« Je ne veux pas de cet enfant.. Je ne peux pas, je n'y arriverai pas ! ». La jeune femme s'était entrainée durant des heures devant le miroir pour réussir à prononcer ces mots. Ils lui paraissaient inconcevables, mais ils étaient bien vrais. Du haut des ses vingt et un ans, elle sortait tout juste de Poudlard et n'avait ni les moyens ni la force pour éduquer un enfant. Sa propre éducation était à peine terminée ! Elle se tenait debout sur le perron du grand manoir Avery, il délugeait et la pluie lui fouettait le dos à cause du vent. En ce moment même, la tempête reflétait bien ses émotions : la rage et la tristesse de devoir commettre cet horrible acte. Elle essayait de se convaincre que c'était pour le bien du nouveau né, qu'il allait être choyé grâce à tout l'argent de son père, qu'il n'aurait jamais aucun problème ... mais cela ne suffisait pas à la rendre moins malheureuse. Elle essaya tant bien que mal de s'essuyer d'une main la larme qui s'échappait le long de sa joue, tout en parvenant à tenir le bébé dans son autre bras. Il n'avait rien demandé, et le voilà sans mère pour le soutenir tout au long de sa vie. « Prend le ! S'il te plaît … », sanglota-t-elle. L'homme à qui elle parlait, le père de l'enfant, ne semblait contenir aucune émotion. Il prit le garçon dans ses bras d'un geste dur, et ferma la porte au nez de la jeune femme. Ce fut la dernière fois qu'elle le vit. Elle se retourna et s'enfuit en courant, emportant ses secrets avec elle.


« Regarde mon fils l'état de ces gens … Ils ne sont pas dignes d'être des sorciers, leur sang n'est pas le bon. Le nôtre l'est. Comprends-tu le dégoût qu'il faut avoir pour eux ? » C'était plutôt de la tristesse que ressentait le jeune Edward, mais du haut de ses huit ans, il n'était pas capable de le lui avouer. Ils se baladaient dans Londres et observaient une famille de sang-mélés. Le garçon ne comprenait pas pourquoi tant d'histoires étaient faites à propos du sang pur ou impur, il n'en saisissait pas encore l'importance que le monde entier y tenait. Pour lui, le sang est juste rouge et chaud, et apparaît lorsqu'on se blesse, mais il ne définit en aucun cas le statut d'une personne. C'était justement ce que son père tentait de lui expliquer. « Mais pourquoi est-ce si grave ? Ils font de la magie, c'est ça qui est important, non ? ». Un petit rire sarcastique sortit de la bouche de l'homme qui marchait à ses côtés. « Tu ne comprends pas ! Ils ont trahi leur propre clan en côtoyant les moldus ! Ils nous salissent tous ! Ils devraient être bannis … Tu ne dois jamais leur adresser la parole, tu m'entends ?! Ils n'en valent pas la peine … Tu es meilleur qu'eux tous réunis. ». Ces mots semblaient durs, mais ils étaient bien réels, et telles étaient les pensées de la plupart des sang-purs. Le petit garçon n'osait plus les regarder, il s'en sentait réellement coupable, mais il ne comprenait pas encore la gravité de la chose. Toutes ces histoires étaient bien trop compliquées pour son jeune âge.


Le train allait très lentement, ils étaient vraiment loin d'arriver. Heureusement pour eux, Poudlard n'était pas près de s'envoler, et le buffet les attendait bien sagement. Tous étaient stressés, pressés de savoir dans quelle maison ils allaient atterrir. Edward ne savait pas vraiment où il voulait se retrouver. Toute sa famille est allée à Serpentard, mais lui n'avait pas l'impression d'y appartenir. Il se sentait différent. « Pour moi, ce sera chez les Serpentard que j'atterrirai, j'en suis presque sur, mais surement pas chez ces horribles Gryffondors. Rien que l'idée d'y penser me donne envie de vomir ! ». L'ensemble du petit groupe rigola bien au propos d'un des jeunes hommes, sauf Edward, qui regardait le paysage défiler par la fenêtre. Il était dans ses pensées, comme souvent. Une fille arriva dans le compartiment, voulant savoir si une place était libre, l'intégralité du train étant déjà remplie. « Surement pas pour toi ! Dégage de là, tu me donnes la nausée ! », lui lança le même garçon que tout à l'heure. Décidément, un rien le révulsait. Edward savait bien que cette fille était une née moldue, une « sang de bourbe », comme dirait son père. Il préférait qu'elle ne reste pas ici, qu'elle s'en aille avant que les autres ne l'attaquent encore plus. L'adolescent n'avait jamais aimé se mêler de toutes ces histoires. Il ne les côtoyait pas, mais il ne les attaquait pas non plus. En réalité, il s'en fichait un peu. Il était plus préoccupé par la future maison qui allait l'accueillir. « Je parie qu'aucun sang de bourbe sera chez Serpentard, ce serait une vraie honte. Je suis sure que mon père ferait un scandale ! ». Cette fois, c'était une fille qui avait l'air bien hautaine qui avait prononcé ces mots. Tout le monde rigola une fois de plus. Edward n'en pouvait plus et mourrait d'envie de partir d'ici et d'arriver à Poudlard pour quitter ces gens. Dans quel wagon avait-il atterrit ?


C'est depuis son premier jour à Poudlard qu'Edward se doute que quelque chose cloche chez lui. C'est lorsque le choixpeau annonça haut et fort « Gryffondor » qu'il comprit qu'il était différent de son père et de toute sa famille. Il était en quatrième année lorsqu'il voulu en savoir plus sur sa mère. Il avait alors dix-sept ans, il venait d'atteindre la majorité et il voulait comprendre qui il était vraiment. Il prit un an avant d'obtenir une quelconque information venant de son père. Il réussit à lui décrire son physique et lui donna son nom, qui apparaissait sur le carnet de naissance de l'adolescent. Son père ne réussit à lui en dire plus, ne la connaissant pas vraiment. Il l'avait rencontrée dans un pub, et le soir même l'avait revue dans un lit. Il lui donnait à peu près vingt-cinq ans, peut être moins. Lui en avait trente-deux à l'époque. Edward se contenta de ces maigres informations pour en rechercher d'avantage. Il se renseigna chez des sorciers, au ministère de la magie, mais également chez des moldus. C'est au bout de quelques mois qu'il réussit à obtenir son adresse. Il du rassembler beaucoup de courage pour avoir le cran d'aller la voir, mais il le fit. Il sonna à la porte d'une petite maison typiquement anglaise. Il attendit suffisamment longtemps pour observer les environs. Une balançoire se trouvait au fond du jardin et des vélos étaient posés contre la façade. Un élan de tristesse le remplit quand il comprit qu'elle avait totalement refait sa vie et qu'elle avait des autres enfants qui avaient eu la chance d'avoir une mère. Une petite fille de pas plus de six ans lui ouvrit la porte. « T'es qui toi ? Tu viens nous garder ? » Elle partit en courant, appelant sa mère en hurlant pour lui demander pourquoi elle ne lui avait pas dit qu'elle sortait. La porte était restée ouverte, Edward en profita pour faire quelques pas hésitants dans l'entrée. Il observa des photos d'une famille qui avait l'air heureuse, sans aucun soucis pour les déranger. Il tourna la tête et aperçu sa mère qui le fixait. Il avait compris qu'elle l'avait reconnu immédiatement. « Que fais-tu ici ? Comment m'as-tu trouvée ? ». Ce n'est pas exactement ce qu'il pensait entendre, mais il s'en contenta. Il se mit à lui raconter que cela faisait longtemps qu'il la cherchait car il voulait savoir qui il était vraiment. Elle le fit entrer dans un petit salon cosy et commença à lui raconter ce qu'elle était devenue, tout en restant froide et distante. C'est après une trentaine de minutes qu'elle lui pria de partir. « On ne rattrapera jamais le temps perdu … J'en suis désolée. ». Elle n'avait pas l'air désolée du tout. « Mais pourquoi ? Pourquoi as-tu fait ça ? Qu'avais-je fait de mal ? ». Il n'arrivait toujours pas à comprendre, cela ne lui avait rien apporté. « Ce n'est pas toi qui t'es trompé, c'est moi. Je n'aurais jamais du rencontrer ton père. Il ne m'aurait jamais parlé si je ne lui avais pas menti !, s'exclama-t-elle. Je suis née moldue. »


Le jeune homme se réveilla en sursaut. Il avait encore passé toute la nuit à rêvé de ce jour où tout changea. C'était la rentrée, mais il n'avait vraiment pas envie d'y retourner. Sa valise était posée sur le sol, sa tenue pliée sur une chaise. Tout était déjà prévu. Il s'étira un moment puis s'extirpa enfin de son lit. Il se changea et alla se brosser les dents sans déjeuner. Il n'avait pas du tout faim. Il descendit les marches du grand escalier une à une, sa valise flottant dans les airs à ses côtés. Son père l'attendait déjà en bas, prêt à lui tenir le même discours que l'année dernière. « Tu as fini de te préparer ? , lui demanda-t-il. » Il reçu en seul réponse un petit grognement endormi. « Je te préviens, si tu révèle notre secret à ne serait-ce qu'une seule personne, ne compte pas reposer un seul pied ici. Tu m'entends ? Jure moi de te tenir ! » - « Oui père, ne vous inquiétez pas, je ne dirai à personne que je suis la honte de toute la famille, dit-il d'un ton sarcastique. ». La journée commençait bien. Edward avait finalement plutôt envie d'aller à Poudlard, pour ne plus voir à longueur de journée le dégoût dans les yeux de son père quand il le regarde. Il se retourna et sortit par la grande porte du manoir en lançant joyeusement un « à l'année prochaine ! ».