« Et n’oubliez pas les trente centimètres de parchemin à me rendre la semaine prochaine ! » lança Lysander à ses élèves qui s’éloignaient déjà en direction du château. Exténué, le jeune professeur relâcha les animaux qu’il avait tenus dans des cages pour le bon déroulement du cours. Les bêtes en question, qui ressemblaient à des petits oiseaux jaunes, ne se firent pas prier pour s’envoler vers le fond de la forêt interdite. Il venait de donner son dernier cours pour la journée. Il se hâta cependant en rentrant au château : il avait un rendez-vous une heure plus tard aux Trois Balais, à Pré-au-Lard, et désireux de conserver sa réputation d’homme ponctuel, il ne pouvait se permettre de flâner dans le parc aux belles couleurs de printemps.

Il dévora son diner en vitesse dans la Grande Salle en prenant tout de même plaisir à observer les visages familiers et les comportements des élèves. Il aimait sonder son entourage, connaitre les moindres secrets de chacun. La curiosité est un vilain défaut comme on dit, mais elle peut parfois être un excellent atout. Connaitre les cartes de ses adversaires permettait de toujours avoir un coup d’avance. La vie n’était aux yeux de Lysander rien d’autre qu’un jeu de stratégies, et il se savait doué en la matière. En effet, derrière son visage d’ange se cachait un homme manipulateur et très coriace, qui obtenait presque toujours ce qu’il désirait. Par exemple, il était très respecté en tant que professeur car il était connu pour ses remarques bien ciblées envers ses élèves agités, grâce aux informations qu’il recueillait l’air de rien en marchant dans les couloirs, ou, comme dans le cas présent, en observant tous ces petits sorciers se raconter les derniers potins en date.

Après être retournés dans ses appartements pour se changer et se rafraichir, Lysander sortit du château et se dirigea vers la sortie, après avoir informé le directeur qu’il se rendait à Pré-au-Lard pour la soirée. Avec les temps qui couraient, même les sorties des professeurs étaient déconseillées, mais Lysander était plutôt du genre à adapter le règlement pour qu’il lui convienne. Il franchit donc le portail de Poudlard et s’engagea sur le chemin menant au village voisin.

Arrivé à la hauteur du pub où il avait rendez-vous, il jeta un œil par la fenêtre en espérant voir son ami déjà installé – il n’aimait pas arriver en premier – mais ne put discerner grand-chose à cause de la clientèle abondante qui se trouvait là. Lysander entra donc, fit le tour de la pièce des yeux et, constatant décidemment que celui qu’il attendait n’était pas encore arrivé, il alla s’assoir sur l’un des tabourets du bar. L’une des serveuses lui adressa un sourire chaleureux : Lysander était un habitué des lieux, et son charme ne laissait généralement pas grand monde indifférent. Le professeur rendit son sourire à la jeune femme et commanda une biéraubeurre.

« On a un rencard ? lui demanda-t-elle d’un air malicieux en lui servant sa boisson dans une choppe.
- Pas tout à fait, » répondit-il avec un clin d’œil.

En effet, Lysander attendait en réalité un ami à lui, Mickey, avec qui il avait été à Poudlard. Faisant partie de maisons différentes, leur scolarité n’en fut pas moins parsemée des quatre cents coups qu’ils avaient l’habitude de commettre ensemble. Les deux garçons avaient un caractère semblable, et c’est ce qui les avait liés. Leur vision des choses, de la limite entre le « bien » et le « mal » avait été discutée et ils étaient tombés d’accord sur le même principe : l’injustice avait tendance à les révolter, bien qu’ils ne puissent admettre de ne l’avoir jamais provoquée. Mais même s’ils suivaient à présent des chemins différents – Mickey avait sa vie sur le Chemin de Traverse où il vendait ses baguettes magiques et Lysander enseignait à Poudlard – cela ne les empêchait pas d’entretenir ce lien d’amitié qu’ils avaient tissé durant leur adolescence. Ce soir, ils avaient convenu d’un rendez-vous pour pouvoir se retrouver et échanger comme deux « vieux » amis.

« Mon père dit que je dois avoir la meilleure des baguettes pour combattre ces gens »

Mickey, derrière son comptoir, leva les yeux au ciel. Ce que les gamins de onze ans pouvaient être crédules parfois... Comme s'il y avait des baguettes bonnes et moins bonnes. C'était complètement absurde. Le père de ce gamin était un ignare. Comme si uen baguette, qu'elle soit de chêne ou de saule, allait leur sauver la mise le moment venu ? Ils étaient fin prêt, plus puissant que jamais. Durant la commémoration, c'était comme si le ministère avait pleinement reconnu leur actes, leur groupe, bref, ce qu'ils étaient. Il lui tendit une nouvelle boite et lui demanda de recommencer l'exercice.

« Bois de houx, plutôt flexible, crin de lic... »
« C'est celle là ! Je la veux ! »

Bon sang. Il allait la lui faire manger sa baguette. Il ne pouvait pas tenir en place celui là ! C'était pas croyable. Il hocha de la tête gentiment, et la remit dans sa boite. Bon. Voilà qui était fait, il la le lui tendit, le garçonnet le paya et repartit de la boutique en sautillant dans tout les sens. Dehors Mickey pouvait voir son père qui l'attendait, visiblement très fier de lui. Il soupira, se disant que peut-être un jour, lui aussi serait dans ce rôle là. Mais vu comme les choses étaient embarqués, il pouvait toujours rêver. Il enfila sa veste, prévint son père que son tour était venu et quitta la boutique familiale des Ollivanders pour un coin un peu plus festif. Il avait rendz vous avec un ami. Un ami de Poudlard, avec qui i avait vécu tellement de chose délirantes dirant leur scolarité qu'il lui était difficile de l'oublier. Lysandre, bien qu'un an le sépare tout les deux, était uen personne attachante. Il avait tout de suite su s'identifier à lui, à cause de leur idée, et de leur passion de vivre de folles aventures dans le château, souvent de nuit. Lysandre avait choisis un bar, à Près-Au-Lard.

Il ne s'était pas rendu sur ces lieux depuis l'attaque. L'ambiance était moins chaleureuse qu'avant. Il pouvait le comprendre beaucoup des commerçants étaient encore sous le choc, traumatisé pour certains. Il fallait dire que l'attaque qui avait eu lieu ici avait été une première. Elle avait provoqué une vague d'horreur et indignation dans la communauté sorcière anglaise. Une fois sur le lieu du rendez vous, ses yeux cherchèrent son amis quelques secondes durant. C'était bondé. Au moins les gens n'avait pas fuis les lieux. Il le trouva, assit sur son tabouret et lui fit un sine de la main. Il se dirigea vers lui à rand pas, tout sourire. Le revoir lui faisait du bien, il se remémorait encore la belle époque.

« Lysandre ! » s'exclama t-il. « Comme ça me fait plaisir de te voir là ! »

Et cela faisait étrange aussi. De ce dire que tout les deux, avait en apparence suivit des destins similaire,s bien rangé, mais que quand on regardait de plus près, Mickey avait fini par abandonner certaines de ces vieilles convictions profondes.  

Lysander détourna difficilement le regard de la jolie serveuse pour voir arriver Mickey. Pour l’accueillir, il lui fit une tape dans le dos et lui rendit son grand sourire.

« Salut mec, » répondit-il d’un ton enjoué.

Il fit signe à la serveuse afin qu’elle apporte un deuxième verre remplie de la même substance que le sien.

«  A moins que tu ne préfères autre chose ? » demanda Lysander alors qu’une choppe de bieraubeurre se déposait d’elle-même sous leurs yeux. Puis il porta lui-même son verre à ses lèvres et but quelques gorgées avant de reporter son attention sur son ami. « Bon, comment tu te portes ? J’imagine que le commerce de baguettes ne faiblit jamais vraiment… Même si l’ambiance doit être différente. »

Lysander parlait bien sûr du terrible évènement qui avait frappé Pré-Au-Lard récemment. L’ambiance dans le village avait radicalement changé. Le bar des Trois Balais était ce soir bondé, car il s’agissait d’un lieu chaleureux et qui paraissait « secure », mais les rues du village étaient quant à elles au plus possible évitée. Personne n’aimait rester longtemps dehors. Et Lysander imaginait que le même sentiment d’insécurité devait habiter les clients du Chemin de Traverse où travaillait Mickey. Lysander avait bien évidemment été affecté lui aussi par ces terribles attaques, mais il refusait de se ranger sous ce climat de peur, d’hystérie de masse. Il fallait garder la tête froide, savoir réfléchir intelligemment. Ainsi le jeune professeur ne se hâtait pas plus que cela lorsqu’il marchait dans les rues en dehors de Poudlard, la peur ne le gagnait que très rarement. Il avait conscience que ce comportement pouvait paraitre suspect aux yeux de certains, mais pour ceux qui le connaissaient, - ou qui pensaient le connaitre – il s’agissait simplement de son attitude habituelle, hermétique  aux effets de masse, fidèle à lui-même. En cela, il se savait proche de Mickey, qui n’était pas non plus du genre à être un mouton suivant bêtement les autres.

« Pour sûr, on vit dans un monde de dingues. Mais nous on se laisse pas faire, pas vrai ? » lança Lysander avec un sourire en coin avant de vider d’un trait sa choppe de bieraubeurre.

En cela, Lysander ne voulait pas dire qu’il se sentait indifférent face aux évènements qui menaçaient la population sorcière – et même moldue -, il voulait simplement signifier qu’il se sentait supérieur au commun des mortels, de par sa grande intelligence et capacité de réflexion. Et sa modestie légendaire. Il n’était pas encore né celui qui parviendrait à lui foutre les jetons ou à le déstabiliser complètement. Du moins, c’est ce dont il était persuadé.

Non il avait bien raison, le commerce des baguettes ne faiblissait jamais. Il avait bien de la chance d'ailleurs. De nombreux commerces semblaient souffrir parles temps qui couraient. Pas lui. Il y avait même une certains recrudescence de sorciers qui venaient demander des conseils pour leur baguettes. Généralement Mickey recevait des questions du style « comment faire pour que ma baguette ne me lâche pas ? » « comment la rendre plus puissante ? » Les gens avaient peur, et tout cela se lisait dans leur yeux, leur questions. Ils voulaient tous la baguette qui les sauveraient en temps voulu mais ça, le jeune homme n'était hélas pas enclin à leur donner. Après tout, il était juste un simple marchand, certes, très connaisseur, et n'avait pas de baguette à sa connaissance qui soit complètement invincible. Pour lui, aucune baguette ne l'était. Ce qui faisait la baguette, c'était aussi l'homme qui la maniait.

« Bien sûr ! Si on commence à faiblir, on est mal barré, c'est moi qui te le dis », ajouta t-il en regardant ailleurs.

On vint leur apporter leur commande et il leva son verre à des jours meilleurs. Au fond il savait bien qu'il mentait. Il savait très bien que lui et les autres avaient prévu d'autres petites « surprises » au monde sorcier et que le ministère n'avait pas fini d'entendre parler d'eux.

« Tu feras tout de même attention hein ? Le danger est partout. »

Et s'il savait... sans vraiment le vouloir, Mickey avait un don pour balancer des phrases bourrées de double sens à n'en plus finir. Mais pas Lysander, il ne ferait pas de mal à son ami. Il avait déjà touché le grand frère de Seila durant l'attaque de Prés-Au-Lard, et pourtant, il lui était cher. Il refusait de continuer. Les autres, pourquoi pas. Mais il y avait des limites à sa méchanceté quand il s'y mettait. Sa marque semblait le picoter quand il se remémorait les souvenirs de l'attaque. Il revoyait les visages des élèves complètement affolé, cette gamine qui pleurait sous un stand, un vieux sorciers qui était tombé sous la main d'un de ses collègues, tentant de protéger son stand et ses occupants... il entendait encore leurs cris, la panique et ressentait encore leur peur. Au début, il avait trouvé cela horrifiant. Mais il s'y était fais. Il s'y était fais à sa nouvelle vie. Mickey n'avait plus peur d'entendre les cris ou la peur. On lui avait appris à tout stocker, à tout garder au plus profond de lui. Pourtant cela ne lui ressemblait pas tant que ça, devenir totalement imperméable aux gens... lui qui avait toujours été un ange avec les autres. Peut-être trop justement. Peut-être que l'on s'était trop payé sa tête et celle de sa famille. Depuis trop longtemps. Il avait souffert de certains préjugés, souvent infondé. Et au fond, Mickey n'avait trouvé qu'une seul parade pour riposter. Rejoindre l'autre côté.

« Et toi alors, pour tes élèves, cela à du être dur... Mais je suis sûr que tu as su les rassurer, tu n'est pas devenu professeur pour rien ! »