidditch. Même si il en ressortait avec de nombreux bleus, leurs séances portaient doucement leurs fruits et ils avaient même commencer à se lier. Leur relation était encore superficielle, mais c'était exactement ce dont Dawn avait besoin. De quelqu'un qui ne sache pas tout d'elle et qui ne la jugerait pas. « Mais il n'est pas là je suppose ? » Elle savait que lorsqu'il avait terminé de préparer les gâteaux et autres pâtisseries, il s'occupait des clients. En toute logique il aurait dû se trouver de ce côté de la boutique, aussi supposa-t-elle qu'il était absent. « Ça vous dérange si je l'attends ici ? » Elle fit un geste vague pour envelopper la boutique et montrer qu'elle comptait consommer pendant ce temps. Elle s'était surestimée, elle ne se sentait pas prête à affronter de nouveau les rues du village.
La bonne humeur de Loreen s’était envolée dés lors que la porte de la boutique s’était ouverte sur Dawn Blackwood. Les deux jeunes femmes ne s’étaient rencontrées auparavant mais Loreen avait pour autant un avis bien arrêté sur la jeune femme. Cette manière de penser était paradoxale puisqu’en règle générale, Loreen n’aimait pas que l’on juge sans connaitre et encore moins, sans chercher à connaître la personne. Cependant, elle ne pouvait pas s’empêcher de mal considérer la demoiselle qu’elle ne connaissait que de réputation, au final. Certains éléments semblaient les opposer, et notamment la nature de leur sang. Loreen avait connu les regards méprisants de certains sang purs, et elle savait à quel point la cliente qui venait d’entrer avait un titre conséquent, de ce fait, elle ne pouvait que se méfier. Toutefois, malgré son ventre qui s’était crispé, elle essaya de maintenir une attitude polie en accueillant la jeune femme, tout en prétendant sourire sincèrement… En voyant les sourcils de Dawn Blackwood se froncer, elle comprit qu’elle n’avait pas réussi à dissimuler son animosité…. Elle allait avoir du mal à se contrôler puisque la jeune femme semblait chercher quelque chose… ou bien quelqu’un…
Lucas était une personne très spéciale pour Loreen et elle ne s’en cachait pas, Lucas lui-même était au courant de ses sentiments à son égard… Ce qui n’arrangeait pas vraiment les choses puisqu’elle savait pertinemment qu’à l’heure actuelle, ses sentiments étaient loin d’être partagés… et ça ne semblait pas bien parti pour changer… Pour autant, elle continuait d’espérer, continuer d’imaginer un futur avec le jeune homme… De toute manière, elle ne pouvait pas le quitter, elle ne pouvait pas se détacher de lui, il lui était devenu essentiel en si peu de temps… Parfois, elle avait l’impression de ne tourner qu’autour de lui, comme si elle n’avait personnes d’autres à qui se rattacher, vers qui se tourner. Ce n’était pas le cas, mais cela lui faisait du bien de se dire que si elle n’avait pas le moral, elle n’avait qu’à le voir pour se sentir mieux, pour être rassurée… Elle n’était pas seule, et grâce à lui, elle avait une vie tout à fait convenable dans un monde qui lui convenait. Elle était chanceuse… et encore plus amoureuse que jamais. Sa jalousie s’était également agrandit avec le temps… Elle se surprenait souvent en se rendant compte des pensées affreuses qu’elle pouvait avoir lorsqu’une femme s’approchait de trop près de celui qu’elle aimait. Elle s’inquiétait, se rongeait les sangs …. car elle savait qu’à tout moment, une belle demoiselle pouvait rentrer dans la boutique et voler le coeur de Lucas qu’elle essayait d’attraper depuis trop longtemps… C’était désespérant. De plus, en restant près de lui, elle n’était pas capable de l’oublier ni même d’effacer ses sentiments… C’était un cercle vicieux mais cela lui convenait … pour le moment.
Ca ne signifiait pas que ce n’était pas dur, ça l’était de plus en plus… Surtout dans le monde magique où toutes les filles semblaient s’être données le mot pour venir se dandiner devant Lucas… et devant une Loreen prête à bondir sur ces téméraires… Et une nouvelle fois… cette situation se reproduisait : une jolie jeune femme venait dans la boutique dans l’espoir d’y voir Lucas : « Je cherche Lucas. » Comme par hasard. Loreen s’apprêta à lui répondre sèchement, fatiguée par cette question trop souvent formulée : « Mais il n'est pas là je suppose ? » Loreen répondit tout d’abord d’un hochement positif de la tête avant de se rendre compte qu’elle se comportait comme une adolescente immature en boudant de la sorte. Elle n’aimait pas qu’on vienne près de Lucas. En plus de ça, Loreen n’avait aucune confiance en cette fille, et sa présence dans la boutique ne la rassurait guère. « Non, il n’est pas encore rentré… » Loreen répondit avant de décider de se préparer une petite tisane, de quoi se détendre et de s’occuper… Sinon, se connaissant, elle n’allait pas pouvoir s’empêcher d’observer méchamment la jeune femme et de lui posait froidement des questions… Or, elle était responsable de la boutique, et elle était adulte, elle devait se comporter comme telle même si sa langue brulait sous l’envie de poser des questions. « Ça vous dérange si je l'attends ici ? » Loreen leva les yeux vers la jeune femme, surprise que cette dernière décide de rester ici alors que clairement, elle n’avait pas non plus l’air à son aise. D’ailleurs, Loreen trouva son attitude étrange, elle l’avait imaginé plus froide que cela, mais étrangement, elle avait l’impression de déceler une certaine faiblesse dans son regard. « Bien sûr que non, vous souhaitez quelque chose à boire et quelque chose à manger… ? » Loreen se sentit toute petite tout à coup, pour une raison qu’elle ignorait. Elle allait devoir rester quelques temps ici, avec elle… cette femme en qui elle n’avait pas du tout confiance et qu’elle n’appréciait pas vraiment. « Par contre, je ne sais pas quand Lucas va rentrer… Ca risque de prendre encore du temps. » Elle préféra prévenir avant de commencer boire le thé qu’elle s’était préparé. « Vous pouvez lire un livre si vous le désirez. Ah et puisque vous comptez rester… » Elle faisait un effort pour rester poli mais elle sentait que sa voix était froide, cependant, elle restait professionnelle même si elle ne savait pas trop comment se comporter dans une tellement situation. Elle s’approcha de la jeune femme, quittant ainsi le comptoir, pour tendre ses mains : « Il fait chaud dans la boutique, laissez-moi vous débarrasser de votre veste. » Elle proposa, comme elle le faisait toujours avec les clients qui désiraient passer un moment ici.
Elle s’était toujours doutée qu’un jour son impulsivité exacerbée finirait par la mettre dans une situation fâcheuse. Cela avait d’ailleurs déjà été le cas plusieurs fois par le passé. La Serpentarde avait cessé de compter le nombre de fois où ses paroles l’avaient mené à des heures de retenue ou même combien de fois elle avait sorti sa baguette ou utilisé ses poings face à un autre élève avant même d’avoir pris le temps d’y réfléchir. Son attitude, parfois en totale contradiction tant elle pouvait se montrer glaciale un instant puis enflammée et prête à en découdre le suivant, lui avait valu de nombreux ennuis, aussi bien auprès du corps enseignant de Poudlard, que de sa famille qui réprouvait grandement son comportement au sein de l’école. Mais elle avait toujours été comme ça Dawn, tout en retenue, en froideur et en mépris, jusqu’à ce qu’elle explose, qu’elle ne puisse plus contrôler ses sentiments et qu’elle les laisse prendre le dessus. Au sein du manoir Blackwood et face à la haute société sorcière, elle devait jouer le rôle imposé par ses géniteurs, celui de la parfaite héritière, mais à Poudlard, la donne était différente et elle se foutait de paraître parfaite aux yeux de ses camarades. Ils la prenaient pour une garce, une princesse des glaces, si égocentrique qu’elle se fichait bien de qui prenait ses coups. Mais peu lui importait, les préjugés des autres élèves n’avaient aucune valeur à ses yeux. Ils ne connaissaient d’elle que ce qu’elle voulait bien leur faire voir. Mais elle, elle était tellement habituée à son comportement inconstant qu’elle n’y prêtait même plus attention. Elle était incapable de réellement se contrôler, alors à quoi bon ? Pourtant, elle le savait, cette fois-ci elle aurait dû réfléchir avant d'agir, au lieu de céder bêtement à son impulsivité et de se retrouver dans cette situation, les mains rendues tremblantes par l'angoisse et le cœur au bord des lèvres. Elle avait toujours pensé que son impulsivité la mènerait à des affrontements, lui apporterait de nombreux ennuis, mais pas qu'elle devrait faire face à une telle douleur psychologique. Elle avait voulu se croire forte, capable d'affronter ses maux, mais elle avait eu tort et elle s'en mordait maintenant les doigts. Elle devait retrouver son calme, apaiser les battements affolés de son cœur et réussir à repousser les terribles souvenirs qui s’imposaient à elle. Mais pour ça elle avait besoin de temps. Elle avait choisi de rejoindre la pâtisserie de Lucas, consciente qu’elle avait besoin de voir un visage amical et que le sorcier était une des rares personnes qu’elle connaissait et appréciait à Pré-au-Lard. Mais elle se heurtait à la froideur apparente de la jeune femme qui tenait la boutique en son absence. Dawn soupira doucement, elle n’appréciait guère l’attitude que la sorcière avait envers elle. Elle doutait qu’elle agisse ainsi avec tous les clients, ils auraient sans doute déjà tous fuit l’établissement et surtout, Lucas n’aurait certainement pas apprécié de voir son assistante se comporter ainsi.
Si la verte et argent ne comprenait pas pourquoi elle faisait l’objet de tant de mépris, elle ne se laissa pas démonter pour autant. Piquée dans sa fierté alors que tout en elle criait sa faiblesse, elle tenta de se composer un air impassible. Si la sorcière voulait jouer la carte de la froideur, elle était prête, et surtout, c’était un jeu auquel elle ne perdait jamais. « Non, il n’est pas encore rentré… » Dawn tiqua sur le choix de mots de la sorcière. Avec de telles paroles, elle avait l'impression qu'elle parlait d'un foyer, comme si elle avait face à elle une jeune femme attendant de voir son mari rentrer au sein de leur maison. La Serpentarde comprit alors. Il se passait quelque chose entre Lucas et cette jeune femme, du moins aux yeux de la sorcière, car même si son amitié avec le pâtissier n'était que superficielle, elle n'avait que rarement entendu parler de son assistante. Pour la défense de Lucas, il lui était difficile de tenir une conversation lorsque Dawn s'obstinait à lui lancer brutalement diverses balles dessus lors de leurs séances d'entraînement. Mais maintenant qu'elle y prêtait attention, l'évidence lui sautait aux yeux. Elle ignorait si c'était partagé, mais cette sorcière avait des sentiments pour Lucas. Ça expliquait son attitude froide envers la vert et argent, sûrement redoutait-elle de voir une concurrente empiéter sur son territoire. Elle était jalouse, tout simplement. Dawn comprenait mieux maintenant, ce sentiment qui devait la ronger de l’intérieur, ces doutes qui devaient s’insinuer sournoisement en elle et cette colère sourde qui devait altérer son jugement. Même si elle ne l’acceptait toujours pas, tout cela elle l’avait aussi ressenti le soir où elle avait vu Zephir au bras d’Elwan pendant le bal de la Saint-Valentin. Dawn comprenait, mais elle ne pardonna pas pour autant la jeune femme. Elle se détendit légèrement et un fin sourire, presque imperceptible, s'afficha sur ses lèvres. Elle comprenait la situation, mais ça ne voulait pas dire qu'elle allait la faciliter. Après tout, ce n'était pas elle qui se faisait des idées et maintenant qu’elle savait pourquoi la sorcière était si froide avec elle, elle trouvait un certain amusement à la situation. Bien-sûr, elle n’allait pas jouer avec cette information et les sentiments de la sorcière, elle n’était pas cruelle, mais elle était assez rancunière pour ne pas l’informer tout de suite qu’elle n’avait rien à craindre d’elle. Au moins ça aurait le mérite de détourner son esprit des souvenirs qui la torturaient et menaçaient de la submerger depuis son arrivée dans le village. « Bien sûr que non, vous souhaitez quelque chose à boire et quelque chose à manger… ? » La voix de la jeune sorcière fit sortir Dawn de ses pensées. Elle hocha la tête, puisqu’elle avait besoin de temps pour se reprendre et qu’elle comptait rester dans la pâtisserie, il était logique qu’elle consomme. Puisqu’elle appréciait Lucas, autant qu’elle participe au développement de son commerce. Elle aurait bien eu besoin d’un remontant alcoolisé pour pouvoir repousser la douleur et oublier ses vertiges, mais elle doutait que cela soit une bonne idée. Plusieurs mois auparavant, la professeure de soins aux créatures magiques l’avait trouvé dans ce même village alors qu’elle avait choisi de noyer ses sentiments dans l’alcool, ses souvenirs de cette soirée étaient encore flous, mais surtout cuisants. Aujourd’hui, un thé chaud lui suffira. « Oui, je vais prendre un Earl Grey, sans sucre. » Répondit-elle après un temps de réflexion. « Et un de vos scones. » Ajouta-t-elle après avoir lancé un coup d’œil à la vitrine chargée de pâtisseries. Elle ôta son sac de son épaule en prenant soin qu’il ne touche pas ses blessures, avant de le déposer sur la chaise la plus proche. « Par contre, je ne sais pas quand Lucas va rentrer… Ça risque de prendre encore du temps. » Dawn eut un petit sourire, mais elle ne dit rien. Décidément, la sorcière ne semblait pas tenir à ce qu’elle s’attarde dans son établissement. Souhaitait-elle réellement perdre une cliente et risquer de mécontenter Lucas ? Si la Serpentarde trouvait son attitude futile, elle ne le montra pas. Après tout, au bal de la Saint-Valentin ne s’était-elle pas laissé aller dans les bras d’Olivier, son ex-petit ami, après avoir vu qu’Elwan était le cavalier de Zephir ? Merlin seul savait à quelles extrémités la jalousie pouvait la mener.
La patience ne faisait pas réellement partie des qualités de l’héritière Blackwood, mais dans la situation actuelle, elle n’avait pas vraiment le choix. Elle ne se sentait la force de parcourir de nouveau les rues du village. Pas tout de suite. Attendre le retour de Lucas se présentait donc comme une bonne excuse. Un moment de flottement s’installa et Dawn en profita pour laisser son regard ambré se balader dans la pièce. Même si elle côtoyait Lucas depuis plusieurs semaines, c’était la première fois qu’elle se rendait sans sa pâtisserie. Il lui avait déjà ramené quelque un de ses gâteaux, mais ils s’étaient toujours retrouvés sur un terrain à l’écart du village, là où ils pouvaient s’entraîner au quidditch comme bon leur semblait. La pâtisserie dégageait une impression de chaleur et de bien-être. Des fauteuils colorés étaient placés devant des tables de tailles différentes et le comptoir regorgeait de gâteaux appétissants. L’endroit comportait même de nombreux livres, laissés sur les tables ou posés sur des étagères, à porter de main des clients. Dawn pensa que Lucas avait réussi à créer un endroit à son image : généreux. « Vous pouvez lire un livre si vous le désirez. Ah et puisque vous comptez rester… » Dawn se tourna vers la sorcière et la regarda un instant sans comprendre. Elle patienta, laissant son interlocutrice exprimer le fond de sa pensée. « Il fait chaud dans la boutique, laissez-moi vous débarrasser de votre veste. » De toute évidence, la sorcière faisait des efforts pour se montrer polie et avenante, jalouse ou pas, elle avait un rôle à remplir. Dawn se doutait que ça devait lui coûter de prendre sur elle de la sorte. Dans d’autres circonstances, elle se serait sûrement beaucoup amusée de la situation, mais pas aujourd’hui. Elle n’avait pas envie de faire souffrir cette jeune femme alors qu’elle-même peinait à rester debout. Il y avait encore une chance que son interlocutrice se rendre compte de sa méprise et qu’elle se reprenne. Dawn lui adressa un fin sourire. « Merci. » Souffla-t-elle en acceptant l’invitation. Elle entreprit d’ôter sa veste, avec des gestes précautionneux qu’elle tenta de rendre le plus naturel possible. Les plaies qui ornaient son corps n’étaient pas complètement refermées et rendaient ses gestes difficiles. À chaque geste trop brusque, les blessures tiraient sur sa peau, déclenchant une vague de douleur et menaçant de rouvrir ses cicatrices. Même plier les bras lui était difficile. Elle avait pris l’habitude d’agir avec douceur, même si elle refusait les soins offerts par les médicomages, ce n’était pas pour autant qu’elle souhaitait laisser la souffrance l’envahir. Elle fit donc attention à ses gestes, mais aussi son attitude, maîtrisant au mieux ses expressions pour ne pas laisser de grimace s’y installer. Pourtant cela ne parut pas suffire. Alors qu'elle apprêtait à tendre sa veste à la jeune femme, Dawn s'aperçut que ses prunelles n'étaient plus dirigées vers son visage. Suivant son regard, la verte et argent comprit qu'elle fixait ses bras. Il ne lui fallut pas longtemps pour se douter que quelque chose clochait, elle pouvait le lire dans l'expression de sa vis-à-vis. Dawn sentit son visage perdre ses couleurs lorsqu'elle comprit ce qu'il se passait. Trop occupée à faire attention à ses gestes, elle ne s'était pas rendu compte qu'une de ses manches s'était relevée et révélait une peau dont la blancheur contrastait avec les contusions qu'elle portait. Son épiderme nu et meurtri, partiellement recouvert de bandages, s'étalait devant le regard de la sorcière, révélant tout l'horreur de la vérité. Dawn se sentit vaciller, mais elle prit une profonde inspiration pour se contrôler et se composa une expression dure pour camoufler ses faiblesses. Elle cligna lentement des yeux et pinça les lèvres, s'efforçant de maîtriser ses émotions. D'un geste calculé, elle remis sa manche en place. « Il y a un problème ? » Demanda-t-elle d'une voix étrangement calme. Sa question paraissait légère, elle semblait inviter au partage et à la sincérité. Mais son regard avait un tout autre discours. Vrillé dans celui de la jeune femme, il l'accrochait sans la moindre pudeur. Habité d'un éclat glacial et d'une colère froide, il mettait au défi la sorcière de la questionner sur ce qu'elle venait de voir. Elle haussa un sourcil. Dawn n'avait pas besoin de paroles pour faire passer un message, mais restait à savoir si la sorcière allait choisir de lui donner la bonne réponse.
La tension semblait forte dans la charmante pâtisserie où Loreen travaillait. Depuis que la jeune héritière Dawn Black était entrée à l’intérieur, Loreen avait l’impression de progressivement perdre ses moyens. Tout d’abord, elle ne pouvait s’empêcher de se montrer froide envers cette nouvelle cliente, alors même qu’elle ignorait tout de celle-ci. Cependant, ses sentiments pour Lucas se dressaient une nouvelle fois contre elle, sa méfiance étant très forte. La jeune femme qui se trouvait face à elle ne lui inspirait guère confiance et malgré sa bonne volonté, elle avait conscience que son attitude la trahissait. Qui plus est, Loreen avait nettement l’impression que la jeune femme se dressait également contre elle, ou peut-être se faisait-elle des idées. Si tel était le cas, cela n’avait rien de surprenant. Rare était les personnes qui restaient avec le sourire lorsqu’on se montrait froid envers eux. Ce n’était pas agréable de faire des efforts dans un sens, sans rien recevoir en retour. Loreen était ainsi, lorsqu’on agissait mal envers elle, elle se braquait immédiatement et se comportait froidement, ou s’énervait en retour. Elle détestait également qu’on s’en prenne à elle lorsqu’elle n’avait rien fait de mal, lorsqu’elle était la cible de la mauvaise humeur d’autrui. Ce n’était pas bien compliqué, il suffisait de rester seul dans son coin le temps que ça passe ou bien d’en parler clairement au lieu de s’attaquer aux premier passant, pas vrai? Loreen avait eu le droit à de beaux discours durant sa courte carrière, et dans ces cas-là, elle avait du apprendre à prendre sur elle, et non pas à agresser verbalement son très cher client. Lucas et ses précédents patrons lui avaient déjà fait la remarque en l’attrapant en train de parler sèchement à un client… le client est roi. C’était malheureusement le cas et Loreen prenait régulièrement sur elle lorsqu’on venait la titiller dans le mauvais sens… Toutefois, en face de Dawn, elle n’arrivait pas à se contrôler, c’était comme-ci elle avait envie de jeter du venin gratuitement! Après tout, c’était certainement ce que cette personne devait constamment faire, profitant de sa puissance, de son titre pour tout se permettre et pour traiter les autres comme ses larbins… pas vrai? Loreen avait en effet une idée bien précise de la jeune femme en tête et cette image n’avait rien de bien joli. Elle avait tellement entendu de rumeur, tellement eu des difficultés avec des sangs purs qu’elle ne pouvait s’empêcher de mal considérer cette femme qui lui était inconnue.
Bien qu’elle se comportait froidement et qu’elle essayait de se retenir d’attaquer la jeune femme de question, Loreen faisait de son mieux pour rester professionnelle. Elle suivit les étapes habituelles, en évitant cependant de poser chaleureusement des questions. En règle générale, Loreen avait l’habitude d’offrir de grands sourires ou de partager des moments de sa journée avec ses clients, parlant du délicieux gâteau que le client avait choisi, ou même du beau temps. C’était des sujets de conversation très simples mais qui pouvaient cependant éclairer la journée de beaucoup de monde. Il était toujours agréable d’échanger par hasard, sans se prendre la tête. Loreen adorait également son métier pour cela ; elle était constamment en contact avec du monde, des personnes différentes et dont la personnalité donnait de la couleur à son quotidien. Chaque matin, elle appréciait se rendre au travail car elle se sentait utile mais aussi parce qu’elle recevait énormément, plus qu’elle n’aurait pu recevoir en se retrouvant enfermer dans un bureau. Quand bien même, il lui arrivait parfois de s’éloigner des clients, lorsqu’il était question de mettre la main à la pâte (clairement) ou lorsqu’elle voulait expérimenter de nouvelles recettes et créer des potions magiques. Elle se rappelait souvent de Poudlard lorsque c’était le cas, lorsqu’elle s’amusait à peaufiner des potions. La jeune femme se souvenait encore très clairement de ses jours passaient à Poudlard, en classe ou dans les couloirs… Lorsqu’elle étudiait ou lorsqu’elle rêvassait.. Lorsqu’elle imaginait son avenir, lorsqu’elle doutait de celui-ci. Aujourd’hui, elle était fière de pouvoir dire qu’elle était fière de son parcours et de ce qu’elle avait accompli. Studieuse, elle avait été diplômée sans problèmes et avec les honneurs et elle aurait pu exercer une carrière plus rentable ou plus « excitante » d’après certaines personnes… Cependant, elle était ravie de faire ce qu’elle aimait, ce qu’elle avait toujours aimé faire. C’était ça, pour elle, la réussite. Bien sûr, même si le tableau semblait parfait, il y avait tout de même des défauts… Elle avait été diplômée, avait été grandement félicitée par les professeurs, par ses camarades mais ses parents n’avaient pas été présents… A vrai dire, elle n’avait plus de parents, alors ce n’était pas surprenant mais c’était quand même douloureux. Loreen aurait aimé être enlacée par ses parents, entendre des félicitations de leur bouche mais ce fut chose impossible. Pour les plus beaux moments de sa vie, ses parents ne seront jamais là. Jamais. Elle n’existait plus et elle se demandait encore pourquoi cela faisait aussi mal alors que des années étaient passées depuis ce fameux jours…
Habituellement, Loreen gardait son calme, toujours avec le sourire et contrôle, et ce malgré ses problèmes. Cependant, à l’heure actuelle, elle peinait à garder son sourire. Elle n’aimait pas qu’on s’approche de trop près de Lucas, encore moins quand on s’appelait Dawn Black car cela ne sonnait pas bien, pas bien du tout. Malgré tout, sa carrière l’obligeait à sourire, à faire des efforts, de gros efforts pour ne rien laisser paraitre. Visiblement, elle avait échoué et elle en avait conscience mais peu importe, elle faisait de son mieux. Même si elle avait envie de virer la jeune femme, Loreen restait tout de même poli et n’oublia pas de s’occuper de sa cliente: « Oui, je vais prendre un Earl Grey, sans sucre. Et un de vos scones. » Loreen hocha simplement la tête avant de partir préparer le tout, en commençant par le thé. Avec elle, il n’était pas question de magie lorsqu’elle préparait ses commandes, elle faisait tout à la façon moldue, puisque c’était aussi chez les moldues qu’elle avait suivi ses formations. C’était également plus agréable puisqu’elle devait respecter toutes les étapes avec le plus grand soin, pour que le résultat soit parfait. Loreen était en effet perfectionniste, et ce, même s’il s’agissait d’une commande qu’elle n’avait pas tant envie de servir. Cependant, comme à son habitude, Loreen prit grand soin de la commande. Ainsi, elle prépara un plateau où elle déposa le scone que Dawn avait commandé. Le thé rejoignit bientôt ce dernier, de la fumée s’échappant de la tasse dans laquelle le liquide bouillant se trouvait. En se dirigeant vers la jeune femme, Loreen put se délecter du parfum qui se dégageait de cette tasse, un parfum qui vint chatouiller ses narines et dont l’odeur pouvait la transporter dans un autre monde durant quelques secondes. Cependant, ce n’était pas le moment de s’évader, ou elle allait commettre une maladresse et tout renverser… (peut-être même sur Dawn et même si elle se méfier de cette dernière, Loreen n’était pas prête à aller jusqu'à là pour défier la jeune femme. Elle n’était pas aussi immature… normalement). « Tenez, voici votre commande. » Loreen déposa le fameux plateau sur une table, en se tournant ensuite vers la jeune femme pour l’avertir qu’elle pouvait récupérer sa veste pour la mettre plus à l’aise.
Ce qu’il se passa par la suite fut très étonnant. Loreen avait voulu rendre service à sa cliente, mais ce qu’elle vit l’empêcha de réaliser ce pourquoi elle s’était approchée. En effet, Loreen nota tout d’abord que la jeune femme en face d’elle mettait du temps à enlever sa veste, comme si elle essayait de ne pas être trop brusque. Loreen regarda ainsi la jeune femme de haut en bas tandis que cette dernière retirait toujours avec délicatesse sa veste. Loreen observa alors l’expression du visage de la demoiselle, puisqu’elle avait cette impression que quelque chose n’allait pas, que son visage semblait trop vide et intense à la fois. Loreen pouvait lire du contrôle, comme si Dawn essayait de maitriser au mieux ses traits, comme si elle cherchait à dissimuler quelque chose…. Loreen comprit bien vite en baissant les yeux et ceux-ci s’écarquillèrent lorsqu’elle vit un hématome sur le bras de Dawn, un hématome qui avait l’air extrêmement douloureux… Tout à coup, Loreen comprenait mieux les précautions prise par Dawn, elle devait avoir mal… Avait-elle d’autres blessures comme celle-ci? A quel point son corps était-il meurtri ? Que s’était-il passé? Ce n’était pas normal… Pourquoi cette jeune femme était-elle blessée de cette manière? Pourquoi ne faisait-elle rien pour soigner ces blessures? Des bandages recouvraient une partie de sa peau mais ce n’était pas suffisant pour tout dissimuler, ce qui inquiétait particulièrement Loreen qui ne pouvait qu’imaginer que ce n’était pas la seule blessure que Dawn avait sur son corps. Tout à coup, Loreen n’avait plus la même expression sur son visage, elle était choquée, et effrayée… Effrayée parce qu’elle ignorait ce qu’il se cachait derrière les vêtements de la demoiselle et effrayée parce qu’elle se demandait ce qu’il s’était passé. Il y avait des bandages, donc ça ne s’était certainement pas passé sur le chemin jusqu’ici… mais ça devait quand même être récent… avait-elle été agressée, attaquée? « Il y a un problème ? » Loreen releva les yeux vers Dawn et croisa le regard sévère de cette dernière : c’était comme ci elle essayait de lui lancer un défi. Cependant, au lieu d’être effrayée ou énervée par ce regard, Loreen était encore plus mal à l’aise, encore plus mal pour la jeune femme. Essayait-elle de masquer son trouble? Son regard avait beau avoir l’air froid, il avait beau lui demander de ne pas poser de questions, Loreen savait qu’elle n’allait plus pouvoir tenir sa langue à présent. Elle en avait trop vu. « Ne me regardez pas comme ça, je sais ce que j’ai vu et cette blessure n’est clairement pas anodine. Ce serait trop me demander que de ne rien dire. » Son regard vint se durcir à son tour, tandis que ses bras se croisèrent sous sa poitrine. Sa petite taille ne la rendait pas menaçante mais elle savait que Dawn pouvait lire sa détermination dans ses yeux, ses iris ne quittant pas ceux de la jeune femme. « Que s’est-il passé? Est-ce… est-ce que vous avez d’autres hématomes de ce genre? » C’était étrange comme situation ; quelques secondes plus tôt, elle avait pratiquement des envie de neutres mais à présent, elle s’inquiétait pour cette personne. Loreen ne connaissait pas Dawn mais elle avait tout à coup une nouvelle image de cette dernière. C’était comme ci elle essayait de se montrer forte en toutes circonstances alors même que la situation lui était délicate. Loreen avait bien vu un peu de fragilité dans ce regard devenu très intense en quelques secondes, elle avait eu le temps d’apercevoir un lueur dans ses yeux, une lueur qu’elle souhaitait revoir afin de mieux comprendre ce qu’elle signifiait. Dawn était plus intéressante que Loreen ne l’eut cru et elle voulait savoir ce qu’il s’était passé et elle comptait obtenir ses réponses… Coûte que coûte.
Elle voulait se montrer forte. Inébranlable. Intouchable. Elle voulait être au-dessus de tout, des autres, mais aussi, et surtout, d’elle-même. De ces blessures qui éclaboussaient sa peau pâle, ces cicatrices ancrées dans son épiderme, de la douleur qui menaçait de la submerger à chaque instant et des souvenirs écarlate qui l’envahissaient la nuit. Mais surtout, elle voulait se montrer plus forte que l’amertume et que la colère qui rugissaient en elle. Elle ne voulait plus être faible, elle ne le pouvait plus, même si ça devait la consumer. Alors elle jouait un rôle, une fois de plus, endossait son masque de froideur et d’arrogance, espérant naïvement que ça servirait à la protéger de la cruauté qui s’était immiscée dans sa vie. Elle évoluait la tête haute alors qu’un poids sans fin reposait sur ses épaules et menaçait de la faire plier. Elle portait son insolence comme une armure, son caractère de glace comme un bouclier. Elle se l’était promis, elle ne se laisserait plus atteindre. Elle marchait sur un fil tout en étant attirée par le vide, jouait avec ses émotions jusqu’à ne plus pouvoir les ressentir. Comme anesthésiée. Parce que c’était la seule chose qui marchait, la seule qui parvenait à l’apaiser ne serait-ce qu’un instant. Ne plus ressentir, plus de colère, plus de peine. Juste un vide incommensurable, aussi fascinant qu’empoisonné. Mais qu’elle accueillerait comme une délivrance. Elle se cachait, Dawn, depuis toujours, devant ses géniteurs, devant ces sorciers de sang-pur qu’elle méprisait, devant ses camarades qui ne sauraient jamais qui elle était en réalité. Elle jouait un rôle qui ne lui correspondait pas, qu’elle détestait de plus en plus et qui finirait par la bouffer. Mais s’exposer, c’était se mener à sa propre perte, elle le savait. Maintenant plus que jamais. Il ne s’agissait plus seulement de se camoufler dans la foule des sang-purs, ou de se protéger de la souffrance, il s’agissait de survie. Et elle possédait un instinct de survie particulièrement développé, même si pour cela, elle devait repousser tous ceux qui lui offraient son aide. Dawn n’avait pas hésité un instant en voyant le regard de la sorcière effleurer les traces et bandages visibles sur son bras nu. Sa voix avait claqué dans l’atmosphère tendue de la pâtisserie et ses prunelles avaient heurté celles de son interlocutrice sans la moindre délicatesse. En un instant, le visage de la princesse des glaces s’était fermé, camouflant le trouble qui avait envahi ses traits et tentant de masquer sa faiblesse sous une expression de dureté. La tendance s’était brutalement inversée, après avoir subi la froideur de la sorcière c’était maintenant à son tour de se montrer glaciale et mordante. La distribution des rôles avait changé et la sorcière si distante abordait maintenant une expression choquée et effrayée, ce qui ne fit qu’assombrir les traits de la Serpentarde. La pitié et la compassion ne faisaient que l’écœurer. Elle n’en voulait pas, encore moins lorsqu’elle venait d’une inconnue qui avait semblé si vive à la juger. Mais l’expression de la brune changea imperceptiblement, son air se fit plus résolu et Dawn pu sentir qu’elle ne faiblirait pas sous la brûlure de son regard.
Elles se fixèrent un instant dans le plus grand des silences, chacune jaugeant la volonté de l’autre. Dawn appréciait les gens avec de la force de caractère, ceux qui ne s’écrasaient pas devant ses prunelles de glace et ses paroles acides. Elle n'aimait pas les gens trop calmes et conciliants, ceux qui manquaient de caractère et qui ne savaient pas s'affirmer l'exaspéraient. Ils manquaient cruellement d'intérêt à ses yeux. Et l’expression de l’inconnue lui prouvait qu’elle ne devait pas manquer de caractère. « Ne me regardez pas comme ça, je sais ce que j’ai vu et cette blessure n’est clairement pas anodine. Ce serait trop me demander que de ne rien dire. » La Serpentarde leva les yeux au plafond. Tout aurait été infiniment plus simple si la sorcière avait simplement choisi de faire preuve de bon sens et d’ignorer ce qu’elle avait vu. Ces traces étaient à elle et à elle seule. Elle avait décidé de ne pas laisser les médicomages y toucher, d’en garder les cicatrices. C’était à elle de choisir qui pouvait les voir ou non. Mais de toute évidence, la jeune femme ne semblait pas suivre la même logique. Le regard de la verte et argent passa rapidement de la tasse fumante qui reposait sur la table la plus proche à la porte de la pâtisserie. Elle avait soudainement envie de fuir. Tout simplement. Remettre sa veste et partir le plus vite possible, oublier ces quelques instants et les prunelles effrayées de la jeune femme. Mais les souvenirs l’attendaient sur le pas de la porte et elle ne savait pas si elle aurait la force de les affronter immédiatement. Elle pesa le pour et le contre quelques instants et alors qu’elle envisageait sérieusement cette option la voix de la sorcière brisa de nouveau le silence. « Que s’est-il passé ? Est-ce… est-ce que vous avez d’autres hématomes de ce genre ? » Qu'imaginait-elle ? Que Dawn allait ouvrir la bouche pour tout lui raconter ? Qu'elle allait lui faire le récit larmoyant des origines de ses cicatrices ? Qu'elle allait se livrer aussi facilement et aussi naturellement sur un sujet aussi sensible ? De toute évidence, cette sorcière semblait penser que parce qu'elle avait entraperçu un bandage cela lui donnait le droit de réclamer des réponses. Elle ne pouvait pas plus se tromper. Peut-être avait-elle un avis préconçu sur Dawn, mais elle était bien loin de savoir à qui elle avait à faire en réalité. Même face à son cousin, elle avait refusé de flancher, ce n'était pas une inconnue qui allait lui arracher des aveux. Elle braqua sur elle un long regard acéré alors qu'un rictus dédaigneux prenait place sur ses traits. « Vous savez très bien ce qu'il s'est passé. Tout le monde ici le sait. » Lâcha-t-elle sans chercher à cacher son amertume et son mépris. Elle ignorait quelles pensées avaient pu traverser l'esprit de la sorcière lorsqu'elle avait vu ses hématomes et elle s'en fichait pas mal. Elle n'avait pas à se plier à ses demandes, peu lui importait qu'elle s'imagine qu'elle avait été victime d'une agression par un moldu, d'un duel qui aurait mal tourné ou d'un cognard rendu fou. Elle n'avait aucun compte à lui rendre et si elle avait déjà oublié quels drames s'étaient déroulés dans les rues derrière elles c'était son problème. Elle lâcha le regard de sa vis-à-vis et le laissa divaguer dans la boutique. Soudainement, elle n'avait plus vraiment envie que Lucas revienne. Elle ne doutait pas que la jeune femme lui dirait aussitôt ce qu'elle avait vu sur sa peau et le pâtissier ne manquerait pas de la confronter à ce sujet. Elle était venue pour affronter ses démons, pour passer au-dessus de ses souvenirs, mais elle finissait par se les prendre en pleine figure. Quelle mauvaise ironie.
Avec des gestes contrôlés, elle attrapa son sac et en sorti les quelques mornilles qu'elle devait à la pâtissière. Elle les déposa lentement sur le comptoir, les laissant tinter sèchement contre le verre du meuble. Pinçant les lèvres, elle reporta son attention sur la brune. « Alors, vous avez décidé que je n'étais pas l'ennemie finalement ? D'où vient cette soudaine sollicitude ? Je ne vois pas en quoi ça vous regarde, ni ce que vous pouvez faire. » Lança-t-elle brusquement en la toisant. Que cette sorcière ne soit pas dupe, elle savait qu'elle ne se comportait pas aussi sèchement avec tous les clients, Lucas ne l'aurait pas accepté et ce n'était pas dans le caractère des commerçants. Elle savait que sa froideur n'était destinée qu'à elle et à elle seule. Lorsqu'il s'agissait de manier la glace, Dawn savait y faire, alors elle avait vu clair dans son jeu. La distance, le mépris à peine voilé, elle était maîtresse dans leur maniement, alors un changement de comportement aussi brusque ne pouvait pas passer inaperçu à ses yeux. Elle avait même capté la jalousie qui pointait dans sa voix, aussi ridicule que déplacée. « Et si c'est pour échanger la froideur contre la pitié, autant vous dire que vous pouvez vous abstenir. » Continua-t-elle sur le même ton. Dawn était peu conciliante, mais surtout, elle avait sa fierté, certainement disproportionnée dans la situation présente, mais tout de même. Elle ne s'abaissait jamais à reconnaitre ses faiblesses et encore moins à les avouer. Voir l'expression de la sorcière changer de la sorte était comme une insulte pour elle. Mais surtout, elle ne voulait pas reconnaitre sa vulnérabilité en cet instant présent, car si elle faisait toujours face à la sorcière, c'était parce qu'elle n'avait pas la force d'affronter de nouveau les rues de Pré-au-Lard. Lui dévoiler cette vérité, c'était lui montrer que son masque d'assurance n'était qu'une façade déjà bien fissurée, prête à s'écrouler à chaque instant. Et elle ne le supporterait pas. Mais quelque chose lui disait que son interlocutrice n'allait pas abandonner ses interrogations aussi simplement. Elle pouvait lire la détermination dans son regard. Autant l'utiliser à son avantage. « Puisque vous êtes si curieuse, donnez-moi une bonne raison de répondre à vos questions. » Lâcha-t-elle simplement en reportant son attention sur la sorcière. Elle pencha la tête sur le côté, un léger air de défi flottant dans ses prunelles. Autant dire que la pâtissière n'aurait pas le droit à une deuxième chance.
Il était rare de voir une lueur aussi intense dans le regard de Loreen. Habituellement, c’était un sourire qui prenait place sur son visage et qui éclairait celui-ci. Souvent, elle avait été complimentée pour son sourire et par la bonne humeur qu’elle arrivait à partager grâce à celui-ci, illuminant parfois le quotidien de certains clients aux pensées égarées. Pour la jeune femme, son sourire était comme une arme, une arme qui pouvait s’avérer utile et qu’elle savait très bien manier. Il lui servait notamment à camoufler ses doutes, ses préoccupations et surtout sa peine. Rare était les personnes qui avaient été présentes lors d’un moment d’égarement où aucun sourire ne pouvait se dessiner sur son visage. Rare étaient les personnes qui l’avait vu craquer et pleurer. Sa faiblesse, elle la gardait pour elle, personne ne devait être au courant de ses peines. Il était important pour Loreen de toujours avoir le sourire, d’avoir l’air forte même si honnêtement, ce n’était pas le cas. Elle rentrait parfois le soir chez elle, et se posait sur son lit, l’esprit vide. C’était comme ci, elle ne savait plus où elle en était, ce qu’elle désirait dans la vie. Sa vie était floue et lorsqu’elle se retrouvait seule, elle se rendait compte que beaucoup de choses n’étaient que mensonge dans son quotidien, notamment son fameux sourire dont on lui disait tant de bien. Mentir était si facile… Cela lui permettait également d’avoir l’impression d’être heureuse et c’était ce qu’elle désirait plus que tout. Mais tout n’était pas si facile, et même quand tout semblait aller pour le mieux, elle trouvait ça louche et s’inquiétait, devenait parano et remettait tout en question. Cependant, personne n’était au courant de ses états d’âmes. Personne ne pouvait deviner que de temps en temps, elle se regardait dans le miroir et se demandait si tout cela valait la peine… Depuis que ses parents l’avaient rejeté, elle n’avait plus jamais été la même. Elle avait l’air heureuse, souriante et pleine de vie, comme si sa vie était un long fleuve tranquille comme on dit, mais ce n’était pas le cas, ce n’était plus le cas. Ce n’était qu’un tissu de mensonges. Pourtant, elle voulait y croire, elle aimait mentir de cette façon… Cela lui donnait l’illusion que tout allait pour le mieux et ses journées étaient longues fort heureusement. Peut-être qu’avec le temps, elle allait pouvoir se convaincre une bonne fois pour toute que tout était en ordre dans sa vie, malgré cette ombre au tableau. Elle avait une autre famille ici après tout… Elle le savait mais elle avait encore du chemin à parcourir.
Face à Dawn Black, Loreen avait fait tomber son masque pour afficher ce qu’elle ressentait vraiment, une jalousie dévorante. Elle avait du mal à masquer ce sentiment qui l’envahissait si vite lorsqu’elle pensait avoir affaire à une rivale, encore plus quand la rivale était aussi menaçante du fait de son sang. Peu importe, elle avait faibli mais elle n’était pas préoccupée par ce fait. Elle souriait beaucoup, mais elle avait toutefois un très fort caractère qui souvent lui permettait de faire tomber ce masque parfait. Elle pouvait se montrer froide et ce fut l’attitude qu’elle usa dans un premier temps avec Dawn. Cependant, la situation prit une étrange tournure lorsque Loreen eut dans sa vision un important hématome. Dawn avait été malmenée, il n’y avait aucun doute la dessus et la jeune pâtissière ne put s’empêcher de questionner la demoiselle à ce sujet. C’était plus fort qu’elle, elle ne pouvait pas s’en empêcher. C’était inquiétant et elle ne comprenait pas pourquoi la jeune femme était encore blessée. Pour Loreen, cela devait signifiait que les blessures étaient récentes et qu’elle n’avait pas eu le temps d’user de magie pour les faire disparaître. Ce fut pour cette raison qu’elle demanda des informations à ce sujet, quand bien même cela ne la regardait pas. Il y avait eu une lueur étrange dans le regarde de Dawn qui expliquait également pourquoi Loreen était si curieuse. Cette jeune femme était étrange, elle semblait vouloir cacher quelque chose. En effet, elle s’était soudainement brusquée avant de se fermer complètement. Loreen sentait que la demoiselle n’avait pas de très bons sentiments à son égard, elle savait très bien le faire ressentir, rien que par le regard. Le ton qu’elle employa quand elle reprit la parole était également une preuve de son animosité : « Vous savez très bien ce qu'il s'est passé. Tout le monde ici le sait. » Il ne fallut que quelques secondes à Loreen pour faire le lien avec l’attaque qui avait précédemment eut lieu. Ceci expliquait les blessures et l’horreur que la jeune femme avait certainement vécu pour se retrouver avec des hématomes pareils sur la peau. Toutefois, cela n’expliquait pas tout, pourquoi avait-elle encore ces traces violettes sur le corps alors qu’elle aurait très bien pu s’en débarrasser plus tôt? Quelque chose n’était pas claire dans cette histoire et Loreen ne savait pas quoi en penser. Décidément, Dawn était de plus en plus intéressante. C’était comme si une aura mystérieuse était apparue autour d’elle… Loreen n’avait envie que d’une seule chose : dissiper cette aura pour mieux comprendre son vis à vis. C’était étrange de voir à quel point son attitude avait changé. Une minute plus tôt, son regard envoyait des éclairs en direction de Dawn alors que maintenant son regard était fermé afin de se confronter à la jeune femme. Celle-ci était impressionnante, Loreen devait le reconnaitre mais la jeune femme n’aimait pas perdre et elle ne comptait pas offrir ce plaisir à sa cliente. Ainsi, son regard resta planté dans celui de Dawn, sans lâcher prise.
Loreen eut un instant de répit lorsque Dawn prit son sac dans ses mains afin d’y rechercher des mornilles qu’elle posa ensuite sur le comptoir avant de se tourner une nouvelle fois vers Loreen qui n’avait pas bougé d’un cil, ayant observé la plus jeune en silence, et notamment ses mouvements, dans le but de découvrir si elle avait d’autres blessures ou non. Elle releva les yeux vers Dawn lorsque celle-ci reprit la parole, froidement. « Alors, vous avez décidé que je n'étais pas l'ennemie finalement ? D'où vient cette soudaine sollicitude ? Je ne vois pas en quoi ça vous regarde, ni ce que vous pouvez faire. Et si c'est pour échanger la froideur contre la pitié, autant vous dire que vous pouvez vous abstenir. » Loreen sourit à ces remarques puisque qu’elle était bien consciente que son attitude n’avait ni queue ni tête, une vraie lunatique. Lucas était réellement une faiblesse. A cause de lui, elle se montrait très vite vulnérable, faisant vite tomber son masque pour se montrer d’une manière qu’elle détestait fortement. Elle savait très bien qu’elle était jalouse et que sa jalousie ne se dévoilait pas sous une belle forme, elle en avait bien conscience mais elle avait beaucoup de mal à masquer ce sentiment si présent dans son quotidien, surtout depuis qu’ils s’étaient installés ici et qu’elle avait eu l’occasion de voir de nombreuses demoiselles venir le voir. Elle n’était pas la seule à être tombée pour ses beaux yeux mais contrairement aux autres, ses sentiments étaient vraiment très forts. Lucas était sa famille, il était tout pour elle. C’était aussi ce qui lui permettait de continuer à se rattacher à la vie. Elle n’était pas seule, elle pouvait compter sur lui, même si les sentiments de ce dernier n’étaient pas de la même nature. Peu importe, elle pouvait s’en contenter même si c’était douloureux, même si chaque jour qui passait, elle se sentait de plus en plus délaissée. Elle allait le perdre un jour ou l’autre, elle le savait mais elle ne pouvait se résoudre à le laisser partir, à le laisser à quelqu’un d’autre. Elle pouvait le rendre heureux, elle le connaissait, elle le comprenait… Alors pourquoi ne regardait-il pas dans sa direction pour une fois? Pourquoi il ne tendait pas la main vers elle alors qu’elle était là, sous ses yeux? Sa jalousie allait finir par la dévorer et elle ne voulait pas finir de cette façon… « Je l’admets, c’était immature de ma part. Je me suis montrée froide dès votre arrivée et je reconnais que ce n’était pas professionnel. Et j’ai tout à coup changé d’attitude... Cependant vous vous trompez, je ne fais pas preuve de pitié… loin de là. Je ne vais pas me mettre à pleurer parce que vous être recouverte de blessures. Je me comporte ainsi parce que je suis curieuse, curieuse de comprendre ce qu’il vous est arrivé. Je pourrais vous retourner la question par ailleurs… Pourquoi êtes-vous aussi froide tout à coup? Comme ci j’avais touché un point sensible… Je me trompe? » Loreen avait bien compris qu’elle ne devait pas faire les beaux yeux pour soutirer des informations, bien au contraire, il fallait qu’elle se montre courageuse… déterminée plutôt et elle l’était. Elle ne prenait pas des pincettes avec la jeune femme, sa voix était calme, sérieuse et son visage était toujours fermé même si en réalité elle s’inquiétait sincèrement pour la demoiselle. Ce n’était pas de la pitié, c’était de l’inquiétude mais elle n’allait pas jouer sur les mots, elle avait une autre tactique pour le moment même si elle ignorait comment Dawn allait le prendre.
« Puisque vous êtes si curieuse, donnez-moi une bonne raison de répondre à vos questions. » C’était comme-ci un défi lui avait été lancé et Loreen se délectait de ce nouveau challenge. En effet, Loreen était une pâtissière très assidue mais elle était également une sorcière et elle devait avouer que son métier manquait parfois d’adrénaline, de défis à relever. Dawn par sa question lui permettait de renouer avec ces émotions puisque Loreen avait vraiment pour objectif de faire parler la jeune femme, même si cela ne semblait pas évident. Elle devait trouver les mots justes et ce n’était pas une mince affaire. Ainsi, au lieu de répondre rapidement, elle décida plutôt de passer derrière le comptoir pour continuer à boire la boisson qu’elle s’était précédemment préparée. Une gorgée lui réchauffa la gorge et elle se dirigea à nouveau vers Dawn, se positionnant à seulement quelques centimètres d’elle, levant la tête pour la regarder droit dans les yeux. Sa petite taille rendait son geste moins impressionnante qu’elle aurait voulu que ça paraisse mais elle ne se sentait pas si petite que cela à cet instant, parce que son regard était plus intense et déterminé que jamais. Elle n’allait pas baisser les bras, elle allait entendre l’histoire de Dawn: « Vous n’avez rien à perdre en vous confiant à moi, bien au contraire, je peux vous apporter mon aide… Ne serait-ce qu’en vous offrant de la pommade. » Un petit rire nerveux lui échappa, se rendant compte de la blague stupide qu’elle venait de faire étant donné qu’elle se trouvait dans le monde magique et qu’elle s’adressait à une sang pur, qui plus est! Qui allait vouloir de sa pommade, sérieux? « De plus, j’ai bien compris que quelque chose n’allait pas et ces blessures en sont une preuve. Par ailleurs, quelque chose semble vraiment vous perturber. Je sais… je ne fais que des suppositions et vous détestez certainement ça… Raison de plus pour m’éclairer et répondre à mes questions… Pour éviter que j’imagine le pire et que je fasse preuve de pitié même si franchement, ce n’est pas mon genre… Bref... On dit qu'il est parfois bon de parler de ses problèmes à un inconnu… Je valide cette idée. Je ne vous force pas à me parler. J’ai été immature et j’ai fait preuve de jalousie sans même chercher à vous connaître… Montrez moi que je me suis trompée sur toute la ligne sur vous… Car je suis sûre que c’est le cas. » Loreen ne savait pas si Dawn allait appréciée ses dires mais elle ne pouvait pas se montrer plus honnête et déterminée qu’elle ne l’était à présent. Dawn n’avait rien à craindre qui plus est, Loreen savait tenir sa langue, garder les secrets! Elle voulait juste mieux comprendre cette mystérieuse personne qui lui faisait face….
Si Dawn s'était amusée en imaginant la jalousie, aussi infondée qu'inutile, s'insinuer lentement dans l'esprit de la jeune pâtissière, elle se délectait désormais bien moins en constatant les changements qui s'étaient opérés dans son comportement. Elle l'avait traité avec froideur, sans hésitation ou culpabilité, sûrement convaincu d'être dans son bon droit, à protéger quelque chose qui ne lui appartenait pas. La serpentarde avait été l'ennemie, celle qu'il fallait abattre à tout prix. Et la sorcière n'avait pas eu le moindre doute, elle avait rapidement abandonné son rôle de vendeuse et son sourire commercial pour sortir sa baguette et montrer les crocs. Bien qu'elle ne l'ait pas particulièrement appréciée, Dawn ne s'était pas offusquée de son attitude plus que de raison, elle avait été vaine et puérile, mais au moins la jeune femme avait eu le cran de protéger ce à quoi elle tenait. Elle l'avait traité avec froideur, sans hésitation ou culpabilité, sûrement convaincu d'être dans son bon droit, à protéger quelque chose qui ne lui appartenait pas. Le feu vif et brûlant qui avait habité ses prunelles c'était atténué, presque éteint, et son allure, qu'elle s'était efforcée de maintenir distance et froide, c'était radouci. Dawn pouvait aisément deviner ce qu'il se passait dans sa tête, quels genres de questions pouvaient y tourner après la vision qu'elle venait d'avoir. Elle pouvait lire du doute dans son regard, de l'inquiétude dans son expression, mais aussi de la curiosité dans ses intonations. Bien que débarrassé de sa jalousie, le visage de la sorcière n'en était pas moins tenace et fermé. Elle paraissait prête à se battre pour obtenir ce qu'elle voulait et sa volonté affichée agaçaient déjà la Serpentarde. La Blackwood n'avait aucune envie de se retrouver plongée dans une bataille des egos avec une inconnue, ce n'était ni le moment, ni le lieu. Mais la pâtissière voulait des réponses et Dawn sentait qu'elle ne pourrait pas s'en tirer avec quelques paroles glaciales et un peu d'agressivité à peine dissimulée. Si elle avait été plus ouverte aux autres sûrement aurait-elle pu comprendre ce besoin de mettre des mots sur ses interrogations. Mais ce n'était pas le cas et l'attitude de la sorcière n'avait pour seul résultat que celui de l'irriter, jouant ainsi un peu plus avec ses nerfs déjà à vif. Face à ses questions et ses prunelles curieuses, elle avait préféré sa jalousie dévorante.
Dawn n'était pas dupe, elle savait que son seul moyen d'échapper aux questions indiscrètes de la jeune femme serait de prendre la fuite. Purement et simplement. Attraper son sac et tourner les talons. Claquer la porte derrière elle pour disparaître tel un courant d'air. Ça paraissait tellement facile. Et c'était tellement tentant. S'enfuir encore une fois. La verte ne s'était jamais targuée de posséder la bravoure des Gryffondors alors elle se fichait bien de paraitre lâche. L'avis des autres comptait peu à ses yeux. Ce qui lui importait, c'était elle, sa survie, alors si pour cela, elle devait tourner le dos à la sorcière, elle le ferait sans hésiter. Mais bien sûr, les choses ne pouvaient pas être aussi simples. Cette fois-ci, la fuite lui était interdite, elle l'avait compris dès l'instant où ses prunelles s'étaient posées sur la porte de la boutique et que la simple vision de la rue du village lui avait retourné le cœur. Elle n'avait pas la force de retourner dehors affronter les souvenirs terribles que les pavés renfermaient. Nombre de ses démons se trouvaient derrière cette porte et attendaient uniquement qu'elle sorte pour lui sauter à la gorge. Tout était trop frais, trop douloureux pour son esprit malmené et son corps encore contusionné. Elle avait voulu se croire plus forte qu'elle ne l'était véritablement et la réalité lui revenait maintenant en pleine figure. Et désormais, elle se retrouvait coincée dans la pâtisserie de Lucas, à devoir faire face à la curiosité mal placée de son assistante. Certains évoqueraient un retour de karma, Dawn pensait juste que la vie était une belle garce. D'ailleurs, la Serpentarde aurait voulu pouvoir occulter la présence de la brune à ses côtés, mais celle-ci ne semblait pas décidée à la laisser en paix. « Je l’admets, c’était immature de ma part. Je me suis montrée froide dès votre arrivée et je reconnais que ce n’était pas professionnel. Et j’ai tout à coup changé d’attitude... Cependant, vous vous trompez, je ne fais pas preuve de pitié... loin de là. Je ne vais pas me mettre à pleurer parce que vous être recouverte de blessures. Je me comporte ainsi parce que je suis curieuse, curieuse de comprendre ce qu’il vous est arrivé. Je pourrais vous retourner la question par ailleurs... Pourquoi êtes-vous aussi froide tout à coup ? Comme si j’avais touché un point sensible... Je me trompe ? » Dawn la fixa un instant interdite. Elle avait très certainement dû mal comprendre ses paroles, il ne pouvait pas en être autrement. Elle pensait pourtant avoir été claire et lui avoir expliqué que tout ce qui s'apparentait à sa vie privée ne la regardait en rien. Pourtant, de nouvelles interrogations et interprétations continuaient de franchir la barrière de ses lèvres en un flot aussi ininterrompu qu'insupportable. « Pardon ? » Lui demanda-t-elle d'une voix où son irritation ne se cachait plus. Ses mots n'avaient pas été si compliqués que ça, si ? Pourtant, la sorcière s'enfonçait dans son entêtement, défonçant les portes ouvertes et s'aventurant sur les chemins que la Serpentarde lui avait pourtant clairement désignés comme hors-limites. Elle n'avait de toute évidence que faire du savoir-vivre et Dawn se demanda un instant si elle se montrait aussi intrusive avec tous ses clients. Ne comprenait-elle donc pas que l'attaque de Pré-au-Lard restait un sujet particulièrement délicat ? La verte ignorait si elle se trouvait dans le village ce soir-là ou si elle avait été épargnée des horreurs qu'ils avaient vécus, mais ses questions et son obstination à chercher des réponses étaient presque insultantes. Elle secoua la tête. « Par Merlin, j'espère que vous rigolez. Vous osez vous demander pourquoi je suis soudainement si froide ? Après que vous m'ayez traitée comme une adversaire à abattre ? Vous essayez de vous immiscer dans ma vie, vous posez des questions dont les réponses ne vous regardent en rien et vous vous demandez pourquoi je me braque ? » Alors qu'elle venait de lui dire qu'elle ne souhaitait pas s'épancher sur l'origine ou les raisons des blessures qu'elle avait entraperçues, la sorcière lui posait encore davantage de question. Ne voyait-elle pas que son comportement ne suivait aucune logique et qu'en agissant ainsi elle ne parviendrait qu'à s'attirer un peu plus les foudres de la vipère ? « Ma vie privée ne servira pas à assouvir votre curiosité. » Lui lança la Serpentarde, la froideur dans les yeux et une moue déformant ses traits. Elle n'avait pas répondu aux interrogations de ses géniteurs, encore moins à celles de médicomages dont elle avait refusé les soins, ce n'était pas pour servir d'objet d'étude à une inconnue.
Dawn avait bien vu que son petit défi avait piqué l'attention de la brune. Elle avait vu l'éclat s'allumer dans ses prunelles et son expression changer subtilement. Elle était plus résolue que jamais à entendre l'histoire que la verte et argent pouvait lui raconter et semblait également comprendre que Dawn ne se laisserait pas apprivoiser si facilement. Au moins avait-elle raison de ne pas se faire d'illusions. Car si la jeune femme l'avait mise au défi de lui donner de bonnes raisons de lui parler, ce n'était pas pour autant qu'elle accepterait réellement de tout lui raconter. Mais la pâtissière semblait prendre ses paroles particulièrement au sérieux. Aussi ne fut-elle pas vraiment surprise de voir qu'elle ne répondait pas tout de suite à ses dires. En silence, elle l'observa contourner le comptoir pour avaler une gorgée de thé, ce qui lui rappela que le sien était toujours en train de refroidir à quelques pas d'elle, mais elle ne fit aucun geste pour y remédier. Elle n'en aurait eu de toute manière pas le temps, car la sorcière se rapprochait de nouveau. Comme si elle se fichait de la plus élémentaire des politesses ou de l'agressivité non dissimulée de la serpentarde, l'assistante de Lucas franchis les quelques mètres de la Serpentarde, envahissant son espace personnel pour venir se planter juste devant elle, à quelques centimètres à peine d'elle. Si Dawn ne bougea pas elle ne pu empêcher un léger grognement de franchir ses lèvres. Elle l'observa sans sourciller, la sorcière était plus petite qu'elle, et même si ça rendait sa tentative d'intimidation quelque peu courageuse, elle restait parfaitement inutile. La verte lui rendit son regard, la toisant longuement sans un mot. « Vous n’avez rien à perdre en vous confiant à moi, bien au contraire, je peux vous apportez mon aide... Ne serait-ce qu’en vous offrant de la pommade. » Bien que décidée à garder le silence, Dawn ne put s'empêcher de tiquer à l'entente de ses derniers mots. « De la quoi ? » Elle fronça les sourcils. Elle connaissait les potions, les lotions, les onguents, mais la notion de pommade lui était inconnue. Elle se doutait qu'il s'agissait d'un objet moldu mais, elle ignorait ce que c'était ou à quoi cela pouvait bien lui servir dans sa situation. En tant qu'enfant de sang-pur elle ignorait beaucoup de choses du monde moldu. Elle en avait déjà entendu parler par ses camarades de Poudlard et elle avait quelques notions rudimentaires sur le sujet. Mais le monde moldu ne l'avait jamais assez intéressé pour qu'elle cherche à combler ses lacunes. Elle pinça les lèvres, elle n'aimait pas exposer son ignorance, même lorsqu'il s'agissait de quelque chose qui n'avait pas beaucoup d'importance à ses yeux comme la culture moldue. « De plus, j’ai bien compris que quelque chose n’allait pas et ces blessures en sont une preuve. Par ailleurs, quelque chose semble vraiment vous perturber. Je sais... je ne fais que des suppositions et vous détestez certainement ça... Raison de plus pour m’éclairer et répondre à mes questions... Pour éviter que j’imagine le pire et que je fasse preuve de pitié même si franchement, ce n’est pas mon genre... Bref... On dit qu'il est parfois bon de parler de ses problèmes à un inconnu... Je valide cette idée. Je ne vous force pas à me parler. J’ai été immature et j’ai fait preuve de jalousie sans même chercher à vous connaître... Montrez-moi que je me suis trompée sur toute la ligne sur vous... Car je suis sûre que c’est le cas. » Dawn la fixa un instant sans chercher à s'éloigner d'elle. Parler à une inconnue, c'était un concept qui lui avait toujours échappé, elle qui ne parlait que rarement à ses proches, comment aurait-elle pu comprendre ? Si cette inconnue voulait tellement apaiser son esprit torturé pourquoi ne la laissait-elle pas boire son thé tranquillement, mettre de l'ordre dans ses pensées et retrouver la force d'affronter les rues du village sans se sentir étouffer ? Si elle pensait là lui faire une offre généreuse, la serpentarde n'avait pas le même avis. Elle pouvait partir d'une bonne intention, mais sa curiosité, elle, n'en était pas une. Elle eut une expression dédaigneuse et le pencha légèrement en avant, s’approchant encore davantage de la sorcière, comme si elle avait un secret à lui dévoiler. « Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? Ce qu'on ressent lorsqu'on est touché par un Doloris ? Quand un sortilège déchire votre peau ? Ce qu'on pense lorsqu'on voit ses camarades être touchés par des sorts ? Quand on entend leurs cris ? L'effet que ça fait de voir mourir des inconnus ? C'est vraiment ce que vous voulez entendre ? » Un haussement de sourcils ponctua sa petite provocation. La sorcière voulait peut-être l'aider à mettre des mots sur ses traumatismes, mais elle était seulement prête à entendre la vérité. La cruelle, violente et terrible vérité ? Celle qui rendait les nuits de la Serpentarde chaotique et empoisonnait ses souvenirs depuis plusieurs jours ? Savait-elle réellement à quoi elle s'exposait, à quel récit la serpentarde pouvait lui faire ? Les horreurs qu'elle pouvait lui dépeindre ? Dawn secoua la tête, si elle avait pu avoir le bonheur de ne pas vivre cette soirée, jamais elle n'aurait cherché à en apprendre sur ce que les autres y avaient vécu. Peut-être que la brune voulait l'aider, mais elle ignorait à quoi elle s'exposait. Une seconde, ses traits se troublèrent, mais elle reprit bien vite le contrôle d'elle-même. Elle leva légèrement le menton. « Et qu'est-ce que j'ai à gagner là-dedans ? A part revivre encore et encore les souvenirs de cette nuit ? » Elle arqua un sourcil, pourquoi se forcerait-elle à revivre les évènements de cette nuit-là ? Elle doutait que cela puisse apaiser les tourments de son esprit. Et jamais elle ne se torturerait davantage simplement pour plaire à une inconnue. Encore moins pour étancher sa curiosité malsaine. « Je ne suis pas venue ici pour ça et, très franchement, je me moque de l'avis que vous avez de moi, aussi faux soit-il. Je n'ai pas besoin de l'approbation d'une inconnue trop rapide à juger les autres. Savoir que vous ne me jugez plus sans savoir n'apaisera en rien ma conscience. » Dawn aimait à se dire qu’elle n’avait pas besoin des autres pour évoluer, que leurs avis préconçus sur elle ne la touchaient pas le moins du monde et qu’elle se fichait bien d’être détestée pour quelque chose qu’elle n’était pas. Ce n’était que des illusions, des paroles dont elle se berçait pour ne pas se détester de ne laisser personne l’approcher réellement. Mais elle préférait se jeter dans le lac noir plutôt que de l’avouer. Cependant, dans le cas de cette inconnue, ces idées étaient presque vraies. Son jugement hâtif la concernant, la jalousie inutile dont elle avait fait preuve, était assez futile pour que la Serpentarde n’y prête pas attention. Pour qu’elle ne la blesse pas et que quelque part, elle l’amuse même. Si la sorcière espérait jouer sur une corde sensible, elle se trompait. D’ailleurs, Dawn ne comprenait pas son entêtement. « Pourquoi vous, ça vous importe tant ? » Parce qu'au final, c'était ça la véritable question.