Plus par habitude que pour les décoiffer, je passe distraitement ma main dans mes cheveux devenu récemment châtains pour cacher ce blond hideux et enfantin dont mère nature m’avait affublé. Un petit sourire se dessine sur mes lèvres quand je repense à la couche de gel qui enduisait chaque mèche il y a peu encore. Mère le voulait et je le faisais. Peu m’importait, je ne connaissais et ne connais malheureusement rien aux multitudes de manière de s’embellir. Si aujourd’hui j’ai arrêté le de les aplatir ainsi, et par la même occasion si je les ai teint, c’est parce que ma sœur jumelle me cassait les oreilles pour me faire changer. Lâche que je suis, j’ai fini par cédé. Pour tout vous dire, je pense que c’est une bonne chose. Malgré tout, Alix est une fille. Elle sait mieux que moi ce qui va aux garçons. Peut-être qu’une demoiselle me remarquera. Peut-être que je suis plus beau maintenant. Je n’ai jamais été le type dont on se retourne sur son passage. - en général, on ne me remarque même pas -, dans mon adolescence, j’étais très malchanceux : boutonneux, maigre, petit, étrange. Je suis toujours étrange et en fin de compte, toujours malchanceux. Ne me prenez pas pour un dépressif. A force, on s’habitue, on se forge. Je m’empêche de broyer du noir pendant plus d’un tiers de la journée. Le reste du temps, ou je dors, ou je m’occupe l’esprit. Mais je suis heureux. Et aujourd’hui, mon tiers est largement écoulée, c’est pourquoi je me détends tranquillement dans mon dortoir. Tout le monde est dehors, dans le parc. J’entends le rire et les éclaboussures. Normal, il fait beau. Je n’aime pas le soleil. Je préfère de loin rester confiner une journée entière dans la noirceur confortable de mon dortoir. Et dans la solitude. Je suis tellement timide que je n’ai peu d’amis, et confiance en presque personne. Comment voulez-vous que j’aie confiance en quelqu’un si je n’ai même pas confiance en moi ? Mes camarades de dortoir ne sont pas méchants, enfin à nouveau, tout dépend desquels. Ici à Poudlard, comme partout ailleurs, il y a deux catégories : Ceux qui se moquent de moi, et ceux qui m’ignorent. Et ma sœur, mais elle, elle a toujours été hors-catégorie.
Je pense sincèrement que je ne sers à rien et non, je ne dis pas ça pour qu’on me plaigne. Ça ne m’aiderait pas le moins du monde, même si un peu de réconfort ne me ferait pas de mal. Surtout si par fille avec une jolie voix. Je craque sur les jolie voix féminine. Parce que je suis en manque cruel d’amour, sans nul doute. Ma vie romantique est aussi plate qu’un lac sans vent, sans même un petit monstre aquatique pour faire des vagues de temps en temps. Et tiens, dans les mêmes nuances de gris, aussi. C’est de ma faute, entièrement de ma faute. Je ne suis ni intéressant, ni craquant. Je n’ai pas ce petit plus qui fait tourner la tête des femmes. Ou peut-être l’ai-je, mais alors il est bien caché. De plus, je suis très impopulaire. Ça repousse les filles ça. Si enfin une ose franchir le pas, et m’accoste, ne serait-ce que pour me demander de lui passer un ingrédient de potion, je deviens rouge, bégayant, et finalement très froid car je me sens ridicule. Quand j’y réfléchis, je ne sais pas bien me vendre. C’est vrai, plutôt que de penser à tous mes défauts, je pourrais plutôt tarir d’éloge sur mon intelligence, mes bonnes notes, ma motivation sans borne pour étudier, ma gentillesse, mon talent en matière de bavboules, mon imagination, celle qui me perdra, mon humour. Non ça pas en fait. Mon humour ne fait rire que moi, c’est depuis le jour où j’ai fait une blague des plus hilarantes à mon goût à mes voisins de compartiments du Poudlard express – qui se sont révélés être des garçons très appréciés du tout Poudlard – que je suis qualifié d’étrange. C’est une leçon que j’apprendrais à mes neveux : Ne pas faire de blagues dès la première rencontre. J’imagine déjà une nuée d’enfants blonds qui jurent comme des charretiers, courant autour de moi en cassant mes belles assiettes. Le cauchemar, Alix multipliée par 5 ou 6.
Les rires résonnent toujours dans la chambre quand des pas dans l’escalier les étouffent légèrement. Je ne lève pas la tête, conscient qu’un garçon entamant sa dernière année, comme moi, va dans quelques instants faire son apparition dans le dortoir. Dommage, j’étais bien seul. C’est triste mais je n’ai jamais pu avoir une chambre rien que pour moi. Nos parents, trop certains que des jumeaux ressentaient le besoin de rester toujours collés l’un à l’autre, nous avaient enfoui dans une chambre ensemble dès notre naissance, alors que nos petits frère et sœur s’étaient vu offrir à chacun une spacieuse pièce exclusivement pour eux seul dès leur plus jeune âge. Ce n’est pourtant pas comme si nous manquions de place pour nous séparer, loin de là. L’immense manoir, démonstrateur de la richesse de la grande et noble famille Dolohov, et les terres qui allaient avec, auraient suffi à accueillir tous les élèves de la maison Serdaigle. C’était presque si je m’y perdais. Mais dès que nous énoncions la demande d’être seul, père coupait court à la discussion en nous assurant que l’on disait ça sous le coup de la colère. Je n’ai pas insisté longtemps, je n’ai pas le courage de contredire l’autorité familial, contrairement encore une fois, à ma jumelle. Au fond de moi, je l’admire, même si je lui reproche continuellement de gâcher les repas de famille. Reproches qui servent surtout à étouffer ma culpabilité de ne pas la soutenir. Parce que les repas de famille, entre nous, ils ne sont pas vraiment gaies. Entre le cousin Antonin complètement fou, prêt à tuer quiconque menace le seigneur des ténèbres, et la grand-mère, défenseuse des sangs-pur jusqu’au bout des ongles, qui a influencé toute la famille, on entend plus parler de magie noir, de haine envers les moldus et de noblesse que de papillons et d’amour, ni même de .. « tu fous quoi encore enfermé mec ? T’es vraiment un vampire ... ». Mon compagnon et ses gentilles paroles avaient passés le pas de la porte sans aucune discrétion. Fin du tourbillon de pensée pour aujourd'hui, j'entendais des pas lourdauds qui suivaient les premiers. C'était peut être mieux comme ça, après tout, trop d'idées noires tuent les idées noires ..