Les mains glissées dans les poches de mon manteau, le nez enfoui dans mon écharpe, j’attendais depuis près de dix minutes une personne qui n’avait pas pour habitude d’être en retard. En effet, c’était plutôt moi qui était en retard aux rendez-vous, ce n’était jamais le cas de Caleb qui, en jeune homme sérieux qu’il était, était toujours parfaitement ponctuel. Sauf ce samedi. Une sortie à Pré-au-Lard était organisée et j’avais proposé à Caleb de passer la journée avec lui, il avait évidemment accepté, notre relation étant au beau fixe –pour une fois – je préférais en profiter. J’étais littéralement en train de mourir de froid et mon frère n’arrivait pas. Je lâchai un long soupir et vit un groupe d’élève approcher dans ma direction. Je plissai les yeux, essayant de reconnaitre leur visage, je reconnus surtout leur insigne. Serpentard. Immédiatement j’eus un mauvais pressentiment. Lorsque je vis la tête de Théodore Adams mon mauvais pressentiment se confirma et je me mordis la lèvre pour contenir la colère qui commençait à s’emparer de moi. Je m’approchai du groupe, et me plantai devant mon frère qui était là, comme je l’avais prévu.

« Salut Caleb, on va toujours à Pré-au-Lard ensemble ? » Lui lançai-je, les mains sur les hanches. Il jeta un coup d’œil à ses amis avant de me répondre d’un ton détaché « Pas aujourd’hui Jamie. » Le groupe me dépassa tandis qu’Adams lâcha un petit ricanement. Mon cœur, et surtout ma colère me disait de les rattraper et de balancer clairement ma façon de penser à mon frère et faire taire au passage cet abrutit d’Adams, mais pour une fois ma raison prit le dessus. Nous réglerons ça en privé mais Caleb Peter Delaney, tu me paierais ça. Ce n’était pas la première fois qu’il me faisait le coup, qu’il me lâchait pour sa bande de copains abrutis mais cela était toujours aussi douloureux, et il osait me dire après que je comptais plus que n’importe qui à ses yeux ! Il se foutait ouvertement de ma gueule oui. Je restai un moment debout, seule au milieu du parc, je n’avais rien à faire de ma journée du coup… Maudit soit mon frère ! Je lançai un coup d’œil vers Pré-au-Lard, ma foi, je pouvais toujours y aller faire un tour, m’arrêter dans un bar et boire un coup… J’avais bien besoin d’un remontant. Je me mis donc en route vers le pub les Trois Balais, c’était le pub le plus connu et réputé de Pré-au-Lard, on y faisait les meilleurs Bières Aux Beurres et la majorité des élèves de l’école s’y réunissaient. Je jetai un coup d’œil par la fenêtre et vit à l’intérieur Adams, Caleb et leur bande riant à une table. Au diable les Trois Balais et ses délicieuses Bières aux Beurres je n’y mettrais pas les pieds aujourd’hui. Je trainais le pas en direction de la Tête de Sanglier, contrairement aux Trois Balais ce pub avait une très mauvaise réputation, mais à vrai dire c’était bien la dernière chose qui m’importait aujourd’hui. Au moins j’étais certaine de ne croiser personne que je connaissais, je serais seule, juste moi et un verre de Whisky Pur feu.

Perdue dans mes pensées, j’arrive sans m’en rendre compte devant la Tête de Sanglier, je pousse la porte du bar miteux et entre d’un pas décidé. Je ne suis venue que peu de fois ici, mais l’endroit est toujours le même, mal fréquenté, sale, mais plutôt calme. Le pub est rempli d’hommes, plus ou moins jeunes ou vieux, et tous les regards se posent sur moi. Certaines filles seraient peut être gênée, effrayés, mais ce n’est pas mon cas, je viens d’un quartier défavorisés je vous rappelle et ce n’est pas nouveau que j’attire l’attention de la gente masculine. Je sors les mains de mes poches, m’approche du bar et m’assois sur un des tabourets. J’observe discrètement le bar en silence, je retire mon écharpe m’étant un peu réchauffé et demande un whisky pur feu au barman. Celui-ci me dévisage longuement, son visage est mince, presque maigre, et les cernes qu’il a sous les yeux prouvent que visiblement il est le seul barman du bar et qu’il passe de très mauvaises nuits. Il ne doit pas être bien plus vieux que moi, je lui donne 21 ou 22 ans au grand maximum. Il doit avoir quitté Poudlard il y a un an ou deux pas plus. Devant son regard insistant je ne m’empêche d’insister « Je pourrais avoir ma commande ? S’il te plait. » Il semble confus, marmonne quelques mots que je ne comprends pas avant de me servir mon verre. Enfin, ce n’était pas trop tôt. Je bois quelques gorgées qui me brulent instantanément la gorge. Ma mère ne serait pas fière de moi si elle me voyait à cet instant, seule dans un bar en train de boire, comme mon alcoolique de père. Je l’imagine sur son canapé qu’il ne quitte jamais, sa bouteille de whisky à la main, totalement bourré, baignant dans son vomi, et oui, père, personne ne ramasse ta gerbe quand je ne suis pas là. Cette pensée me fait sourire et je finis mon verre d’un trait lorsque je sens une présence à ma droite. Quelqu’un, un homme, vient de prendre place sur le tabouret voisin, pitié, faites que ce ne soit pas un mec bourré qui essaye de me draguer, car ce n’est vraiment pas la journée. Je jette un bref coup d’œil à mon voisin de tabouret et je sens mon cœur s’emballer. Putain. Pas lui. Il ne m’a fallu pas moins d’une seconde pour reconnaitre ses yeux bleus et sa petite barbe de trois jours qui le rendent si sexy. Noah Carlyle, une charmante rencontre mais une énorme erreur. Il avait fallu que moi Jamie-Hope la née moldue qui ment à tout le monde sur ses origines se retrouve à passer une nuit avec un Mangemort. Je me souviens parfaitement de l’angoisse que j’ai ressentis lorsque j’ai vu le matin au réveil la marque des ténèbres sur son avant-bras… D’ailleurs cette angoisse vient de réapparaitre. Nos regards se croisent. Putain, je suis foutue, il m’a surement reconnue, une métisse aux cheveux châtains, les yeux verts, ça ne se croise pas à tous les coins de rues… J’avale ma salive, passe nerveusement une main dans mes cheveux et essaye de paraitre le plus naturelle possible. « Ouah. Noah, ça fait … longtemps… » Dis-je d’un ton décontracté. Je sens ma voix trembler et je prie de toutes mes forces pour qu’il ne remarque rien.

Mes mains tremblaient et je sentais mon cœur battre à la chamade. Putain, quelle bonne idée d’aller à la Tête de Sanglier, je savais pertinemment que ce bar était plus que mal fréquenté, il était évident que Noah Carlyle, le Mangemort, traine ici. Je me maudissais intérieurement d’avoir quitté le château, j’aurais mieux fait de rester à Poudlard, rejoindre Marshall ou trainer avec Lola dans la salle commune. Je ne m’étais jamais sentie aussi angoissée, d’habitude, l’angoisse n’était pas réellement un sentiment qui m’habitait, au contraire, j’étais insouciante, toujours de bonne humeur, souriante, rieuse mais pas angoissée sauf à cet instant précis, lorsque je me retrouvais à nouveau dans un bar avec la seule personne au monde que j’espérais ne jamais revoir. J’inspirai profondément une bouffée d’air frais en tentant de ma calmer. Nous étions dans un pub, dans un lieu public, il y avait d’autres gens présents, il ne pourrait rien me faire…Du moins, pas maintenant. Comment étais-je censé réagir ? « Salut Noah, au fait l’autre fois quand on a couché ensemble je me suis barrée en vitesse parce que j’ai vu la marque des ténèbres sur ton bras et je suis une née moldue mais personne ne le sait. » Hmm…Non, j’avais beau penser qu’il fallait toujours faire preuve d’honnête, je savais bien qu’en faire preuve ici ne m’aiderait en rien du tout.

Je jetai un bref coup d’œil vers lui, il affichait un sourire qui se voulait charmant, rassurant mais qui ne réussissait pas le moins du monde à me rassurer justement cela me faisait encore plus paniqué. «Jamie. » Me salua-t-il. L’entendre dire mon nom me fit frissonner, non pas de plaisir comme lors de notre dernière rencontre mais d’angoisse cette fois ci. Par Merlin, je donnerais tout pour quitter cet endroit. Je l’entendis commander un whisky-pur-feu, comptait-il encore se souler et passer la nuit avec moi ou avait-il des projets plus funestes pour moi cette fois ci ? Je tentais de ma rassurer du mieux que je le pouvais, repassant en revue toutes les situations possible et comment je pourrais m’en échapper et j’en arrivais à une bien triste conclusion ; Si Noah décidait de me tuer aujourd’hui, il y avait peu de chance que je m’en sorte. Premièrement il était diplômé de Poudlard et j’avais entendu dire qu’il y avait était un élève brillant, deuxièmement, il était guérisseur à St-Mangouste et devait sans nul doute connaitre des sorts puissants et dangereux et troisièmement c’était un Mangemort !

J’allais finir par croire que j’étais réellement maudite, pourquoi fallait-il que ça m’arrive à moi la née moldue qui cache ses origines de passer la nuit avec un Mangemort ?! Il devait bien il y avoir des tas de Serpentardes dérangées qui aurait adoré être à ma place, cela aurait même été un véritable fantasme pour elles, mais non, moi je n’ai rien demandé à personne je me suis fait draguer par un charmant jeune homme et bien évidemment je ne me suis pas demandée à un seul instant s’il n’était pas dangereux. Caleb avait raison quand il me disait qu’un jour il m’arriverait quelque chose à force d’agir sans réfléchir.
J’attrapai rapidement mon verre et en but la moitié d’une traite, autant se faire tuer autant être saoul non ? Et puis l’alcool donnait du courage et j’en avais bien besoin à cet instant précis. Je tentais de me calmer et de me relaxer, j’étais une grande fille et j’en avais vu d’autre, ce n’était pas la première fois que je me foutais dans le pétrin mais comme toujours je réussirais à m’en sortir, j’étais bien plus maline que la plupart des gens le pensent et puis mon joli minois m’a souvent sorti de situations délicates, peut-être qu’il me sauverait encore une fois.

« Oui ça fait longtemps... Tu t'es sauvée plutôt vite la dernière fois. »

Je faillis m’étranger avec ma gorgée de whisky et me mis à tousser violemment. Visiblement il était aussi direct que je l’étais et n’avait pas peur de dire clairement les choses. C’était peut-être mieux ainsi, au moins il ne tournait pas autour du pot ce qui aurait le don de me rendre encore plus nerveuse que je ne l’étais déjà.

« Hum oui… J’avais des choses à faire ce jour-là, notre rencontre n’était pas réellement prévue… Pourquoi tu aurais préféré me voir à tes côtés à ton réveil ? » Répondis-je d’un air charmeur.

Jouer de mes charmes était une chose que je maitrisais parfaitement et puis peut être que si je jouais les jeunes filles innocentes charmeuses voir peut être même entiché, il penserait que je ne suis rien d’autre qu’une jolie fille stupide et naïve et qu’il me laisserait tranquille. Voilà, j’avais trouvé mon moyen de me sauver. J’esquissai un petit sourire satisfaite, finit mon verre et en commanda un autre. Jouer les filles un peu alcooliques lui ferait peut être aussi fuir tiens.
Mon verre arriva et j’en bus immédiatement une nouvelle gorgée.
« Où était-tu passée tout ce temps ? Tu habites dans le coin ? »

« Oh non j’habite Bristol mais je … » Je m’arrêtai subitement de parler. Putain qu’est-ce que je pouvais être conne des fois, Noah ne savait ni mon âge, ni que j’étais encore élève à Poudlard et maintenant grâce à moi, il savait où me trouver pendant la période scolaire et durant les vacances. Et s’il décidait de faire des recherches sur moi, il ne mettrait pas longtemps à savoir que Jamie-Hope Delaney vivait à Bristol dans le quartier de St-Pauls avec ses frères et son père, tous des moldus, qui sait alors ce qu’il leur ferait. Ce n’était plus ma vie que je mettais en danger mais aussi celle de ma famille.
Il fallait que je détourne son attention et vite, et je me doutais déjà que cela ne serait pas une chose facile. Je retirai ma veste brusquement et me tourna vers lui en minaudant :
« Et toi qu’est-ce que tu faisais ? J’espérais tout de même que tu me donne de tes nouvelles ou qu’on puisse se revoir… »
J’avais l’air d’une nunuche sans cervelle, mais par Merlin, je priais de toute mes forces pour que ma ruse fonctionne.

J’inspirai profondément en tentant de garder mon calme. « Reste calme, respire, souris, cligne des yeux et détends toi. » Me répétait instinctivement une voix dans ma tête. Il fallait que je me détende, Noah était loin d’être stupide et il avait sans doute déjà remarqué à point j’avais l’air tendue et angoissée. Je passai nerveusement une main dans mes boucles dorées avant de fixer mon verre d’un air distrait. Les choses ne se passaient tellement mal… Pour le moment en tout cas. Il suffisait que je reste détendue et que j’agisse comme si tout était normal. « Exact, tu as couché avec ce beau mec, tu es partie comme une voleuse le lendemain, et c’est tout. » Me fit ma conscience. Mais il m’était totalement impossible d’oublier le tatouage en forme de serpent qu’il portait sur son avant bras. Je me souvenais encore parfaitement de l’horrible frisson qui me parcourut tout le corps lorsque je le vis pour la première fois. Je savais pertinemment que ce n’était pas un tatouage ordinaire qu’avait Noah, c’était la marque des ténèbres. Les plus grands fidèles et admirateurs du Mage Noir portait ce tatouage… Me rappeler que j’avais passé la nuit avec un sorcier fou de magie noire me donnait le tournis. Malgré ses beaux yeux et son sourire charmeur, ce type aurait pu me torturer, m’assassiner pendant mon sommeil sans que je me doute de rien. Il était désormais certain que je ne passerai plus jamais la nuit avec un inconnu.

La voix du guérisseur me fit sursauter et me sortir de mes pensées. « Et bien je suis un homme très occupé. J'avais beaucoup de choses à faire... Quelques problèmes à régler... » Par Merlin… Que voulait-il dire quand il parlait de « problèmes à régler » ?! Quels genre de problèmes ont a réglés les Mangemorts ? Tuer quelques innocents, torturer des moldus ? J’avais envie d’hurler, de lui balancer mon verre sur la tête de lui envoyer quelques sorts bien douloureux à la figure. Qu’avait-il fait pour entrer parmi les Mangemorts ? La magie noire ne m’intéressait nullement et pour moi ces sorciers obscurs n’étaient rien d’autre que des détraqués, des fous furieux qui méritent une place à Azkaban. Je serais les poings, discrètement, sans cesser de sourire malgré l’envie de lui écraser mon poing en pleine tête et de lui briser au passage son délicieux petit nez.

Enfoiré de Magemort. La peur semblait s’être dissipé tant j’étais révoltée. Ce mec s’en était sans doute pris à des nés moldus, des moldus ou même des cracmols uniquement pour son plaisir personnel ou pour prouver sa puissance. C’était pitoyable, je n’avais pas à craindre un lâche qui s’attaquait au plus faible que lui juste pour se croire puissant. J’avais beau être une née moldue, élève à Poudlard cela n’avait plus aucune importance pour moi. Certes, il pourrait sans aucun doute me neutraliser rapidement, mais je n’allais pas me laisser prendre au piège comme une petite bête apeurée. Je n’avais pas rejoint la maison des courageux pour rien après tout.

Je m’appliquais soigneusement à rester dans mon rôle de composition et me mit à glousser bêtement après qu’il ait pris la parole. J’attrapai rapidement son bras et me mit à lui caresser doucement la paume de la main. « Un homme occupé ? Tu dois être un homme vraiment important alors… Quels genre de problème avait tu à régler ? » Ce que je faisais était extrêmement dangeureux, je jouais avec le feu, mais cela m’amusait, même si Noah savait que je connaissais son secret il n’allait pas, à moins d’être complétement irresponsable, le révéler ouvertement. Mes insinuations ne ferait que le mettre mal à l’aise. Mais au moins, il saurait que je lis très clair dans son jeu et que son petit numéro du charmant guérisseur ne marchait pas avec moi.
« Que dirais-tu de prendre une chambre ? Le confort n'est pas fameux, mais les lits sont toujours propres. » Continua-t-il. Mes yeux s’écarquillèrent de surprise. Wow ! Alors, là ! Je ne m’attendais pas du tout à ça. Merde il voulait remettre ça… Comment la Jamie-nunuche que je venais d’inventer allait pouvoir décliner une pareille invitation. Je me mis à rire doucement tout en lui lançant un regard charmeur. Je me mordis la lèvre inférieure avant de répondre. « Voyons Noah … » Ma voix se brisa tandis que je l’observais. Bon sang ! Sa proposition était drôlement alléchante. Pourquoi fallait-il qu’un sorcier beau comme un dieu, intelligent et exerçant une profession respectable soit-il un partisan du Mage Noir ? Décidément, le monde était vraiment mal fait… « Pour qui me prends tu ?! La dernière fois, j’avais un peu trop bu et j’ai dit oui un peu trop rapidement. Mais je ne m’allonge pas dans le lit de n’importe qui. » Répliquai-je avec un petit sourire en coin. J’avais lourdement insisté sur les mots « n’importe qui ». Ma réponse avait était insolente, j’en avais parfaitement conscience et je savais également que j’allais probablement amèrement regretter mon arrogance.