Jeremiah. Jeremiah le charismatique. Jeremiah le bourreau de travail. À la lumière de sa bougie, à la clarté de ses ambitions, il appose sur ce parchemin vierge sa fine écriture sous l’encre de sa plume. À la pénombre du reste de la pièce, à la noirceur de ses regrets de ne pas être avec elle. Sous un refus total de ces pensées, il secoua vivement la tête s’ébouriffant de sa main gauche la chevelure et se tapotant légèrement le visage – ou plutôt la joue. Son regard se fit sévère, son regard se fit lourd – de culpabilité – assez pour lui rabaisser les paupières sur ses yeux. La paume contre son front, la rage à travers son poing, ce même poing élança toute cette mélancolie pour une première et espère-t-il pour une dernière fois. Sa tête épousa le creux du pli de son bras, couché contre son bureau de travail. Entre ses dents grinçaient le devoir de continuer ses études et entre ses larmes, roulant sur sa joue s’étalait une douce pensée pour elle. Il prit son parchemin et le rejeta du revers de la main en faisant tomber à ce fait même l’encrier. L’encre coulait abondamment – tout comme ses larmes. Elle évoquait ce mépris de lui-même, ce désir de l’avoir – de la voir. Mais il s’était promis. Pas pour lui – pour elle. Autrefois avait-il refusé de prendre au sérieux ce qu’il entamait au niveau scolaire, comme sa mère le voulait, comme sa mère le souhaitait. Puis, elle est morte. Morte dans les bras de ses remords les plus profonds. Tout cela, parce qu’il n’a pas voulu faire ce qu’il avait à faire. Tout cela, parce qu’il a préféré s’amuser et non travailler. Tout cela, à cause de lui.
De nature calme, de nature posée était-il. Le contraste, le voici. Lui, refoulant tout le mépris qu’il avait envers sa propre personne balayer d’un seul bras, balayer d’un seul regard emplit de larmes – emplit de sa tristesse. Assouvir sa soif de désir d’un coup sec pour ensuite se diriger sur cette même route en compagnie d’Evangeline et bien trop aveuglé par cela, te voilà à regarde le sang, à regarder l’envie de périr – de mourir – au lieu de la voir elle s’éteindre à tout jamais. La rage le consumait et ces scénarios lui déplaisaient. Du fait qu’il abandonnait cette idée, mais ne pouvait s’empêcher de ne pas avoir une pensée – pour elle. D’avoir sa voix mielleuse caressant tes songes, de son regard bleuté dans lequel tu aimerais bien te noyé et puis son sourire, son doux sourire et ses tendres lèvres pour qui tu donnerais n’importe quoi afin qu’elle s’appose sur toi – sur les tiennes. Décidemment fourbe, décidemment déterminé, il prend son veston, il ramasse l’encrier et va chez elle. Chez Evangeline.
Plusieurs jours se sont écoulés sans qu’il ne l’a voit, sans qu’il ne prenne réellement contact avec elle. Chaque jour en son absence, il s’imaginait qu’elle vienne à lui et lui dise « C’est fini. » Non. Ce n’est pas fini. Il refusait, il réfutait, mais ne pouvait pas non plus être surpris du contraire. Toujours absent, toujours omniprésent, il l’a délaissait poussé par ses peurs comme un gamin. Un vulgaire gamin qui prétendait, qui naviguait à travers les excuses, à travers son passé sans quoi il ne peut avancer. Un simple gamin. Il s’en voulait.
Et le voilà, devant sa porte, le poing collé contre le bois de sa porte, le regard bas et les larmes hautes. Il cogne, doucement. Puis la porte s’ouvre lentement – mais sûrement. Une demoiselle ouvre. Laquelle ? Evangeline ?