D’ordinaire c’était moi que l’on venait voir pour s’épancher un peu sur sa vie, que ce soit de la joie de la tristesse, de la colère, j’avais eu affaire à beaucoup de personnes différentes, mais toutes exprimaient une émotion en venant dans ma pâtisserie. C’était cette relation de confiance que j’avais voulu et réussie à instaurer dans ma boutique qui faisait peut-être son succès. Ça et le fait que j’ai passé la plupart des années de ma vie à travailler potions et pâtisserie, ça ne doit pas être mauvais non plus. Toujours est-il que je n’étais pas sorti depuis quelques jours et j’avais grand besoin d’air frais. Je savais où en trouver : rendre visite à un ami de la même façon qu’ils le font en général. Cette fois, c’était à moi de me déplacer, j’avais déplacé mes horaires pour être un peu plus libre ce soir. J’imaginais déjà la tête de ce très cher barman en me voyant passer la porte de son petit commerce. Il ne lui appartenait pas, mais pour moi c’était tout comme. Il contribuait à maintenir la prospérité du lieu en état et faisait presque partie des meubles, non ? Ou c’était en cours, bref, ce n’était qu’une question de temps. Il est digne de confiance selon moi, suffisamment pour qu’on lui octroie une responsabilité comme celle-là même si ce n’est peut-être pas son projet le plus fou. En voilà une idée !
Je pousse la porte d’entrée, il fait un froid de canard dehors, mais tout va bien, ce n’est pas comme si j’étais une bête à fourrure, certes, et je m’en passerais bien parfois, j’ai juste une bonne veste qui me permet de ne pas choper la crève. J’imagine mal faire de la pâtisserie et créer des petits éléments gustatifs tout en ayant le nez qui coule. J’esquisse un bref sourire à cette pensée avant d’entendre le grincement sinistre de la porte. Plus qu’à repérer la bouille de mon ami. Je crois que je lui avais demandé quand est-ce qu’il était de service et si ma mémoire n’a pas fait des siennes comme elle aime le faire souvent, je ne m’étais pas trompé. Je le repère assez facilement et viens m’installer au bar, tout sourire.
« Hey l’ami, pour une fois, c’est moi qui m’incruste, pas trop déçu ? Tu termines quand ce soir ? »
Sait-on jamais, je pourrais quand même le régaler, même si bière et gâteaux ne font pas forcément bon ménage, on trouvera bien quelque chose à faire. Je ne suis pas du genre à sortir très souvent, mais ici c’est assez calme, on comprend pourquoi il n’y a qu’à voir l’état de certains commerces. Mais bon, moi ce que j’en dis c’est que ça ne doit empêcher personne de boire un coup.
« Alors, qu’est-ce que tu me racontes ? Toujours pas de midinette en vue ? »
La bonne vieille blague de beauf’. Bien sûr je le fais exprès, je n’attends pas de réponse réelle, c’est juste pour le taquiner et pour laisser le monde croire que je suis un pauvre con. Parfois être un peu lourd c’est aussi une forme d’humour. Bon, à utiliser avec précaution et modération, c’est sûr. Comme entrée en matière y’a mieux, sauf que je ne sais pas faire. J’ai un humour de merde, j’assume et c’est ce qui fait mon charme assez bourru ? Alors, alors. À part ça, qu’est-ce qu’il me raconte de beau, pour de vrai hm ?
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Mer 2 Déc - 19:52