It might seem crazy what I'm about to say ; sunshine she's here you can take break
« Philosophes écoutez cette phrase est pour vous : le bonheur est un astre volage. Qui s´enfuit à l´appel de bien des rendez-vous, il s´efface, il se meurt devant nous. Quand on croit qu´il est loin il est là tout près de vous, il voyage, il voyage, il voyage. Puis il part, il revient, il s´en va n´importe où ; cherchez-le…il est un peu partout. »
- cinq ans -
« Marcus ça va ? Parle moi, bon sang, je t’en prie. » Moa est là, assise : elle panique. Ses jambes tremblent et des larmes chaudes coulent sur ses joues rosées. Ses iris affolés vacillent et elle ne peut que fixer ce corps qui git dans ses mains, tête posée sur ses genoux. Il essaie de parler mais il n’y arrive pas. Elle aimerait parler, elle aussi, mais elle ne sait pas quoi dire.
Ironie du sort. L’enfant sait bien que c’est de sa faute. Elle sait bien qu’il voulait rentrer mais qu’elle ne l’a pas écouté parce qu’elle voulait jouer encore. Ses caprices enfantins saupoudrent son innocence d’une glace meurtrière. Et si dans ses mains il laisse sa vie jamais l’inconsciente ne saurait se le pardonner. La main de son frère se lève et saisit son poignet pendant que d’un geste bienveillant elle replace une mèche de ses cheveux en arrière, afin qu’il y voit plus clair.
« Papa… » Ni deux - ni trois, elle comprit de suite et il ne lui en fallu pas plus pour qu’elle ne se lève et court en direction du jardin. C’est jour de fête aujourd’hui et Keegan senior a invité quelques amis à venir fêter l’indépendance. Essoufflée, la gamine s’écroule aux pieds de son père en s’accrochant à la manche de sa chemise et en tirant férocement.
« C’est…Marcus…crise. » Elle reprend son souffle.
« Papa, Marcus est tombé et sa tête à cogné le sol. Il y a du sang partout. » Affolé, le voilà qui se dirige à travers la véranda et se précipite ensuite en direction de l’aire de jeu. Moa regarde, au loin, impuissante. La culpabilité ronge sa candeur. Le rythme de son myocarde s’est adoucit mais sa tête elle, tambourine. Cette nouvelle alarme sonne le glas de sa frivolité avec son frère. Et elle se jure que dorénavant jamais plus elle n’en fera qu’à sa tête. A deux.
Pour toujours, à jamais. Etre deux mais ne se sentir qu’un. Encore faudrait-il qu’il s’en sorte, qu’il ne l’abandonne pas. Inconscient, Marcus ne bouge plus. Il ferait presque peur. Quand la peur s’immisce dans la folie des enfants, qui donc à le pouvoir de ralentir le naufrage ? Les bras d’une mère qui caressent, de ceux qui serviraient tant à la petite Moa qui pleure, en retrait. Mais de mère elle n’a connu. Plus intéressée par le modeste héritage de ce fils de banquier, elle n’a vu en leur père qu’un moyen d’enrichir son ambition. Mais les marmots n’étaient pas dans le contrat. Loin d’être faite pour être mère, elle a vite fait ses valises.
La fugituve. Admirez la force de ce père qui seul élève deux enfants en mal de mère. Sa superbe lorsqu’il se précipite à l’intérieur, son fils dans les bras, n’a d’égal que sa précipitation. La chute fût brutale et l’arbre si haut. Les mots sont vides et les pleurs hypocrites. Avant que son père ne puisse bouger, la poupée se dirige en direction du téléphone pour appeler les secours, elle sait que ce soir, son frère ne rentrera pas à la maison. Elle fait preuve de courage et de fermeté et sa voix ne tremble pas lorsqu’elle épelle le nom de sa rue. Elle remet les pleurs à plus tard, ce n’est plus de temps qu’elle manque. L’écorché ouvre un instant les yeux dans un dernier effort et son regard lui est adressé :
« Moa. » Pardon.
- dix ans -
C’est marrant Londres, mais c’est triste aussi. Les gens stressent et se pressent. Le soleil brille, et pourtant, personne ne rit. Des visages inconnus se succèdent et ne se ressemblent pas. Les avocats en tenue du dimanche traversent les rues avec hâte alors que les tenanciers crient aux quelques ivrognes du café d’aller faire leurs affaires un peu plus loin. Les gens se connaissent et pourtant ne se saluent pas. C’est l’inconnu de la paresse. Les yeux fatigués des mères de foyer se posent sur les étales avec une aisance particulière. Et Moa, ça la fait sourire. Sur les toits de Londres, couchée à côté d’une cheminée, elle regarde ce ciel qui lui semble différent chaque jour. Hier, elle rêvait du Mexique, aujourd’hui, c’est Paris. Paris et ses cafés. Les viennoiseries qui embaument et qui charment les passants qui allient leurs pas à la gourmandise.
« Je parie que t’oses pas. » Tout en se positionnant sur le flanc, elle s’appuie sur son coude et fixe son frère dans les yeux.
« Que j’ose pas quoi, Marcus ? » Le malicieux sort de son sac une boite d’œufs qu’il a acheté un peu plus tôt dans l’après-midi.
« T’es pas sérieux ? » Il l’est.
« Tu me prends pour qui ? » Taquine et joueuse, prête à relever n’importe quel défi, la voilà qui lance le premier œuf en tâchant de ne pas viser la tête d’un passant malheureux. Gagné. En plein sur la mallette. Et il râle, l’homme d’affaire, pendant que les jumeaux reculent d’un pas avant d’éclater de rire. C’est leur rendez-vous quotidien. Un moment à deux qu’ils viennent passer tous les jours sur ces toits qu’ils connaissent par cœur. Une routine qui leur permet de gaspiller leur temps convenablement, à leurs dires. Des cancres. Voilà ce qu’ils sont lorsqu’ils sont réunis. Un tout seul, ça passe encore. Mais deux à la fois, c’est invivable. Mais c’est souvent lui qui la pousse à faire des bêtises, il la défie. C’est leur jeu à eux. Parce que de toute façon à deux, ils se croient invincibles. Leur père est fatigué, mais ils sont bien trop jeunes pour s’en rendre compte, encore plus pour s’en soucier. Après une bonne demi-heure à lancer des œufs, ils s’affalent tous les deux à nouveau et perdent leurs perles océanes dans la profondeur de ce céleste paysage. «
Elle te manque pas à toi, parfois ? » Un soupir exaspéré vient rompre l’harmonie du chant des oiseaux qui, premièrement timide, a su se mêler à l’euphorie des klaxons.
« On l’a pas connu Moa, je vois pas pourquoi elle me manquerait. » Elle ne le montre pas, mais au fond, cette indifférence la blesse. Parce que d’un côté, elle en souffre elle, de l’absence de sa mère. Sa douleur comble les sillons de ses cicatrices profondes. L’amour d’une mère, la douceur d’une femme ; ils n’y ont pas eu le droit.
« Mais tu sais, je me dis souvent que j’aimerais bien la rencontrer quand même, histoire de savoir si je lui ressemble. Tu crois que je lui ressemble toi ? » Le garçon se lève et ramasse son sac avec hâte.
« Arrête tes conneries. Tu t’accroches à un fantôme, elle nous a abandonnés. Je veux plus en parler, je lui crache au visage moi si je la vois. » Il avance quelque pas et la dureté de ses mots encore résonne dans l’inconscient de la candide.
« Bon, tu viens ? Papa va s’inquiéter. » Parce qu’au fond ; il a toujours été plus froid, plus dur aussi. Et elle, Moa : elle idéalise. Un rien l’émerveille et elle reste persuadée que le monde est beau, que le monde est bon. Et tout en quittant ce toit ce soir, elle emporte avec elle l’amertume des regrets qu’elle voile derrière un mensonge incandescent.
- onze ans -
D’une main fatiguée, elle essuie les gouttes qui dégringolent sur son front immaculé. Son hémoglobine largement dépouillée de son quota d’oxygène bat dans ses veines une mélodie inconnue. C’est difficilement qu’elle a franchit la ligne d’arrivée mais enfin elle renaît ; elle se sent vivre. Pour l’heure elle souffre, appuyée sur ses genoux, tâchant vainement de reprendre son souffle : ce n’est pas ce qui compte. Les courses : elle adore ça. Se dépenser lui permet d’oublier, oublier l’abandon d’une mère qui ne l’a jamais aimée, oubliée cette part sombre que Marcus tient tant à lui cacher. Elle sait bien qu’il souffre, elle n’est pas bête, encore moins aveugle, mais elle se tait. Un jour viendra où il lui parlera. Après tout, c’est comme ça les jumeaux. Des secrets qui n’en sont pas vraiment. Quelques confidences sur l’oreiller qui très certainement auraient gagné à rester secrètes. Elle n’est pas vraiment première, plutôt bonne deuxième même, mais elle s’en fiche parce que Eleanor est grande et svelte et que pour égaler une seule de ses foulées, elle doit en faire trois. Parce que Moa, elle n’est pas bien grande, plutôt petite même. Elle fait partie de ses personnes dont le cœur n’est pas proportionnel à la taille, de celles qui ne savent pas voir avec les yeux mais qui voient avec l’âme. Un peu plus loin, elle aperçoit Hope qui a besoin que son père l’aide à marcher : elle a fait une mauvaise chute et Moa, ça, ça la chagrine beaucoup. Elle s’approche d’elle et lui lance un regard compatissant :
« Faut voir le côté positif, t’auras le droit de manger plein de chocolat. » Un sourire candide éclaire son visage. Ses pensées n’ont pas été bien loin et elle n’a pas tourné sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler. Pourtant, elle connaît les restrictions que s’impose Hope pour ne pas grossir et pour un jour battre Eleanor. C’est comme ça les filles, souvent : une rivalité désobligeante. La brunette aussi serait heureuse de vaincre un jour, rafler la première place, mais elle n’est pas prête à en faire une priorité. Pour elle, l’athlétisme est plus une passion qu’une contrainte et jamais, oh grand jamais, elle ne se priverait de chocolat.
« Tais toi un peu Moa, tu m’aides pas là. » Hope ne s’arrête pas, continue son chemin. Des histoires comme ça, elle en a tous les jours, Moa. Elle est jeune, encore un peu maladroite et elle plonge souvent tête la première dans des situations embarrassantes parce qu’elle ne réalise pas qu’elle ne pense pas comme tout le monde, qu’elle idéalise.
Maladresse dangereuse… et pas que dans les mots. Il y’a deux ans, elle a cassé tout un service d’argenterie parce qu’elle était trop occupée à se réjouir de la fête organisée au soir pour regarder où elle mettait ses pieds. C’est une rêveuse. Une enfant sauvage, un peu brut. Une perle d’immensité encore brute, à tailler. De la vie, elle ne connaît que ce dont son père ne lui a pas épargné. Les factures à payer, les assurances, les décès ; tout ça, elle ne connaît pas. Non, ce n’est pas vrai : de décès, elle en a vécu un. Celui de son grand père. Et le calme après la tempête l’a plus apaisée que chagrinée.
Que la maladie l’emporte, au moins, il ne souffrira plus. - quatorze ans-
Son plus grand rêve ; c’est voler. Oublier un instant les tracas quotidiens. Plus d’inquiétudes sur la voie qu’empruntera Marcus. Vivre à en crever. Voler. Toucher du bout des doigts la légèreté d’un nébuleux volatile. Et s’approcher du soleil si près à s’en cramer les ailes. Crier au temps qu’il ne l’arrêtera pas et qu’un jour, elle sera vraiment heureuse. Voler. Partir en voyages et ne revenir qu’au petit matin. Forcer le destin. Prouver à ce monde que les rêveurs encore ont leur place dans cette vie où la franchise s’efface.
Douce rêveuse. Tout quitter sans culpabiliser quand on pense à ce que l’on laisse derrière. Recommencer ailleurs, là où le ciel serait un peu plus beau, un peu plus bleu. Là où les mères n’abandonnent pas les enfants. Voler. Toujours plus haut, toujours plus vite. Elle laisse son âme emprise aux aspirations d’un climat un peu plus doux. Voyages. Envoûtants paysages. Elle aimerait découvrir le monde ; voir si les tangos espagnoles ont vraiment ce rythme suave qui bat à l’unisson de deux cœurs endiablés, se renseigner sur l’Italie et sur cet art romantique qu’elle n’a que peu connu, et la chaleur du Brésil, la cuisine asiatique et le chocolat suisse. Voler. Atteindre les sommets les plus hauts, plonger dans les crevasses les plus profondes : découvrir. Découvrir le monde. Mais Poudlard, c’est bien aussi, pas vrai ? C’est comme voler, au fond : atteindre de nouveaux horizons. La gondole vacille et elle se perd dans la contemplation de ce lac un peu trop sombre. Elle y voit l’écume des souvenirs engourdis de milliers de vies. De milliers d’enfants pressés qui, au milieu de ce paradis rupestre aspirent tous à des finalités différentes ; l’un voudrait finir ministre, l’autre faire partie de l’ordre. Le vent souffle dans des arbres un peu trop vieux, usés. Il conte une comptine qu’elle ne comprend pas. Des milliers de rires. Des milliers de pleurs. Emerveillée par la magie qui englobe ce lieu, elle ne sait où donner de la tête.
« Et les inséparables, un pronostic sur la maison ? » Inséparables. Marcus et Moa. Parce que de sa main encore chétive elle est persuadée qu’il tremble de l’intérieur, lui aussi. Alors, elle s’est saisit de la sienne au moment de monter sur le bateau et ne l’a plus lâchée depuis. Mais tout à son contraire, les traits de son frère sont tirés, fatigués. Il ne s’émerveille plus, il observe : il calcule.
« Des maisons ? » Moa ne connaît rien au monde sorcier, n’a d’ailleurs jamais entendu parler des diverses maisons qui s’illuminent le soir de la répartition. Persuadée que les élèves seraient classés par année, cette question la déboussole. L’élève abasourdi hausse les épaules et se retourne vers ses camarades en continuant de discuter au sujet des quatre blasons. Elle perd son regard sur les légères ondulations du canal.
« Tu crois qu’ils vont nous séparer ? » Il serre sa main un peu plus fort dans la sienne.
« Jamais Moa, jamais. Ils sont même pas cap d’y arriver. » Et étrangement, ça suffit à la rassurer. Elle tend le petit doigt et il y mêle le sien.
« Promis ? » Le pacte est scellé et elle sait à cet instant que tout ira bien. Non, elle n’a pas peur. De toute manière, lorsqu’il ne s’agit pas de Marcus, Moa n’a jamais peur.
Ne jamais dire jamais. Son courage est vaillant mais la peur ronge et atteint même les héros d'autrefois. Car ceux d'aujourd'hui ne sont que de pâles copies. Elle a déjà trouvé le sien : son père, ce héro.
- seize ans -
Une foulée, après l’autre. Un rythme un peu rapide et pourtant, elle ne ralentit pas. Ses pas décidés se mêlent entre ciel et terre d’une façon particulière. Ses pensées ne vagabondent pas ; elle observe. Quelques perles de fatigue caressent son épiderme dans un léger chatouillement. Les minutes passent, roulent, glissent. Le temps se perd ; il ne reviendra pas. Vider les catacombes de son imagination pour retrouver un certain rapport à la réalité. Son trop plein d’énergie souvent lui a desservi, alors elle court. Des minutes durant, tout en tâchant de faire le vide dans un esprit un peu trop encombré, elle enchaine machinalement les foulées. Dehors, il fait gris, mais il ne pleut pas. Pourtant la pluie ne la gênerait pas. Le cliquetis des gouttes qui s’écrasent contre le gazon usé la berce, tout comme il la motive. Elle court au rythme des goutes qui se meurent, qui s’entrechoquent. Le vent siffle dans les arbres et brasse quelques odeurs enjôleuses. Du pin, et là-bas, un châtaigner. Elle adore les châtaignes, Moa, et elle raffole des marrons glacés. Plutôt gourmande ; le sucré l’enivre. Aucune addiction à signaler, docteur. Et ce si on oublie sa folie du chocolat, du beurre de cacahuètes et des patacitrouilles. Et dans sa course effrénée ; elle voit les marins, au loin. Et ils boivent et chantent. Ils parlent fort et jurent devant les enfants qui passent. Elle aperçoit la mer, elle aperçoit les mères. Tendres, douces, elles bercent leurs espoirs par à-coups d’amour inconditionnel. Et ces enfants qui rient, ces enfants qui courent. Ils ignorent la douleur car elle ne leur est pas destinée ; ils sont pauvres pourtant et, au coin des rues, ils chipent quelques pommes au marchand du coin. Elle se dessine un monde, un paradis. L’accélération de ses jambes fatiguées dissuade un écureuil de lui couper la route et, assez vite, elle se retrouve devant le sentier qui mène à la porte du château. Sa main se porte à son visage et elle louche sur le quadrant. Elle a déjà une bonne dizaine de minutes de retard. Son jogging matinal se transforme en terrible corrida et en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, elle se retrouve devant sa salle commune. Son amie est déjà là, qui l’attend.
« Deux minutes. Tu peux compter, dans deux minutes je suis là. » Elle se précipite à l’intérieur et se rince avec hâte d’un coup de jet malhabile. Dans son armoire, elle se saisit de quelques étoffes, un jean mal repassé et un vieux t-shirt à imprimés. Une chaussure au pied, elle sautille sur le second pour atteindre la porte du dortoir tout en enfilant la deuxième. Elle se précipite en direction du point de rendez-vous tout en finissant d’enfiler un pull chiffonné. Pour se faire pardonner, elle saute dans les bras de son amie avant de la tirer par la main pour éviter qu’elle n’ait le temps d’émettre la moindre remarque. Et l’histoire aurait pu se terminer ainsi. Oui. Car elles auraient pu rejoindre Pré-au-Lard en se contant des histoires aberrantes et en riant à gorges déployées. Elles auraient pu remplir le silence d’anecdotes légères et de complicité passagère. Elles auraient pu… Mais le violon grince, l’accordéon suffoque. La douce mélodie de leur amitié se fait profane. Et la voilà de retour.
La vipère.. Elle rampe dans son propre venin et parsème le sol de ses injures souillées.
« Et la Sang-de-Bourbe, on est de sortie ? » Moa se tait, elle continue d’avancer. Après tout, à quoi bon répondre ? Elle fait partie de la pire des espèces. De celle qui se croit supérieure en toute circonstance.
L’héritière. Elle a un père, elle a une mère –ce qui est déjà bien plus que tout ce qu’a bien pu avoir Moa au cours de sa vie- mais surtout, elle a du fric plein les poches. Elle suinte le fric, le transpire et le dévaste. L’innocente ne tique pas. S’en contrefiche. Son assaillante se fatiguera bien assez vite si elle ne lui répond pas, tente-t-elle de se convaincre. Et puis, Sang-de-Bourbe ne sonne pas à ses oreilles comme une insulte, elle en est plutôt fière, fière de son père, de ses origines. Elle ne vaut pas moins qu’une autre. Ses résultats en témoignent ; Moa n’est pas dernière de classe, bien que loin encore d’être première un jour. Son amie la dévisage mais elle tire sur le bas de sa manche pour qu’elle avance tout en restant calme.
« Laisse la dire. ». Qu’elle s’en prenne à elle et continue, elle n’est pas encore allée trop loin. N’a-t-elle donc jamais appris à se méfier de l’eau qui dort ?
« Tu dois faire la honte de tes parents, traître à ton sang. Comment tu peux être aussi bête et trainer avec une Sang-de-Bourbe ? » Le sang de la brunette ne fait alors qu’un tour. Elle fait face.
« Laisse-là en dehors de ça tu veux ? » « Sinon quoi ? » Elle ne réfléchit pas. Un coup. Un seul. Elle secoue sa main tuméfiée dans le vide. Une phalange s’est quelque peu ouverte pendant qu’un cri fuse dans les couloirs. Mais elle s’en fiche.
« Non mais t’es complètement folle ma pauvre. » « C’est ça ouais, c’est moi la folle. » Moa se tourne et laisse la renarde au sol, le nez sanguinolent. Elle n’a certainement rien de cassé, Moa est plutôt frêle. Mais, bien qu’elle espère lui avoir fait mal, elle ne lui souhaite pas non plus de faire face à la moindre fracture. Parce qu’elle est comme ça, Moa, et qu’elle ne supporte pas qu’on s’en prenne à ceux qu’elle aime. Ses cheveux dégagent une odeur vanillée pendant qu’elle s’éloigne. Et il l’a prise avec lui, elle aussi, le vent.
Autant en emporte le vent.