On ne pourra pas m'empêcher de goûter au bonheur.
Serrant faiblement la fine couverture sur son corps trop mince, Jules tentait de gagner de la chaleur en vain. De la vapeur quittait sa gorge pour prendre place dans sa chambre. Dieu qu’elle avait froid, même si elle était habituée. Son père avait encore dépensé tout son argent, ne laissant plus rien à sa famille pour payer les factures. C’était ainsi depuis longtemps, très longtemps. Depuis bien avant sa naissance. Elle qui n’était pas désirée, née parce que ses parents n’avaient pas accompli le geste de se protéger. Avoir un enfant n’était pas quelque chose que ses parents avaient désirés. S’en passer était même quelque chose qu’ils avaient préconisée. Pour cela qu’elle n’avait pas le droit de se plaindre ou même de se manifester parfois. Jules avait de la chance d’être venue au monde. Si on pouvait appeler ça de la chance. Ses paupières fermés, elle se recroquevillait un petit peu plus dans le lit. Heureusement qu’elle n’était pas souvent malade, ses parents n’auraient surement pas prit le temps de s’occuper d’elle. Parfois c’était à se demander pourquoi sa mère et son père étaient mariés depuis plus de dix ans parce que Jules savait qu’ils ne s’aimaient pas. Ils suffisaient de voir leur regard, toujours tellement froid, et les contacts physiques se faisaient juste quand ils ressentaient le besoin de coucher. Comme ils pourraient coucher avec des inconnus qu’ils venaient à peine de rencontrer. Pas de passion, pas d’amour. Rien du tout. «
Lèves toi, feignasse. Tu as assez bien dormit. Et tu n’as pas intérêt à te montrer avant le soir, j’ai d’autres choses à faire ». Un autre amour ayant manqué dans cette famille est l’amour maternel. Ne disant rien, sachant que c’était peine perdue, Jules se levait pour enfiler rapidement les premiers vêtements qui étaient à sa portée. Le froid perforant son corps sans ménagement. Elle se dépêchait de descendre au premier étage pour voler le peu de nourritures qu’il y avait sans que sa mère la voie faire avant de sortir. Bousculant au passage un homme d’une quarantaine d’année. «
Putain ! Tu ne sais pas faire gaffe espèce de sale gamine ? » «
En même temps, je ne peux pas tenter de passer sans te bousculer. Bouffer comme un porc ne permet pas de prendre peu de places malheureusement. » Un sourire, sarcastique, se dessinait sur ses lèvres sèches alors qu’elle fixait l’homme du regard sans sourciller. Pas grave si elle était une enfant et lui un homme, elle en avait déjà affronté depuis le temps. La main de l'homme ne ratait pas sa joue qui commençait à lui piquer. Mais le regard de Jules ne le quittait pas. Lever la main sur une gamine était qu'une preuve de lâcheté après tout. «
Dégages d’ici, toi. Je t’ai dit que je voulais plus voir ta gueule » Sa mère était arrivée pour entraîner l’homme à l’intérieur avant de fermer la porte devant sa fille. C’était ainsi depuis tellement longtemps que Jules n’en était pas étonné. Elle avait pratiquement grandit dans la rue, son royaume. Si elle ne pouvait pas compter sur ses parents, Jules savait qu’elle pouvait compter sur elle-même pour survivre.
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Jules était plaqué contre un mur alors que ses lèvres étaient attaquées avec avidité. Mais elle retenait de rire, pour l’égo du garçon contre elle. Nul. C’était le mot qui convenait pour décrire les baisers qu’elle échangeait avec son petit ami, Maxwell. Il n’était pas doué, il ne la faisait pas rêver avec ce simple baiser. Dire le contraire ne serait qu’un mensonge. Mais ne pouvant pas se retenir, un rire quittait sa gorge. Maxwell se reculait pour la fixer «
Qu’est-ce qui te fait rire ? ». Cela ne l’aidait pas à se calmer. Jules quittait le mur pour avancer un petit peu en rigolant toujours. Elle finissait par lâcher «
Rien, une connerie ». La jeune fille sentait son regard sur elle mais elle s’en fichait. «
Bon dégages d’ici, j’ai besoin de me reposer » «
Bordel, tu fais chier. Tu m’avais dit qu’on allait coucher. » Levant les épaules simplement, Jules disait. «
J’en ai plus envie. Donc vas te vider ailleurs » Se laissant tomber dans son divan (Récupérer dans la rue il y a un moment), elle posait sa tête en arrière en soupirant. «
Tu fais chier Levinson, vraiment. » Jules ne disait rien, elle écoutait les pas furieux de Maxwell qui descendait l’escalier avant de claquer la porte. Cela ne lui faisait rien du tout, il avait l’habitude de se faire éconduire. Puis s’il lui donnait vraiment envie, il ne se verrait pas virer de la maison. Jules fermait les yeux, profitant du silence qui régnait dans la baraque. Sa mère était absente depuis une semaine, et son père était comme à son habitude dehors. Loin d’être inquiète pour sa mère, Jules profitait de la maison autant qu’elle voulait. Même s’il n’y avait toujours pas de chauffage, ni d’électricité et encore moins d’argent comme de la bouffe. Elle avait grandi sans avoir tout cela. Ce qu’elle n’avait pas connu ne pouvait pas lui manquer. Puis même, elle pouvait assez bien se débrouiller toute seule.
À la place de se reposer, Jules se levait pour aller se chercher une bière. Même si le frigo était vide de nourriture, l’alcool était toujours présent. L’alcool réchauffait petit à petit son corps fin. Cela lui faisait du bien. Enfilant ensuite sa veste, elle sortait de la maison sans fermer à clé (Qui viendrait voler chez eux ? Il n’y avait rien du tout d’intéressant) pour se balader. Dans les quartiers plus chics. Sans l’avouer tout haut, cela faisait du mal à Jules d’avoir sa vie même si elle était habituée. Ce n’était pas elle qui abordait un sourire, un vrai, sans raison particulière. Pas comme toutes les personnes qu’elle croisait par ici. Pourtant, cela lui arrivait de sourire. De sourire vraiment. Comme les fois où elle traînait avec son meilleur ami. Puis quand elle voyait qu’il était jaloux. Cela se faisait un petit moment que Jules savait qu’il y avait quelque chose derrière ces faits. Et à presque quatorze ans, on se devait de savoir connaître un minimum ses sentiments. Jules aimait un peu trop son meilleur ami. Voir beaucoup trop. Si Maxwell était juste un passe-temps, son meilleur ami ne l’était pas. Mais elle n’avait pas la possibilité de connaître vraiment le bonheur donc elle se tâtait en observant de loin le bonheur des autres. Au moins, le bonheur existait. Même s'il était loin d'elle.
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La main de sa mère accrochée à son épaule, Jules se sentait bloquée. Bloquée dans un pays qu’elle ne connaissait pas. Ce n’était pas un secret, elle savait qu’elle était une sorcière comme ses parents. Et cela même si son père était un sorcier assez médiocre, Jules ne sachant pas comment il avait fait pour être diplômé –s’il l’était- mais soit. Mais jamais, elle avait pu envisager qu’elle serait arraché de son Royaume-Uni natal pour débarquer ici. En Ukraine. Sa mère n’acceptait pas qu’elle soit à Poudlard, même si elle avait été acceptée. Elle ne voulait pas que sa fille, qu’elle avait si longtemps reniée, reçoive un autre enseignement qu’elle à son âge. Durmstrang. Voilà le nom de l’école où elle devait aller alors qu’elle ne parlait que l’anglais. «
Je … » «
Tu la fermes Absynthe, je ne veux pas t’entendre. Tu iras dans cette école. Tu pourras aller à Poudlard seulement si je crève ». D’habitude, elle aurait refusé de se taire. Mais les choses n’étaient pas pareilles. Puis elle l’avait appelé par son premier prénom. Cela faisait tellement longtemps qu’elle ne l’avait plus entendu. Dire qu’elle avait le prénom d’un alcool qui avait déjà fait plus d’une centaine de victimes insouciantes … Heureusement qu’elle l’aimait bien pour sa particularité. «
Et je te préviens, tu as intérêt à me faire honneur. Je ne veux pas avoir une salope de fille incapable ». Jules serait son poing fort, tout en se mordant la langue à sang, pour se permettre de ne rien dire. Ou même de montrer que ce qu’elle lui disait la faisait souffrir, elle se refusait de se montrer lâche. Finalement Jules les rejoignait les autres élèves qui allait rejoindre l’école avec les fournitures que sa mère avait acheté sans un regard pour sa génitrice.
Jules voulait retourner chez elle-même si ce n’était pas possible, quitter cet endroit qu’elle ne connaissait pas. Et surtout, revoir son meilleur ami. Elle n’avait pas eu le temps de le revoir depuis qu’elle lui avait avoué qu’elle l’aimait. Sa mère l’avait enlevé juste quelques heures après. La jeune fille aurait pu être heureuse mais comme toujours, on lui avait privé de son bonheur. Parce qu’elle savait, elle en était certaine, que ses sentiments étaient partagés. Ils avaient grandis ensembles, elle le connaissait. Mais là, elle était si loin. Pourtant Jules murmurait avant d’entrer dans l’école «
Je reviendrais Lysander ».
...
Avançant avec un sourire en coin dans l’école, Jules abordait une joie obscène en cette fin d’année scolaire. Les gens la dévisageaient. Avant d’observer son corps. Elle n’avait plus un corps si frêle. On pouvait même dire qu’elle avait de belles formes sans oublier ses tatouages qui rajoutaient une touche de piquant. Elle plaisait, elle le savait. Et elle en abusait pour gagner des cœurs, avoir ce qu’elle voulait. Mais aujourd’hui, Jules n’avait pas en tête de s’intéresser aux autres étudiants de l’école parce que dans sa main, elle tenait son moyen de se libérer. Sa mère était morte. Accident. Elle n’avait aucun moyen de survire au plus grand plaisir de Jules. Parce qu’elle l’avait tellement haïe durant toutes ces années où elle était loin de l’Angleterre, de toute son âme. Sa mort était vraiment une libération, une bouffée d’air frais dans sa vie. Dans peu de temps, la jeune femme pourrait retourner chez elle et aller à Poudlard. Retrouver Lysander qu’elle n’avait jamais oublié. Après tout, sa mère l’avait kidnappé donc cela ne sera pas difficile de retourner sans trop de soucis. Un éclat de rire, combinant joie et folie, quittait sa gorge. C’était donc ça le bonheur ? En devenant assez populaire dans son école par son tempérament, Jules n’était pas devenue heureuse. Ni même en ayant des bonnes notes même si pour cela, c’était surtout grâce à d’autres personnes. C’était si futile, cela ne l’intéressait pas. Elle était heureuse quand on s’intéressait à elle et cela même si c’était uniquement pour profiter de son corps. Mais jamais elle avait connu un si grand bonheur. Libre, elle l’était.
«
Je retourne en Angleterre demain ». C’était dit, devant tous ses proches. Les examens étaient terminés, elle avait réussi son année. Les autorités anglaises avaient exigés que l’Ukraine la renvoie chez elle parce qu’elle était là, encore mineur. Ses valises étaient prêtes. Comme elle. «
Quoi ? Déjà ? » «
Cela va faire deux mois que ma salope de mère est morte. Cela n’est pas tellement une surprise ». La personne qui avait parlé était un ami. Et Jules avait compris qu’il était amoureux d’elle mais ses sentiments n’étaient pas réciproques. Son cœur était déjà pris. Depuis un moment déjà. Elle le voyait baisser la tête pour cacher la déception avant de s’intéresser aux autres personnes présentes dans la pièce. Elle échangeait des câlins avec les quelques amis proches qu’elle avait avant de leur dire «
Je vous écrirais quand je serais rentrée chez moi et n’hésitez pas à faire de même ». Parce que même si elle ne leur disait pas énormément de fois qu’elle les appréciait et qu’elle tenait à eux, c’était le cas. Et même si sa vie n’était pas ici, elle ne pourrait jamais oublié ces années qu’elle avait passé ici.
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Jules le voyait, son meilleur ami. Il était devant le train en attendant de pouvoir rentrer pour s’y installer. Parcourant les mètres qu’il y avait entre eux, son regard restait accrocher sur lui. Il était si beau … Son cœur ratait des battements. Alors qu’elle espérait pouvoir le rattraper pour lui faire une surprise. Elle n’avait pas pu le voir avant aujourd’hui et cela l’avait attristé. Il n’habitait plus dans la même rue qu’elle vu que sa mère était morte et qu’on aurait ne l’aurait pas laissé avec sa sœur dans la rue. Alors Jules avait attendu que les jours, les semaines, les mois passent pour le revoir. Et enfin, il était là. Si proche mais encore beaucoup trop loin. Ses mains ne demandaient qu’à le toucher à nouveau mais elle savait qu’elle devrait peut-être éviter. Mais comment se contrôler quand tant d’années étaient passées et que la seule chose qu’on désirait durant celle-ci était à notre portée ? Cela paraissait tellement difficile. Voir impossible. Plus que deux mètres et elle était à ses côtés. Ses mains tremblaient légèrement et son cœur battait vite. Jules ne pouvait pas résister … Posant sa main sur son bras, elle murmurait un «
Bonjour Lysander ».
Poudlard … C’était tellement différent de là où elle venait. Plus geai, moins sinistres malgré l’ambiance qu’il y avait. Ici, on ne risquait pas sa vie au moins malgré toutes les rivalités présentes. Les élèves ne disparaissaient pas du jour au lendemain sans que personne ne les retrouve. Quoi que les élèves puissent dire, ici ils sont plus en sécurité que s’ils avaient été Durmstrang. Aucun doute là-dessus. Mais Jules devait avouer qu’elle aimait cette école, elle se sentait à sa place même si ce n’était pas courant qu’une fille débarque à Poudlard en ayant des assez bonnes notions de magie noir. La jeune fille aurait pu paraître dangereuse parce qu’elle pourrait l’être mais elle s’en fichait. Pourquoi risquerait-elle de l'utiliser ? Au moins, elle s’était faite une place. En dehors du fait que les élèves soient plus en sécurité, cela lui faisait bizarre de parler anglais tous les jours. Elle qui avait dû apprendre à parler l’ukrainien pour savoir suivre les cours et s’intégrer dans son ancienne école. Mais c’était un changement qui la faisait sourire. Parce que cela lui rappelait qu’elle était libre. Libre d’aller là où elle voulait parce que personne ne choisissait à nouveau à sa place. Mais ce qui la rendait plus heureuse qu’être de retour dans son pays natal est qu’elle pouvait revoir son meilleur ami. Son Lysander. Lui aussi avait grandis et elle l’aimait toujours autant. Voir plus. Elle comptait bien tout faire pour l’avoir comme elle se l’était promise. Puis en attendant de l’avoir pour elle, Jules ne savait pas si elle changerait cette habitude d’appartenir durant quelques heures à un homme différent. Elle verrait, elle n’était pas ici pour penser à cela.